Jeux olympiques: l'interview intégrale de Minima Gesté, première drag-queen à porter la flamme olympique en France

  • il y a 4 mois
La drag-queen Minima Gesté portera la flamme olympique pour les Jeux de Paris, elle était l'invitée de BFMTV ce samedi soir.

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Transcript
00:00 Ce soir nous recevons une porteuse, future porteuse de flammes olympiques, la personne de Mini Majesté.
00:06 Bonsoir. Merci d'être avec nous ce soir.
00:11 Le 1er mai, la mairie de Paris publiait sur son compte Twitter un portrait de la drogue queen que vous êtes,
00:19 rappelant que vous porteriez la flamme olympique des JO de Paris 2024.
00:23 Vous n'êtes pas la seule évidemment à qui ça arrivera.
00:26 Ce sera lors du passage de la flamme olympique dans la capitale.
00:30 D'abord, pour ceux qui ne vous connaissent pas, pouvez-vous vous présenter ?
00:33 Bien sûr. Je suis Mini Majesté, une drag queen à Paris depuis 8 ans maintenant.
00:37 Je me spécialise dans l'animation de jeux, que ce soit des bingo, des blind test,
00:42 et surtout avec un ancrage toujours très important dans l'associatif,
00:46 étant donné que j'ai monté une association qui tous les ans récolte de l'argent pour la lutte contre le VIH.
00:51 Vous êtes un petit peu une star dans le milieu.
00:54 Je fais partie des murs.
00:56 Non, vous êtes une star.
00:58 Des meubles.
01:00 Ça fait 8 ans que je fais du drag. J'ai plus de 30 ans, donc pour des drags, je commence à être un petit peu la tranche supérieure.
01:05 C'est quoi le drag d'ailleurs ? Au passage, désolé de vous donner des définitions.
01:09 Moi j'adore vulgariser. Je suis là pour expliquer aussi. C'est mon travail.
01:14 Mon travail, qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que c'est que le drag ?
01:16 C'est un art performatif qui me permet de m'exprimer comment je souhaite être au mieux, au plus libre,
01:24 que ce soit par des performances sur scène, des lip syncs, comme on peut voir,
01:28 ou que ce soit par des jeux, des bingo, des blind test.
01:31 Mon but, et le but de tous les drags, c'est de faire passer un bon moment dans le fun,
01:36 tout en rappelant pourquoi on fait ça et les causes que l'on souhaite défendre dans la communauté LGBTQ.
01:41 C'est ça, parce que ce n'est pas qu'un art. Derrière, il y a des convictions, voire des combats liés à des parcours.
01:48 Bien sûr. En drag, je fais plus de 2 mètres. Donc forcément, les gens me repèrent, me regardent, me voient.
01:54 Donc on a une plateforme juste de par ma stature.
01:57 Donc autant dire des choses intelligentes et défendre des causes qui nous sont chères,
02:00 moi étant la lutte contre le VIH et la lutte contre l'LGBTQI+phobie.
02:04 Qu'est-ce que ça représente pour vous de porter la flamme olympique dans quelques jours ?
02:07 Porter la flamme olympique, c'est une énorme fierté.
02:11 Une énorme fierté de pouvoir apparaître devant le monde entier, surtout à Paris,
02:16 qui est la ville qui m'a accueilli, qui m'a fait grandir.
02:19 - Vous venez d'où ? - Je suis de Toulouse à la base, dans le sud-ouest.
02:22 Et pouvoir la porter à Paris, c'est une fierté parce que je sais que la visibilité, c'est très important.
02:27 C'est vraiment le combat de toute une génération et on continuera encore et encore.
02:32 Moi j'ai découvert mon homosexualité bien trop tard parce qu'il me manquait des personnes.
02:37 Donc en tant que drag queen, mais aussi en tant que moi, Arthur, jeune homme homosexuel,
02:42 je suis ultra fier et ultra fier de pouvoir porter la flamme le 14 juillet à Paris.
02:46 - Vous auriez imaginé cela à vos débuts dans le drag ?
02:50 - C'était impossible. En 2015, quand j'ai commencé le drag il y a 8 ans, c'était absolument impossible.
02:54 Ça n'arrivait pas à être invité sur des plateaux télé.
02:57 Moi je travaille avec beaucoup d'entreprises, surtout pendant le mois des fiertés.
03:00 Je suis là pour les choses qui ne sont pas possibles.
03:02 Et donc là, ça montre quand même une ouverture d'esprit de la société,
03:05 même s'il y a encore des crimes gayphobes, même s'il y a encore des personnes trans qui se font foutre à la rue,
03:11 juste de par qui elles sont.
03:13 - Tout le monde n'est pas tolérant, c'est le moins que l'on puisse dire.
03:15 Et vous en avez fait l'expérience encore cette semaine,
03:18 puisque juste après l'annonce de la mairie de Paris vous concernant,
03:21 s'en est suivie une vague d'attaques, voire de haines, caractères homophobes, transphobes,
03:28 les gens confondant beaucoup, aussi au passage les différents sujets.
03:33 Comment vous vivez cela, sachant que la mairie de Paris, entre temps,
03:37 vous a apporté votre soutien et a même saisi la justice ?
03:41 - Absolument. Donc ça, j'en suis vraiment très fier,
03:44 parce que ce ne sont pas des opinions qui ont été faites envers moi,
03:47 ce sont des délits qui ont été faits.
03:49 Donc je suis très fier que la mairie de Paris soit vraiment derrière moi.
03:52 Mais moi, mine de rien, c'est des attaques.
03:54 S'ils pensent que c'est la première fois que je me fais traiter de tous ces noms,
03:57 ça fait 15 ans que je sais que je suis homosexuel, même plus,
04:01 ce n'est pas la première fois, je sais que ce ne sera pas la dernière fois.
04:04 On voit que les crimes LGBTQIA+phobes continuent d'augmenter d'année en année.
04:09 J'en ai fait les frais. Je me suis déjà fait péter la gueule plusieurs fois
04:12 parce que je suis homo. Je sais que ça continuera,
04:15 mais je sais que je me battrai pour continuer à être de plus en plus visible
04:18 et empêcher que ça arrive.
04:20 - Parce qu'il y a plein de gens derrière vous. - Évidemment.
04:22 - Des gens qui s'assument moins, voire qui ne s'assument pas,
04:24 qui ne peuvent pas s'assumer. - Bien sûr.
04:26 - Et pour eux, peut-être votre combat et les mots de vos opposants
04:30 ou de ceux qui vous attaquent ont une résonance autrement plus forte
04:34 que ça n'en a pour vous.
04:36 - Oui, bien évidemment. Moi, mon combat, c'est pour les personnes qui sont out,
04:39 mais aussi, effectivement, comme vous le dites,
04:41 pour les personnes qui ne peuvent pas être out parce que c'est encore dangereux
04:44 de faire son coming out en 2024 en France.
04:47 - Qu'est-ce que vous diriez, ce soir, et je vous donne la parole ensuite,
04:50 c'était prévu, Sandrine Rousseau.
04:52 Qu'est-ce que vous diriez à ceux qui vous critiquent,
04:55 voire qui vous attaquent, certaines personnalités politiques ?
04:58 Je pense, par exemple, à Marion Maréchal.
05:00 - Je ne leur dis rien du tout parce que ce n'est pas contre ces personnes
05:03 que je veux... Enfin, ce n'est pas ces personnes dont je veux adresser la parole
05:06 parce que je ne vais pas leur faire changer d'avis
05:08 et elles ne vont pas me faire changer d'avis.
05:10 Donc, moi, c'est à ma communauté que je veux m'adresser
05:12 pour nous rappeler qu'on est tous ensemble dans ce combat,
05:15 que la visibilité, on va l'emporter parce que je sais que c'est nous qui avons raison.
05:19 - Sandrine Rousseau, qu'est-ce que ça vous inspire ?
05:21 - Moi, je voudrais vous dire merci.
05:23 Merci pour ce que vous faites, merci pour visibiliser comme ça
05:26 les combats que vous menez, merci de percuter aussi une société
05:32 qui est très hétéronormée, très calibrée sur des réflexes
05:38 et sur des impensées.
05:41 Et vraiment, ce que vous faites, le travail que vous faites,
05:43 toutes les dragues, tout ce travail-là,
05:46 c'est un travail de transformation de la société en profondeur.
05:49 Et merci pour ça parce que vous êtes un signe de libération,
05:53 d'émancipation et je suis sûre que vous êtes un modèle
05:55 pour bien des gens et des jeunes.
05:57 Et vraiment, aux homophobes, aux LGBTQIA+phobes,
06:02 vraiment, passez votre chemin.
06:04 - Je veux juste vous voir là, pareil.
06:06 Merci beaucoup, je suis ultra honoré d'être sur ce plateau avec vous
06:08 quand je veux d'apprendre que vous serez sur le plateau.
06:10 Sandrine Rousseau, c'est un vrai bonheur.
06:12 - Vous assistez parfois, Sandrine Rousseau, en vrai, si je puis dire,
06:16 à la télévision, enfin devant votre télévision,
06:18 à des performances dragues.
06:20 Il y a un programme en particulier sur les services publics
06:22 qui marche très bien avec vous.
06:24 - Bien sûr, je suis la première fan.
06:26 - Qu'est-ce que vous aimez là-dedans ?
06:28 - Il y a déjà une performance artistique qu'il faut saluer
06:30 parce que c'est vraiment un travail artistique.
06:33 Et derrière, il y a cette espèce de perturbation par la joie
06:39 et par l'enthousiasme, par l'énergie d'une sclérose sociale
06:46 où on empêche les jeunes hommes d'être gays,
06:50 où on les stigmatise pour ça,
06:52 où on empêche les personnes d'être trans,
06:54 où on empêche les jeunes femmes d'être lesbiennes, etc.
06:56 Et en fait, tout ça fait exploser cette joie,
06:58 ce travail artistique, ça fait exploser toutes ces cases.
07:01 Et moi, vraiment, je trouve que vous faites un travail
07:03 de salubrité publique et de santé publique.
07:06 Donc merci beaucoup.
07:08 - On sent que ce que vous dites l'est aussi en réalité,
07:13 en raison de vos convictions,
07:15 et ça fait écho à votre combat féministe.
07:18 - Oui, absolument.
07:19 - Il y a des ressorts communs quand même.
07:21 - Absolument, complètement.
07:23 - Le harcèlement notamment, dont vous, personnellement,
07:26 êtes victime sur le terrain de vos soeurs.
07:28 - On pense souvent au féminisme comme les femmes contre les hommes,
07:30 mais ce n'est pas du tout ça.
07:31 C'est au contraire défaire les cases dans lesquelles on nous assigne,
07:36 les traits de caractère qu'on associe à ces cases,
07:39 les situations sociales dans lesquelles ça met,
07:41 et faire en sorte qu'on soit libre, qu'on soit libre d'être qui on veut.
07:44 Et en fait, c'est ça que dit le drag,
07:48 et que vous dites, c'est "soyez libre".
07:50 Eh bien, moi, j'ai envie vraiment que ce soir, on retienne ça.
07:52 Soyons libres.
07:53 - Exactement.
07:54 - On vous verra donc porter la flamme olympique.
07:55 Quel jour précisément ?
07:56 - Le 14 juillet à Paris.
07:57 Je ne sais pas encore ni le parcours, ni la date exacte.
07:59 - Vous n'avez pas encore l'idée précise de comment ça va se passer ?
08:03 - Alors si, je sais que je serai en uniforme,
08:05 des relayeurs et des relayistes de la flamme,
08:07 donc j'aurai une énorme perruque contre ce jogging blanc.
08:10 Magnifique.
08:12 Et ensuite, je la porterai fièrement.
08:15 Et ensuite, moi, je pense que le soir, on célébrera ça avec les amis,
08:19 avec toute la communauté, pour se rappeler qu'on est à nouveau tous ensemble dans ce combat.
08:23 - Vous ne savez pas précisément où dans Paris, vous porterez la flamme ?
08:26 Ça, ce n'est pas encore déterminé ?
08:28 - Je ne sais pas si c'est décidé, mais pour des questions de sécurité,
08:31 les choses sont dites au fur et à mesure.
08:33 - Vous serez perruqué, plateformé ?
08:35 - Bien évidemment.
08:36 - Mini-majesté sera en majesté ?
08:38 - Si mini-majesté ne peut pas être mini-majesté par la tenue,
08:40 je serai par la fierté de ma communauté en portant cette flamme.
08:44 - Je ne vous ai d'ailleurs pas demandé, mais c'est un choix que vous aviez,
08:47 un souhait que vous aviez émis, ou ça vous est tombé dessus,
08:50 comme pour Albert Corrieri, le Marseillais,
08:52 de bientôt 102 ans qu'on a eu la semaine dernière dans l'émission ?
08:55 - Ça m'est tombé dessus, je n'y ai absolument pas pensé.
08:58 C'est un matin, je me suis réveillé avec un DM de la maire de Paris,
09:01 Anne Hidalgo, qui m'a dit "Est-ce que ça vous intéresserait de porter la flamme ?
09:05 On veut qu'une drag queen porte la flamme à Paris."
09:07 Et ensuite j'ai fait toutes les paperas, parce qu'on reste français quand même,
09:10 donc beaucoup de paperas, et j'ai suivi le process.
09:13 Et depuis maintenant, je suis relayeuse de la flamme olympique
09:15 pour les JO 2024 à Paris.
09:17 - La classe.
09:18 Si vous aviez un message à adresser à nos téléspectateurs ce soir,
09:22 BFM TV, c'est un public téléspectateur, généraliste,
09:25 que diriez-vous ?
09:26 - Il est simple, c'est battons-nous, n'ayons pas peur.
09:30 Les phobies viennent souvent du manque de connaissances,
09:33 donc prenons le temps de nous découvrir tous ensemble
09:36 avant de nous juger, et laissons-nous libre et vivre comme on veut,
09:41 faisons la fête, tout en militant pour aller vers l'avant.
09:44 - Ça me semble absolument parfait comme message.
09:48 - Je ne m'attendais pas à ce que vous vous opposiez
09:50 à ce que vient de dire Mini Majesté.

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