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  • 10/11/2023
Yvon Manach proviseur du lycée de Fonsorbes (31) et Secrétaire académique du Syndicat National des Personnels de Direction de l'Éducation Nationale (SPDEN).

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Transcription
00:00 Ici, c'est le 6-9 France-Bloc Occitanie.
00:03 Nous sommes le vendredi 10 novembre, il est 8h moins le quart, c'est le quart d'heure.
00:06 Toulousain, vous nous appelez au 05-34-43-31.
00:09 31 Christine, recueille vos appels pour nous dire si le gouvernement en fait assez
00:13 pour lutter contre le harcèlement scolaire.
00:15 On lance le débat avec votre invitée, Jeanne-Marie Marcot.
00:18 Oui, un homme de terrain qui connaît bien ce fléau.
00:20 Bonjour Yvon Manac.
00:22 Oui, bonjour.
00:23 Vous êtes proviseur du lycée Clémence Royer à Fondsorbe dans l'Ouest toulousain
00:27 et secrétaire académique du syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale.
00:33 Je commence par la même question qu'aux auditeurs pour les inciter à nous appeler au 05-34-43-31.
00:39 Quand on sait qu'un élève sur cinq, collège-lycée confondu, est victime de harcèlement scolaire en France,
00:46 est-ce que vous considérez que les mesures prises, annoncées par le gouvernement, sont à la hauteur du problème ?
00:52 C'est difficile de répondre très précisément. Ce qu'on peut dire par contre, c'est qu'il y a une prise de conscience,
00:58 très clairement, de l'institution. Et que l'institution, ça fait maintenant déjà plusieurs années,
01:03 réagit par rapport à cette problématique. Ceci dit, ça reste quand même un sujet très difficile à gérer,
01:10 puisque c'est une notion qui est complexe et il est souvent très compliqué d'établir la matérialité des faits.
01:17 Mais il y a des référents maintenant dans les établissements.
01:21 On va en parler, mais dans votre lycée de Fonsor, vous constatez que le harcèlement grandit.
01:25 Est-ce qu'on vous signale de plus en plus de faits ? Est-ce que la parole se les bat ? Il y a plusieurs questions en une.
01:31 Alors, d'abord, moi j'arrive sur ce poste, mais je peux vous parler parce que ça fait maintenant 15 ans que je suis chef d'établissement.
01:36 Je dirais qu'effectivement, on parle plus et on travaille plus sur des situations qui ont été repérées de harcèlement
01:43 qu'il y a une dizaine d'années. Il y a une dizaine d'années, on l'évoquait très peu.
01:47 Alors, est-ce que c'est parce qu'on a mis des mots sur cette problématique que du coup on en parle plus ?
01:51 Maintenant, il est très difficile de répondre parce que statistiquement, en plus, je ne pense pas qu'on soit en mesure de le faire,
01:57 de comparer l'évolution. Ce qui est certain, c'est qu'effectivement, ces dernières années, on est confronté à ce type de problématique
02:05 qui est amplifiée notamment par la problématique du cyberharcèlement.
02:09 Les auditeurs de France Bleu réagissent également sur Facebook. Il y a Lulu qui nous raconte que sa fille de 16 ans a été harcelée
02:15 plusieurs fois au collège et au lycée. Elle a carrément été déscolarisée avant de reprendre ses études à 24 ans.
02:21 Quel protocole est mis en place quand un élève est en souffrance ? Très concrètement, comment ça se passe ?
02:27 Alors, lorsqu'un élève est repéré en souffrance, évidemment, il y a une écoute, il y a une cellule d'écoute.
02:34 Après, la difficulté, en fait, c'est le signalement. Dans un premier temps, il faut que les élèves parlent.
02:39 Et quand vous êtes enseignant, par exemple, dans une classe que vous avez 35 élèves, il y a des choses que vous pouvez voir,
02:45 il y a des choses que vous ne pouvez pas voir. Et parfois, ça ne se passe pas dans la classe.
02:48 C'est parfois dans la cour, voire même en dehors de l'établissement, mais avec des élèves qui se retrouvent après,
02:55 et notamment par le biais des réseaux sociaux.
02:58 Alors, est-ce que ce questionnaire est utile ? Selon vous, depuis hier et pendant plusieurs jours,
03:04 tous les élèves du CE2, me semble-t-il, à la terminale vont recevoir un questionnaire d'auto-évaluation.
03:10 Ils doivent dire si oui ou non ils sont harcelés, s'ils ont la boule au ventre quand ils partent le matin à l'école, au collège, au lycée.
03:16 Est-ce que vous pensez que ça peut libérer la parole ?
03:21 C'est très difficile de pouvoir le dire, parce qu'en fait, ce questionnaire, bon d'abord,
03:27 premièrement, il a été envoyé dans les établissements pendant les vacances,
03:30 et on nous a demandé, pour hier, d'organiser cette journée, de prévoir deux heures.
03:37 La plupart des chefs d'établissement, d'ailleurs, ont demandé plus de temps, parce que ça doit se préparer.
03:43 Il faudra voir avec un peu de recul ce que ça peut donner.
03:47 Après, ça reste un questionnaire qui est anonyme.
03:51 Mais si le harceleur est juste à côté de l'élève harcelé, c'est compliqué de le dénoncer ?
03:57 Alors, soit d'écrire, soit nous, par exemple, à Clémence Royer,
04:02 on a fait le choix, dans un premier temps, d'introduire un échange pour bien définir la notion de harcèlement avec les élèves.
04:10 Et ensuite, on a traduit cette grille d'auto-évaluation,
04:16 parce que c'est comme ça que c'est présenté par le militaire, sur le questionnaire.
04:19 On l'a mis sur l'ENT, et donc les élèves peuvent le remplir à la fois en classe, mais ils peuvent aussi le faire à la maison.
04:24 En ligne, c'est ça, l'ENT ?
04:25 Non, il sera en ligne.
04:27 Alors après, ça va être difficile, parce qu'il y a cette notion d'anonymat,
04:32 mais ça veut dire que nous, derrière aussi, quand on va récupérer ces données,
04:35 on ne saura pas qui a donné cette information.
04:39 Donc on pourra quand même faire une analyse sur la classe.
04:41 Et à mon avis, c'est ça le principal intérêt,
04:43 puisqu'on a programmé, nous, justement, une remontée des données,
04:47 qui reste anonyme, mais sur les classes,
04:49 qui nous permettra peut-être d'avoir quelques signaux sur certaines classes.
04:51 Yvon Manac, y a-t-il assez de psychologues, d'infirmiers, d'infirmières scolaires,
04:55 dans les lycées de Haute-Garonne, collèges de Haute-Garonne,
04:58 pour gérer ce genre de situation de harcèlement ?
05:00 Très clairement, non.
05:02 Il y a également un déficit de médecins scolaires qui est criant,
05:06 mais là, dans toutes les académies, et c'est un gros problème.
05:10 C'est un très gros problème.
05:11 Il y a la question des sanctions, Yvon Manac.
05:14 En mars 2022, le harcèlement scolaire est entré dans le code pénal,
05:18 mais les affaires, on le voit, sont souvent, très souvent, classées sans suite.
05:22 Est-ce que vous le regrettez ?
05:24 Je ne jette pas la pierre, parce que justement, ce que je vous disais tout à l'heure,
05:27 c'est très difficile d'établir la matérialité des faits.
05:30 Donc je pense que la justice, lorsqu'elle a la preuve,
05:34 et parfois c'est le cas, quand il y a du cyber-harcèlement,
05:36 il y a des traces, par le biais des téléphones.
05:40 Les familles aussi, parfois, viennent nous voir en disant
05:44 "Regardez ce qu'on a écrit à mon fils ou à ma fille,
05:47 et en plus il y a une notion de répétition".
05:49 Et vous faites quoi quand un parent vient vous voir dans votre bureau, Yvon Manac,
05:52 et vous montre "Voilà ce qu'il a reçu comme texto,
05:56 voilà ce qu'on lui a écrit sur Instagram, sur TikTok" ?
05:58 Moi, c'est très clair. Je dis "Vous allez faire un dépôt de plainte".
06:02 Ça, c'est clair et net.
06:03 Et le harcèleur, il devient quoi ?
06:05 Dans ces cas-là, le harcèleur, à partir du moment où il y a une démarche de la justice,
06:12 il est entendu.
06:13 Après, au niveau de l'établissement, je regarde si ça s'est passé.
06:16 Si j'ai des preuves qui montrent que ça s'est passé dans l'établissement.
06:19 Il peut y avoir une mise à pied, une exclusion ?
06:21 C'est très clair.
06:22 Ça a souvent été le cas.
06:25 Quand on a réussi à démontrer que ça se produit dans l'établissement,
06:29 dans ce cas-là, très clairement, on sanctionne.
06:32 Et là, on n'est pas dans la punition.
06:33 La sanction, c'est un acte administratif qui reste dans le dossier d'élève.
06:37 Le gouvernement réclame aussi que les téléphones portables soient confisqués.
06:41 Qui fait ça ? Ça s'est déjà vu ou pas ?
06:44 Ça parait un peu utopique.
06:46 Confisqué par qui ?
06:47 C'est ce que je vous demande.
06:49 Pour nous, c'est ingérable, ça, au sein de l'établissement.
06:53 Dans les collèges, le problème, entre guillemets, il est résolu,
06:55 puisque les élèves n'ont pas le droit d'avoir leur téléphone portable
06:57 quand ils sont dans l'établissement.
06:59 En lycée, ce n'est pas du tout le cas.
07:01 Donc, nous, on ne va pas aller récupérer les téléphones portables des élèves à chaque jour.
07:07 Donc, vous encouragez, en tout cas ce matin, Yvon Manac,
07:11 chaque élève à dénoncer le moindre cas de harcèlement, d'insultes ?
07:19 Alors, évidemment, j'invite les parents à nous alerter.
07:24 J'invite aussi les parents, parce que c'est un point très important aussi,
07:27 à bien cerner la notion de harcèlement.
07:30 Puisque, on a aussi, maintenant, ça revient très souvent,
07:33 sur des faits qui n'en relèvent pas.
07:36 Donc, évidemment, transmettre l'information, et ensuite, ne pas hésiter.
07:42 Mais, de toute façon, je crois que maintenant, c'est une obligation.
07:44 Il n'y aura plus de main courante lorsqu'un élève aura été harcelé.
07:50 Lorsque les parents iront, en fait, voir les services de police ou de gendarmerie,
07:54 il y aura automatiquement, maintenant, un dépôt de plainte.
07:56 Un dépôt de plainte. Et il y a un numéro unique en cas de harcèlement, c'est le 30 18.
07:59 Merci beaucoup, Yvon Manac, proviseur du lycée Clémence Royer à Fondsorbes,
08:03 d'avoir été l'invité du quart d'heure toulousain, ce matin.

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