Marseille : "Sans nous, il y aurait eu 3 morts", des plongeurs ont secouru les victimes de l'accident de bateaux

  • il y a 9 mois
Samedi, au moment où une vedette lancée à vive allure percutait le bateau bois le Diplodus, les plongeurs de la société marseillaise Archipel effectuaient une sortie en mer. Récit d’une opération de sauvetage qui a permis d’éviter le pire.

Samedi. 17h20. Comme tous les week-ends quand les conditions météo le permettent depuis qu’il a repris la société Archipel Plongée, il y a 8 ans, Sébastien Tinard est sorti dans les calanques pour en mettre plein les yeux à des touristes en extase devant la beauté des fonds marins.

Mais sur le retour à sa base de La Madrague de Montredon (8e), le conducteur de la navette avec 28 passagers à bord, dont ses quatre moniteurs, est soufflé en voyant un bateau "le doubler et accélérer très très fort". "Il a évité deux paddles de justesse mais est monté sur un bateau de plongée", se remémore-t-il.
L’embarcation en bois baptisée le Diplodus, qui transporte 14 plongeurs bénévoles pour une opération sur le thème de la biodiversité intitulée "Des espèces qui comptent", est éventrée sous la violence du choc. Une douzaine de passagers des deux bateaux sont éjectés à près de 900 mètres du Cap Croisette, certains sont très grièvement blessés. "J’étais stupéfait. J’ai immédiatement compris que ça allait être grave. J’ai appelé les secours et je suis retourné sur la zone", rembobine Sébastien.

"Elle aura de la chance si elle n’est pas amputée"

Sans se poser de questions, face à la scène de désolation, dans une eau qui rougit de sang, ses moniteurs et un pompier parmi ses clients plongent à la rescousse des naufragés. Sébastien sort les échelles et prépare le matériel d’urgence. "Nous avons remonté six personnes dans un état sérieux, dont plusieurs qui ne pouvaient plus nager". Et de détailler l’étendue des dégâts humains : "Il y avait un plongeur qui était inconscient et qu’on a dû hélitreuiller de notre bateau. Un autre avait les deux jambes cassées. Un autre le bassin. Une femme était en pneumothorax et avait du mal à respirer. Une personne avait été prise dans l’hélice. On lui a fait un garrot. Elle aura de la chance si elle n’est pas amputée, souffle-t-il, encore "sous le choc".

Sans se glorifier, le patron de la petite société l’assure : "Si nous n’étions pas intervenus, il y aurait eu au moins trois morts. Les premiers secours sont arrivés 15 minutes après et les victimes les plus touchées se seraient déjà noyées", explique-t-il. "Le travail de l’équipe d’Archipel a été incroyable. Ils leur ont sauvé la vie en prodiguant les premiers secours", confirme une des clientes dans un courrier qu’elle nous a fait parvenir.

"C’était comme une collision entre une Ferrari et un autobus"

"Nous avons tous une formation de sauveteur. Nous avons pu leur vider les poumons et les placer sous oxygène. Je bosse avec des gens compétents qui savent réagir en cas d’urgence. Je suis fier d’avoir ce genre de moniteurs avec moi", reprend Sébastien. "Les victimes étaient majoritairement des gens autour de la cinquantaine", rapporte-t-il. "Elles étaient déboussolées et voulaient savoir comment elles allaient pouvoir rentrer chez elle, téléphoner, reprendre leur vie quotidienne. La moitié de leurs affaires était déjà à l’eau".


Félicités par le maire de Marseille Benoît Payant et son adjoint à la Mer, Hervé Menchon, l’homme et son staff ont été entendus jusqu’à tard par la gendarmerie sur les circonstances du drame.

Les quatre blessés en urgence absolue seraient tous tirés d’affaire

Selon les premiers éléments de l’enquête conduite par la gendarmerie maritime, le skipper de la navette qui transportait des touristes étrangers naviguait trop vite et a perdu le contrôle. Il a été placé en garde à vue. "C’est la première fois que j’assiste à un tel drame. Mais en revanche, je constate régulièrement un manque de prudence des skippers. On a des bateaux rapides, l’impression de tout maîtriser parce que l’espace est grand, sauf qu’il y a une forte concentration de petits bateaux, de kayaks, de paddles et que la différence de vitesse avec les navettes est énorme... Là c’était comme une collision entre une Ferrari et un autobus !", alerte Sébastien.

"On a le même type de chauffard sur mer que sur terre", grince une source policière. Bonne nouvelle : les quatre blessés hospitalisés en urgence absolue sont tous tirés d’affaire. "Plus qu’entre deux bateaux, c’est la collusion entre deux mondes", a tranché Hervé Menchon, "d’un côté un groupe de plongeurs qui veillent au maintien de la vie marine, de l’autre le bruit, la fureur et usage récréatif, insouciant et dangereux pour la biodiversité".

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