Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 24/08/2023
Retrouvez 'Raconte moi une chanson' avec Guy Carlier tous les jours à 7h50 cet été !
---
Abonnez-vous pour plus de contenus : http://ow.ly/7FZy50G1rry
---
———————————————————————

▶️ Suivez le direct : https://www.dailymotion.com/video/x75...
Retrouvez nos podcasts et articles : https://www.sudradio.fr/

———————————————————————

Nous suivre sur les réseaux sociaux

▪️ Facebook : https://www.facebook.com/SudRadioOffi...
▪️ Instagram : https://www.instagram.com/sudradiooff...
▪️ Twitter : https://twitter.com/SudRadio
▪️ TikTok : https://www.tiktok.com/@sudradio?lang=fr

##GUY_CARLIER-2023-08-24##

Catégorie

🎵
Musique
Transcription
00:00 Raconte-moi une chanson, dit Arlier.
00:03 Bonjour Guillaume.
00:04 Bonjour Guy.
00:05 Bonjour Marilyn, bonjour Benjamin, bonjour à tous.
00:08 C'est vrai, j'ai un ami chanteur qui a connu un petit succès dans les années 80,
00:13 qui fit même une brève apparition à la 27ème place du top 50.
00:17 On lui promettait l'autoroute du succès, mais malheureusement sa carrière n'a connu
00:21 que des chemins cabossés et des nids de poules.
00:24 Aujourd'hui, il ne chante pas dans les zéniths, mais dans les maisons de retraite.
00:28 Ce jour-là, il a passé ses cheveux au cirage noir, il a accroché son smoking de scène,
00:35 il y met sur un cintre à l'arrière de sa vieille Mercedes 190, bleu nuit, aux fauteuils
00:40 fatigués, et lui aussi est fatigué en roulant vers la maison de retraite, les mieux autistes,
00:44 à la Garenne-Colombe.
00:46 Au même moment, Marguerite se prépare dans sa chambre, qui sent le linge propre, le
00:51 chat qui dort et les cheveux gris.
00:52 Sur le mur, à l'endroit réservé pour la touche personnelle, elle a accroché un
00:56 cadre ovale en ronces de noyer, avec à l'intérieur la photo sépia d'un homme moustachu et à
01:01 l'air sévère.
01:02 Il s'agit d'Alphonse, l'époux défunt de Marguerite.
01:05 Défunt, mais pas mort dans l'esprit de Marguerite, puisqu'elle lui parle sans arrêt,
01:10 un léger murmure qui fait trembler ses lèvres en permanence.
01:12 Et les rares dimanches, d'ailleurs, où sa famille vient la voir, avec ses baillements
01:17 étouffés, ses regards furtifs et incessants vers leur montre, ça fait beaucoup rigoler
01:21 ses petits-neveux, ses lèvres qui remuent sans arrêt.
01:23 Marguerite se prépare.
01:26 Elle porte ce chemisier blanc à boutons de nacre qu'Alphonse a été le seul à défaire.
01:31 Elle s'est parfumée, soirée de Paris, de bourgeois, avec un gis comme joie, disait
01:35 la réclame.
01:36 Après avoir poudré ses joues pour en cacher les taches sombres, elle a mis ce collier
01:41 de perles synthétiques que le personnel des assurances de la Séquenèse lui a offert
01:45 lors de son départ en retraite.
01:47 Puis, à petits pas précautionneux, elle est descendue au réfectoire, qui était déguisé
01:51 pour l'occasion en salle de spectacle.
01:53 Depuis plusieurs jours, les pensionnaires des Miosotis avaient confectionné des guirlandes
01:57 en papier crêpon.
01:58 Tout au bout du réfectoire, un micro et de gros haut-parleurs vaguement inquiétants
02:03 attendent le chanteur, qui arrive enfin, tous sourire, le micro à la main qu'il fait
02:08 tournoyer et qu'il rattrape avec adresse, après avoir interprété quelques-unes de
02:13 ses propres compositions, qui ne recueillent que des applaudissements polis, laissant craindre
02:17 au chanteur que la pile de CD en vente à l'entrée du réfectoire ne diminuera guère
02:22 à la fin du spectacle, ce dernier se met à interpréter des succès des années cinquante.
02:28 Alors, peu à peu, vient l'enthousiasme dans le réfectoire, où le mont Basillac est mis
02:33 du rouge au joue, déjà pâli par la mort qui rôde et de la chaleur dans les corps
02:37 fatigués.
02:38 On commence à voir, ça et là, de grosses larmes couler au chaland qui passe, à l'âme
02:43 des poètes, à deux minots ou à un gamin de Paris.
02:46 Marguerite attend, vaguement inquiète.
02:49 La dernière fois, pourtant, il avait bien chanté sa chanson.
02:53 Ah, ça y est ! La voilà, c'est leur chanson.
02:56 Elle l'a reconnue dès l'introduction.
02:58 Et voici que ses lèvres se mettent à trembler.
03:00 Elle parle à l'unique amour de sa vie.
03:02 Tu te souviens, Alphonse, le bal de la Saint-Jean, les marronniers, la place de Salernes, quand
03:06 on a dansé ensemble pour la première fois.
03:09 Pour Marguerite, ce fut la nuit des premières fois, la première danse, le premier homme,
03:13 le premier amour, le seul.
03:15 Dans le réfectoire de la maison de retraite, les mieuxotistes à la gare N'Colombes, dans
03:19 les hautes scènes, une vieille femme a fermé les yeux et murmure « Comment ne pas perdre
03:23 la tête pour tes rires audacieux ? »
03:25 Elle a vingt ans.
03:27 Elle danse dans les bras du moustachu du cadre val, on se denoyait, son premier, son seul
03:32 amant, comme il y a tant d'années, sur la place aux marronniers de Salernes, la nuit
03:37 de la Saint-Jean.

Recommandations