Prix de l'électricité : «Il va falloir se mettre en colère», estime Frédéric Roy

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Transcription
00:00 7h4039, oui déjà Lionel Goujelot votre invité ce matin, Frédéric Roy,
00:05 boulanger à Nice et fondateur du collectif pour la survie des boulangers et de l'artisanat.
00:09 - Bonjour Frédéric Roy. - Bonjour.
00:11 - Merci d'être en ligne avec nous ce matin sur Europe 1.
00:14 Nous souhaitions faire avec vous un état des lieux Frédéric Roy de la situation des artisans boulangers
00:19 et c'est une information parue chez nos confrères de La Voix du Nord la semaine dernière qui a retenu mon attention
00:24 parce que La Voix du Nord révélait que 10% des boulangeries artisanales dans la grande région Nord
00:30 ont mis la clé sous la porte depuis un an.
00:32 Alors à cause de la flambée des prix de l'énergie, des matières premières,
00:35 on va revenir dans le détail sur cette question,
00:37 mais est-ce que c'est une situation que vous constatez vous également
00:41 d'après les retours que vous pouvez avoir au niveau national ?
00:44 - Bien sûr et quand on parle de 10% de fermeture dans le Nord,
00:48 je n'ose imaginer le nombre d'artisans et au-delà de la boulangerie, de la restauration,
00:52 des pressings de tous les métiers qui sont en grande difficulté.
00:56 Parce que ça on n'en parle pas trop, là c'est du concret, c'est du factuel.
00:59 On parle de 10% de fermeture, mais un grand nombre de petites entreprises sont en grande difficulté,
01:05 mais ça on n'en parle que très peu actuellement et pourtant c'est le cas.
01:08 Moi j'y vois, j'ai beaucoup de collègues qui m'appellent et qui m'envoient des messages.
01:12 Il n'y a pas très longtemps, il y a encore 72 heures,
01:15 un de mes confrères qui est du côté de Chalons en Champagne
01:17 vient de recevoir une facture de 15 000 euros chez Total Energy à payer en frais de résiliation.
01:23 Enfin je n'ai pas tout analysé, mais bon,
01:25 c'est des factures qui ne devraient même pas exister à l'heure actuelle.
01:30 Je veux dire, on est rendu dans un système de folie qui nous affaiblit tous.
01:36 Moi le premier, cet été je devais créer deux emplois, je n'ai pas pu en créer.
01:39 Résultat, mais c'est ça l'ironie de l'histoire, on a des entreprises qui marchent très bien,
01:43 mais on a du mal à assumer. Moi j'ai pas assez de personnel, mais j'ai dû faire un choix.
01:47 Puisque pendant trois mois, je ne recevais plus mes factures EDF
01:50 puisqu'ils n'étaient pas en mesure à l'époque au départ
01:53 d'appliquer le fameux amortisseur du gouvernement.
01:55 Donc le gouvernement a dit, n'envoyez les factures que quand
01:58 vous serez en mesure de déduire l'amortisseur. C'est fait.
02:01 - Et vous n'avez pas bénéficié du bouclier tarifaire alors ?
02:04 - Ah non, non, non. Le bouclier tarifaire n'est fait que pour les compteurs
02:08 de moins de 36 kVA, kilovolt ampères.
02:13 Pour les gros consommateurs qui concernent 80% des boulangers,
02:17 nous sommes au-dessus, donc on n'a pas de bouclier tarifaire.
02:20 Et voilà, donc on paye plein pot, on nous a mis un amortisseur en place,
02:24 mais bon, ma première facture, au lieu d'être de 800 euros au mois de juillet,
02:29 elle était d'un peu plus de 2000. Mais bon, si j'y rajoute les trois factures précédentes,
02:34 j'étais à 15 000, donc EDF m'a mis sur la table une facture de 15 000 euros.
02:38 Je ne peux pas payer. Ils m'ont dit "vous auriez dû provisionner, Monsieur Roy".
02:43 Oui, je peux provisionner sur mes tarifs réels, pas sur les tarifs virtuels
02:47 qu'ils nous ont inventés au courant de l'année.
02:49 - Et aucune possibilité de renégocier ?
02:52 - Ah non. Quand vous avez un contrat, vous avez un contrat.
02:55 Vous ne pouvez pas négocier votre salaire avec votre employeur tous les matins.
03:00 Vous pouvez discuter, mais il a le droit de vous dire non.
03:01 C'est ce qui se passe. Nous, on a des contrats signés. On ne peut pas aller au-delà.
03:05 Et moi, j'ai aussi un principe, c'est d'être chez EDF.
03:08 EDF est le seul producteur d'électricité. C'est le seul producteur d'électricité.
03:14 Donc il faut faire travailler EDF. Ce qu'il faut, c'est sortir du marché européen de l'énergie.
03:19 On a créé la loi NOM et la REN il y a quelques années en arrière,
03:24 soit disant pour pouvoir réguler les tarifs en cas de hausse du prix de l'électricité.
03:28 Mauvais choix de nos gouvernants, parce qu'on voit le résultat aujourd'hui, les entreprises ferment.
03:33 - Parce qu'on achète l'électricité trois fois plus cher qu'on ne la vend en fait.
03:38 - Eh bien oui, mais c'est ça le problème.
03:40 Pourtant, on produit l'électricité dans une usine nucléaire, 1.1,
03:45 pour la livrer directement dans ma boulangerie.
03:47 Mais on a créé un système qui part. On a créé 133 marchands d'électricité.
03:53 Les mecs vous vendent de l'électricité qu'ils ne produisent pas.
03:56 Ce sont des faux vendeurs, ce ne sont que des rédacteurs de factures
03:59 qui ne créent pas d'emplois, puis qui ne produisent rien,
04:02 et qui font fructifier l'électricité sur les marchés financiers.
04:06 Voilà où on en est aujourd'hui, et c'est le drame de l'histoire.
04:09 - Pour en revenir à l'état d'esprit des boulangers, et peut-être plus généralement des artisans,
04:14 qu'est-ce que vous ressentez ?
04:16 Vous sentez vraiment une colère qui est en train de monter, voire même de s'amplifier,
04:20 compte tenu justement, finalement, de cette situation un peu de blocage
04:23 que l'on observe depuis plusieurs mois ?
04:25 - On est pu à se poser la question, nous au sein de notre collectif,
04:29 puisqu'avec mes trois cofondateurs, on est déjà en train d'organiser une action,
04:33 on est en train de rentrer en discussion aussi avec les autres corps de métier,
04:37 mais on va remonter à Paris, mais on va monter moins gentiment.
04:39 On a manifesté l'année dernière, le 23 janvier,
04:43 on était entre 3 et 5 000 artisans boulangers et d'autres métiers devant Bercy.
04:48 Je crois qu'on n'a pas été écoutés, on a été gentils,
04:50 vous voyez, on n'a même pas renversé un conteneur.
04:52 Mais je pense qu'il va falloir se mettre en colère, parce que c'est moi,
04:55 c'est 35 ans de travail, mon entreprise, c'est toute ma vie,
04:59 c'est mon capital, je n'ai rien d'autre,
05:00 j'ai passé ma vie dans mon entreprise, je ne vais pas prendre le risque,
05:03 à cause de mauvais choix politiques, de perdre mon entreprise.
05:06 Et tous les artisans ont cette façon de penser.
05:09 Donc si le gouvernement n'ose pas aller taper du poing sur la table au niveau européen,
05:16 mais je dirais plus précisément au niveau allemand,
05:18 qui nous met le couteau sur la gorge pour ne pas qu'on sorte du marché de la reine,
05:23 parce qu'eux produisent une électricité vraiment trop chère et ne serait plus concurrentielle,
05:27 si le gouvernement ne veut pas nous entendre,
05:30 on va aller se faire entendre et ça va être plus rapide qu'on ne l'imagine,
05:33 puisqu'on est déjà en train de travailler dessus.
05:35 - Vous-même personnellement, Frédéric Roy, vous dites que votre commerce est en péril ?
05:40 C'est-à-dire que vous pourriez mettre la clé sous la porte comme d'autres ?
05:43 - On est fragiles, mais bien sûr, je ne suis pas un surhomme.
05:46 Quand le montant de vos factures dépasse vos rentrées d'argent,
05:49 il arrive un moment, vous êtes obligés de fermer, vous n'avez pas le choix.
05:52 Donc aujourd'hui, on prend sur nous,
05:54 mais ce n'est quand même pas normal que je travaille 16 heures par jour aujourd'hui.
05:58 Et mes employés font plus d'heures, bon, on les paye bien évidemment,
06:02 mais ce n'est pas logique, nous cet été, c'est deux emplois qu'on n'a pas créés
06:06 et qu'on reporte sur notre travail à nous directement, ce n'est juste plus possible.
06:10 Je ne pourrais pas tenir comme ça physiquement pendant des années.
06:13 Donc il nous faut une solution pérenne,
06:15 cette solution pérenne, c'est la sortie de la reine,
06:18 comme l'a fait le Portugal, comme l'a fait l'Espagne.
06:21 L'État dit non, ce n'est pas possible,
06:23 parce que ça rend compliqué le système pour vendre et acheter de l'électricité.
06:27 C'est un mensonge.
06:28 Avant le système de la reine, on vendait de l'électricité
06:31 et on en achetait quand on en avait besoin,
06:33 ça ne posait aucun problème à personne.
06:35 Donc il faut vraiment taper du poing sur la table.
06:38 Nous sommes producteurs d'énergie à environ 60 euros le mégawatt-heure.
06:42 Ce n'est pas logique qu'on nous le vende 180,
06:45 voire plus chez certains fournisseurs au jour d'aujourd'hui.
06:48 Ou à quoi ça sert que nos parents, nos grands-parents
06:51 aient payé la construction de ces usines nucléaires
06:54 pour avoir une industrie qui soit fleurissante,
06:56 ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
06:58 À quoi tout ça a servi ?
07:00 À rien, au nom du marché européen.
07:02 Donc non, nous sommes dans un marché de folie,
07:04 qui est un marché virtuel, il faut qu'on en sorte,
07:07 on n'a pas d'autre solution.
07:08 – Merci Frédéric Roy, on a bien entendu votre appel
07:12 et la possibilité que vous envisagiez,
07:15 une nouvelle manifestation à la rentrée pour interpeller le gouvernement
07:20 encore une fois sur les problèmes qui se posent aux boulangers
07:24 en termes de prix d'électricité et d'énergie,
07:28 et plus généralement à l'ensemble des artisans.
07:30 Merci, bonne journée, merci d'avoir été en ligne ce matin sur l'Union Européenne.

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