Émeutes : «La réponse du gouvernement n'est pas à la hauteur de ce que l'on a vécu», estime Zartoshte Bakhtiari
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NewsTranscript
00:00 7h41, votre invité Lionel Zartos Baktiari, maire de Neuilly-sur-Marne.
00:05 - Bonjour Zartos Baktiari.
00:07 - Bonjour, merci de votre invitation.
00:09 - Merci à vous d'être en ligne avec nous ce matin sur Europe 1,
00:12 maire de Neuilly-sur-Marne, donc en Seine-Saint-Denis.
00:15 Votre commune, Zartos Baktiari,
00:18 fait partie de celles qui ont été les plus touchées par les émeutes du mois dernier.
00:22 En tout, il y a eu trois nids de volances, si je me souviens bien,
00:25 et des dégâts que vous avez chiffrés à 2 millions d'euros.
00:28 Une loi a été adoptée en urgence à la fin du mois de juillet
00:32 pour accélérer la reconstruction des bâtiments publics ravagés par les incendies.
00:36 Elle facilite dans les grandes lignes les procédures en matière d'assurance et d'urbanisme pour reconstruire.
00:41 Est-ce que vous en voyez les premiers effets, Zartos Baktiari ?
00:45 - Non, pas vraiment. Permettez-moi d'abord de revenir en deux mots sur ce qui s'est passé un mois après.
00:50 Je ne comprends toujours pas ce qui s'est passé dans ma ville d'ordinaire paisible.
00:54 Ce matin, en arrivant à la mairie, je vois les murs noirs de la mairie annexe partie en fumée.
00:59 Quand on a aussi chez nous les sept voitures neuves de la police municipale qui ont été brûlées,
01:03 ça veut dire que pendant plusieurs mois, la police dans la ville est à pied.
01:07 Quand on reçoit un appel de détresse, on n'est pas en capacité d'aller secourir les personnes.
01:13 Dans une ville où on a plus de 40% de logements sociaux, on nous a brûlé les locaux du service logement
01:18 avec 2300 dossiers et papiers dedans.
01:20 Ça veut dire 2300 familles qui sont en difficulté, qui attendaient un logement décent,
01:24 qui devront attendre des mois encore, ou encore la médiathèque qui a été incendiée.
01:28 En plein cœur de quartier, c'était la bouée d'oxygène pour toutes les familles d'habitants
01:32 qui voulaient simplement s'évader un peu dans la culture et s'évader en empruntant des livres.
01:38 - Mais donc, vos effets se sont toujours ressentis ?
01:40 - Absolument, absolument. C'est ça le vrai bilan d'une poignée d'individus, de 40-50 personnes,
01:46 qui, pardonnez-moi de vous le dire de cette manière-là, mais qui ont pourri la vie de l'écrasante majorité.
01:51 Et vous l'avez dit, c'est 2 millions d'euros de dégâts.
01:53 2 millions de dégâts en 3 nuits, c'est 20% de tous nos investissements annuels.
01:59 C'est l'équivalent du coût de construction de 3 ou 4 classes d'école qui sont parties en fumée.
02:04 Donc effectivement, ça se fait ressentir sur le quotidien des habitants.
02:09 Et vous me posiez la question de savoir si la réponse du gouvernement s'y était à la hauteur,
02:13 et en tout cas si on envoyait les effets, sans vouloir faire de politique.
02:18 Et juste en regardant ce qui a été réellement fait, pour moi la réponse du gouvernement n'est pas à la hauteur
02:22 de la gravité de ce qu'on a vécu.
02:25 Pourquoi ? Parce qu'en réalité, la seule chose qui a été annoncée,
02:29 ce sont quelques délais raccourcis dans les procédures d'appel d'offres.
02:32 Mais vous savez, quand vous avez votre maison qui est en train de brûler,
02:35 est-ce que vous vous dépêchez d'aller d'abord chercher les briques pour la reconstruire,
02:39 ou est-ce que vous vous dépêchez d'aller éteindre le feu ?
02:42 Pour moi, le gouvernement n'éteint pas le feu, parce que le vrai sujet,
02:46 il n'y a rien d'annoncé sur le problème de fond, rien sur ces poignées de jeunes
02:50 qui ont vraiment causé le chaos pendant des nuits entières et partout en France,
02:54 rien sur la fermeté attendue, rien sur le rétablissement de l'autorité,
02:58 l'autorité du maître d'école dans nos écoles, l'autorité de l'uniforme, l'autorité du drapeau.
03:04 Pour moi c'était ça l'essentiel, et le gouvernement passe totalement à côté.
03:07 - Justement, quand même, Emmanuel Macron évoque dans sa grande interview au Figaro Magazine ce week-end
03:13 à une question de décivilisation, un problème d'intégration.
03:17 Malgré ça, il ne vous semble pas avoir pris conscience, mesure de ce phénomène,
03:22 presque de séparatisme finalement d'une certaine partie des populations dans vos communes ?
03:28 - Non, je pense que très sincèrement, le gouvernement a voulu enjamber une séquence médiatique,
03:33 et pendant que l'actualité passe à autre chose, nous les stigmates de tout ce chaos,
03:38 on le voit encore au quotidien.
03:40 S'il y a quelque chose à faire, il faut d'abord reconstruire l'éducation,
03:44 en apprenant à affirmer nos valeurs, qu'on puisse réinvestir dans nos écoles,
03:48 et surtout je pense qu'il y a une vraie difficulté de justice,
03:53 et en tout cas à réadapter par rapport à la délinquance qui est de plus en plus jeune.
03:57 Vous savez, à New-York-Sur-Marne, j'ai eu un jeune de 13 ans qui, à 4h30 du matin,
04:02 s'est retrouvé à jeter des cocktails Molotov sur le commissariat de Neuilly-sur-Marne.
04:05 Il est passé en garde à vue, il est passé par la case justice,
04:09 et il a été libéré immédiatement sous les applaudissements du public.
04:13 - Il a 13 ans ? - Il a 13 ans.
04:15 Il a 13 ans parce qu'aujourd'hui en France, quand on est un jeune de moins de 13 ans,
04:18 on ne risque strictement rien parce qu'on est considéré comme étant totalement irresponsable,
04:22 même quand on a incendié une école, la mairie, ou comme chez nous, le commissariat.
04:27 Moi je ne demande pas de la prison à 12 ans systématiquement,
04:30 mais qu'on puisse rapidement prendre en charge ces très jeunes,
04:33 et de plus en plus jeunes, dans des centres fermés,
04:35 et redresser une situation qui est inacceptable.
04:37 Vous savez, la sanction ne doit pas être taboue.
04:39 Et aujourd'hui, j'ai l'impression que pour le président de la République, elle l'est.
04:42 - On parlait des bâtiments publics qui ont été gravement endommagés dans votre commune.
04:49 Il y a aussi des commerces, des entreprises privées qui ont été touchées, vandalisées.
04:53 Est-ce qu'ils ont pu reprendre une activité normale,
04:56 ou est-ce que là encore, il y a les stigmates de ces nuits de violence il y a un mois et demi ?
04:59 - Ah non, non, bien sûr. On a des commerces en plein cœur de quartier
05:02 qui ont été vandalisés, qui ont été pillés, qui ont été brûlés.
05:05 Et évidemment, ça n'a pas pu être reconstruit en à peine un mois.
05:09 Vous savez, même nous on le voit.
05:11 Les dossiers d'assurance sont extrêmement loin montés.
05:13 On n'a parfois pas le retour des expertises.
05:16 Les dossiers de subvention, nous en réalité,
05:19 on a le bénéfice de subvention de la région et de la métropole.
05:22 Mais rien du côté de l'État, c'est quand même grave de devoir le dire.
05:25 Rien du côté de l'État. Donc on doit se débrouiller nous-mêmes.
05:27 Je disais tout à l'heure, 2 millions d'euros pour la ville,
05:30 c'est 20% de tout notre budget annuel.
05:32 Et pour un commerce qui a brûlé, ce sont des pertes d'exploitation extrêmement importantes.
05:36 Et c'est tout un service qui ne rend pas la population.
05:38 Quand vous avez des boulangeries qui ont brûlé en plein cœur de quartier,
05:41 c'est du pain que vous ne pouvez pas livrer à une dame âgée
05:45 qui vient faire ses courses tôt le matin
05:47 et qui doit faire des kilomètres pour parfois aller chercher un bout de pain.
05:51 Donc le gouvernement, pour moi, ne prend pas la mesure de la situation.
05:55 Je pense qu'il faut envoyer un message simple.
05:58 Il faut que la sanction ne soit pas taboue.
06:01 Et on ne peut pas demander en permanence aux Français qui n'ont rien demandé à personne,
06:05 qui subit sans broncher, que ce soit à lui de payer encore une fois tous ces dégâts.
06:10 Il a payé une première fois les services publics ou les commerces avec ses impôts,
06:14 en se levant tôt le matin, en allant travailler,
06:16 pour gagner parfois juste de quoi payer l'essence et la voiture
06:19 qu'il a retrouvée brûlée par les émeutes.
06:22 Une deuxième fois avec la fermeture des services publics pendant des mois pour les remettre en état.
06:27 Et on va lui demander une troisième fois de passer à la caisse
06:30 pour repayer la construction avec ses impôts.
06:32 Je pense qu'il y a un ras-le-bol qui est profond dans notre pays.
06:36 Il faut l'écouter.
06:38 Donc je pense qu'il faut aider évidemment les commerçants
06:41 et envoyer un message clair avec une sanction importante envers les casseurs.
06:45 – Ce sentiment, Zartouch-Bakhtiari, il est partagé par tous les élus,
06:49 que ce soit les tendances politiques dans votre secteur
06:53 et notamment dans la grande région parisienne où effectivement les dégâts ont été importants.
06:57 – Oui, absolument.
06:58 Vous savez, quand on a été reçu par le président de la République
07:02 il y a un mois à l'Élysée, moi je suis resté pendant 3h30.
07:06 Et le président de la République n'a strictement rien dit.
07:08 Quand je voyais autour de moi des maires qui étaient de région parisienne
07:11 mais aussi d'ailleurs, qui ont fait parfois 5-6 heures de voyage
07:13 pour venir écouter le président de la République et qui sont partis déçus,
07:17 ont partagé le même sentiment.
07:19 Et moi j'ai gardé contact avec des maires d'ailleurs aussi qui me disaient
07:23 "On n'a rien, en fait on est démunis, on doit s'organiser nous-mêmes, seuls".
07:27 Vous savez, chacun ses responsabilités.
07:29 Nous dans nos villes on est très combatif, on essaye d'avancer au mieux,
07:33 on a lancé la reconstruction, on a essayé de faire vraiment au mieux
07:37 pour que la population puisse retrouver un minimum de service public malgré les dégâts.
07:41 Mais chacun a responsabilité, la justice, le cadre légal,
07:45 le message judiciaire, l'autorité, tout ça c'est de la compétence de l'État.
07:49 Je ne peux pas inventer dans ma propre ville des règles spécifiques pour la justice des mineurs.
07:54 Mais simplement pour dire une chose, et pour conclure,
08:00 il faut vraiment être sur la logique du casseur-payeur.
08:03 Ça veut dire quoi ? Remettre dans le droit chemin, dans des centres fermés,
08:07 où on réapprend les fondamentaux à ces très jeunes qui ont perdu tout sens de la société.
08:12 La deuxième chose c'est participer à la reconstruction,
08:15 parce que moi j'ai des tiges, j'ai des travaux d'intérêt général reçus
08:18 trois ou quatre ans après les faits commis.
08:20 Donc il faut vraiment que ce soit beaucoup plus rapide.
08:23 Et une dernière chose, la responsabilisation des parents,
08:26 avec parfois des parents démissionnaires qu'il faut vraiment mettre à contribution,
08:30 parce que c'est indispensable dans notre société.
08:33 Merci, merci Zortho Tchabak Thierry.
08:35 Je rappelle que vous êtes le maire de Neuilly-sur-Marne en Seine-Saint-Denis.
08:38 Merci d'avoir été en direct ce matin sur Europe 1. Bonne journée.