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00:00 Brigitte Laé, Sud Radio, c'est l'instant sexy news.
00:04 - Eh bien c'est le moment de retrouver Philippe Hoffman, Guillaume de Brébisson.
00:08 Alors vous nous parlez aujourd'hui des ados et des familles recomposées.
00:12 Voilà encore quelque chose qui est difficile j'imagine pour les ados.
00:15 - Oui, bonjour Brigitte, bonjour Guillaume.
00:20 Oui, aujourd'hui je vais parler d'une situation qui touche à peu près 10% des familles.
00:28 C'est pas énorme, mais ça fait quand même beaucoup de monde.
00:31 C'est les familles recomposées et puis la réaction des enfants et des ados surtout à l'intérieur de ces familles.
00:37 Ça se passe moyennement bien, ça dépend des familles évidemment,
00:42 mais en général il y a beaucoup de tensions, il y a beaucoup de conflits.
00:45 Et puis les ados sont encore plus virulents que les tout-petits,
00:49 donc ils y vont un peu fort, il y a des insultes, parfois ça va jusqu'à la bagarre.
00:56 Et on entend souvent les phrases du style "Lâche-moi, t'as pas d'ordre à me donner, t'es pas ma mère, t'es pas mon père, je te déteste"
01:05 et parfois bien pire.
01:07 Donc c'est un rejet qui est assez classique, mais qui existe depuis très longtemps.
01:12 En fait, dans les histoires de famille, on a toujours une idéalisation de la famille,
01:17 où la famille devrait être parfaite, unie, solide, solidaire, etc.
01:23 Et bon, ça c'est une image d'épinal.
01:25 Et en fait, dans la famille recomposée, c'est toujours le personnage maudit qui arrive au sein de cette famille
01:34 qui viendrait remplacer cette figure idéale.
01:37 Et on a toujours la représentation de la marâtre ou de l'abuseur violent
01:45 qui reste ancré dans notre imaginaire collectif, et on a du mal à en décoller.
01:49 Pourtant, aujourd'hui, la plupart des couples qui veulent recomposer une famille,
01:53 ils le font avec des trésors de patience, d'efforts pour apprivoiser les enfants,
02:00 malgré un malaise et parfois des provocations.
02:04 - Mais est-ce que, Philippe Hoffmann, justement, quand la famille se recompose,
02:09 si je puis dire, avec l'ado, et que l'enfant est ado, est-ce que c'est plus difficile ?
02:15 Quel est l'âge difficile ?
02:18 - Alors, l'âge le plus compliqué, en fait, c'est le début de l'adolescence.
02:24 Comme je le dis souvent dans mes chroniques, le début de l'adolescence,
02:28 c'est parce que c'est une sorte de révolution totale, à la fois biologique, sexuelle, psychologique, cognitive,
02:37 enfin bon, ça part dans tous les sens.
02:39 Et donc, les ados, ils ont vraiment un fort sentiment de perte.
02:44 Et quand ils sont dans cette situation, ça vient en rajouter, si vous voulez,
02:50 l'histoire de la séparation conjugale et de la recomposition familiale.
02:54 Donc forcément, celui qui arrive ou celle qui arrive, c'est l'ennemi à abattre.
02:59 Et en plus de ça, souvent, il y a une ex ou un ex qui s'est senti bafoué, lésé, rejeté,
03:08 qui en rajoute avec des mots du genre "ouais, cette pouffe qui a rapté ton père"
03:14 ou "ce pervers manipulateur qui a séduit ta mère", etc.
03:18 Donc, on connaît tout ça, puis vous en parlez souvent dans vos émissions.
03:22 Évidemment, ce n'est pas pour arranger les choses.
03:25 Mais ce qui se passe aussi, et ce qui est particulier, c'est qu'il y a un trouble supplémentaire
03:31 qui est lié vraiment à la sexualité pour les jeunes qui arrivent dans ces eaux-là vers 13-14 ans.
03:41 Parce que les ados, ils ne peuvent pas vraiment rejouer une histoire oedipienne classique
03:47 en rejetant papa ou maman, ou en étant tout à la fois proches et distants.
03:53 Et par exemple, si la mère se remarie, ils vont avoir le sentiment de la perdre totalement
04:00 parce qu'elle va retrouver un statut de femme et des désirs sexuels.
04:03 Et eux, ils voudraient qu'elle soit une mère asexuée.
04:07 Et qu'elle soit là pour eux, à leur service, et certainement pas avec des désirs de femme avec un homme.
04:15 Donc, ce n'est pas si simple.
04:18 Le beau-père va rassurer l'enfant en lui disant "je ne vole pas ta mère".
04:21 Mais enfin, il va devoir se faire très discret dans ses désirs sexuels.
04:26 Et en plus, avec les adolescentes, c'est encore pire parce qu'il devrait être prudent dans ses paroles
04:33 et surtout dans ses gestes, parce qu'il y aura aussi dans tout ça des fantasmes de séduction
04:39 de la jeune fille mêlée à la rivalité.
04:42 Donc, ce n'est pas simple de faire une famille nombreuse et heureuse.
04:48 Bon, beau-père et bé-mère doivent rester discrets, laisser le conjoint.
04:53 Mais justement, est-ce qu'il ne faut pas plutôt attendre un tout petit peu,
04:57 avant de présenter le beau-père ou la belle-mère ?
05:01 Ah oui, il ne faut pas précipiter.
05:02 Quand l'enfant a 12, 13, 14 ans, est-ce que ce n'est pas mieux de laisser passer un an ou deux ?
05:07 De toute façon, il faut toujours du temps pour savoir si c'est le bon partenaire.
05:12 C'est sûr.
05:13 Au-delà de ça, est-ce que les adultes n'ont pas pour eux la chance d'avoir le temps long ?
05:21 Finalement, ce que vous décrivez, quel tableau, vers 12, 13 ans,
05:27 je suis bien d'accord, c'est une période difficile, ça dure un an, deux ans, trois ans.
05:32 Si les parents sont suffisamment costauds et leur amour est suffisamment fort,
05:35 peut-être qu'il leur suffit d'attendre, quelque part, non ?
05:38 Alors, c'est un peu la conclusion que je voulais dire.
05:42 C'est-à-dire qu'effectivement, on peut attendre avant de s'imposer comme ça dans une famille
05:46 parce que c'est trop chaud, c'est trop compliqué.
05:49 On ne peut pas attendre éternellement non plus.
05:51 À un moment donné, il faut aussi que les adolescents comprennent que,
05:57 si avant il y avait une histoire qui était un peu désastreuse,
06:01 et qu'ils s'étaient habitués à cet enfer-là,
06:04 ils seront quand même un peu plus heureux avec des parents heureux et amoureux.
06:10 Et donc, avec le temps, si l'amour l'emporte et que le couple est fiable,
06:14 l'ambiance va s'apaiser.
06:16 Et puis, les enfants vont petit à petit grandir dans cette nouvelle famille
06:22 et se faire des nouveaux repères,
06:24 éventuellement avoir des liens plus forts avec des frères et des sœurs d'une nouvelle tribu,
06:29 ou des demi-frères et sœurs, ou quasi-frères et sœurs.
06:32 Et donc, ils auront dans leur histoire des parents sociaux de référence
06:38 qui vont se rajouter aux parents biologiques.
06:41 Et c'est bien parce que ça permet aussi d'avoir un panel comme ça,
06:46 d'identification, qui donne des forces dans la vie parce qu'il faut s'adapter à tout.
06:51 Oui, et puis ils partiront avec l'idée que l'amour, ce n'est pas éternel,
06:55 qu'un amour, ça peut durer un certain temps.
06:58 Et c'est peut-être pas mal non plus, parce que quand on voit aujourd'hui
07:01 à quel point les couples ont du mal à tenir sur la durée,
07:05 ça leur donne un autre repère que l'idéal amoureux
07:10 avec lequel on part souvent quand on est ado.
07:12 Exactement. Mais on en a besoin quand même,
07:15 on a autant besoin de l'idéal que de la réalité.
07:18 C'est vrai.
07:19 Je ne crois pas que les enfants qui seraient restés dans un couple
07:24 qui se détesterait en silence, sans jamais ébranler les fondations du couple,
07:30 seraient plus heureux que des ados qui peut-être vont essayer de tout casser
07:37 pendant un an ou deux, mais qui vont finalement se sentir rassurés
07:40 d'être dans une ambiance aimante.
07:42 Exactement.
07:44 Merci beaucoup, comme toujours, Philippe Hoffmann, de cet éclairage
07:48 qui permet de comprendre la société dans laquelle on vit,
07:51 puisque les ados, c'est les adultes de demain.
07:54 Merci beaucoup, Philippe Hoffmann.