- 21/05/2023
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00:00 Bonsoir à tous, bienvenue dans 27/27, la grande conversation des citoyens européens.
00:11 Ravi de vous retrouver.
00:12 Au programme de cette émission, faut-il augmenter la présence policière ? En Europe, ils sont
00:18 1,5 million, un nombre en légère baisse depuis 10 ans.
00:21 Si leur présence sur le terrain est inégale selon les pays, il en est de même pour la
00:26 confiance que leur accordent les citoyens.
00:28 Comment la police peut-elle renouer avec ceux qu'elle est censée protéger ? Faut-il
00:33 plus de bleus sur le terrain pour lutter contre l'insécurité ?
00:36 Et pour vous, la police, c'est quoi ? C'est la question qu'on a posée aux Européens
00:41 de notre atelier.
00:42 Pays public.
00:43 Pouvoir.
00:44 Protection.
00:45 Acteur social.
00:46 Pour en parler, nous recevons Carlos Morales, porte-parole du syndicat de police espagnol
00:50 SUP qui milite pour plus de présence policière sur le terrain.
00:54 Face à lui, Marielle Kaufmann, criminologue et professeure à l'université d'Oslo.
00:59 Pour elle, plus de policiers, ce n'est pas la solution.
01:02 Et pourquoi pas une police prédictive, guidée par l'intelligence artificielle et les algorithmes.
01:08 Jean-Sébastien Colombani est docteur en psychologie et ancien chercheur à l'École nationale
01:13 supérieure de la police.
01:14 Il a mesuré l'impact des conditions de travail sur la santé mentale des agents de police
01:20 surmenés.
01:21 Notre reportage nous conduira en Irlande où forces de l'ordre et citoyens travaillent
01:25 de concert grâce à une application, ce qui peut susciter des controverses.
01:29 Les messages viennent en premier lieu de la police pour informer les gens et pour leur
01:34 demander de l'aide quand quelque chose est arrivé.
01:36 Ils deviennent les yeux et les oreilles de la police.
01:40 Et enfin, dans notre grand entretien, je recevrai Olivier Norek, romancier, scénariste et ex-capitaine
01:45 de la police judiciaire de Seine-Saint-Denis.
01:47 Nous parlerons de l'image du flic, des imaginaires que charrie les forces de l'ordre.
01:52 Quelle est la part de réalité dans la fiction ?
01:54 Voilà, c'est le programme de 27 et c'est tout de suite.
01:57 Bonsoir à tous, bienvenue, bienvenue dans 27.
02:11 Dans ce débat, comme chaque semaine, à mes côtés Corentin Chrétien-Droz.
02:14 Guten Abend Corentin.
02:15 Guten Abend Nora.
02:16 Corentin, vous allez nous parler des dates, des chiffres, des données clés et être le
02:20 rapporteur du débat que nous organisons en ligne chaque semaine avec les Européens en
02:24 amont de cette émission.
02:26 Oui, cette semaine nous avons reçu des Européens venus d'un peu partout, comme toujours, d'Espagne,
02:29 d'Irlande, de Suède ou de Belgique, des policiers et des supporters, des juristes
02:34 ou de simples citoyens.
02:35 Des gens qui pensent qu'il y a trop de policiers, des gens qui pensent qu'il en faudrait plus.
02:39 Alors, insécurité ou sentiment d'insécurité ? La police est-elle la bonne réponse ?
02:45 Corentin, c'est votre pourquoi de la semaine.
02:47 Ça va ? Vous êtes bien devant 27 ? Vous vous sentez en sécurité ? Ok.
02:55 Mais la porte d'entrée, vous êtes sûr de l'avoir fermée ?
03:00 Terrorisme, meurtre, cambriolage, coup de couteau.
03:09 Chaque année, 22 millions d'Européens se font agresser.
03:17 1 sur 4 est victime de harcèlement.
03:19 Et à force, ils ont du mal à dormir.
03:22 Ils ont du mal à dormir.
03:25 Pourquoi elle dort, elle ? Elle n'a pas peur ?
03:29 Nous vivons l'une des époques les plus sûres de l'Histoire.
03:33 Si on regarde les chiffres, le crime baisse en continu depuis les années 50 et encore
03:38 plus depuis le Moyen-Âge.
03:40 Aujourd'hui, vos chances d'être attaqués, blessés ou tués sont plus basses que jamais
03:43 auparavant.
03:44 Ah, bah ça va ! En Europe, les homicides, les vols ou les cambriolages ont baissé depuis
03:52 15 ans.
03:53 On est en sécurité !
03:54 Je ne pense pas que la question soit de savoir si les gens sont en sécurité, mais s'ils
04:00 se sentent en sécurité.
04:01 Être en sécurité et se sentir en sécurité, ce n'est pas la même chose.
04:06 Un Français sur cinq ne se sent pas en sécurité et deux Allemands sur cinq ont l'impression
04:12 que ça empire.
04:13 Alors face à la peur, le meilleur remède, c'est ça.
04:16 Un air de trompette et un courageux policier.
04:22 Bon, lui, il est américain, mais vous voyez l'idée.
04:25 La présence de policiers, moi, je trouve qu'elle rassure.
04:28 Bah oui, ils sont gentils, les policiers.
04:32 Si vous n'êtes pas d'accord, demandez aux supporters d'Oliverpool.
04:36 Quand j'arrive dans un aéroport européen, je suis très souvent accueilli par une aide
04:44 d'honneur ou plutôt une aide déshonneur.
04:47 Des policiers avec des armes, des tenues de combat, des casques, etc.
04:52 La présence de la police renforce le sentiment d'insécurité.
04:56 On se dit pourquoi ils sont là ? Pourquoi ils sont là, les policiers ?
05:01 Et comment fait-on pour qu'ils nous rassurent ?
05:03 On en met partout, dans la rue, dans les écoles, dans les salles de bain.
05:07 On les arme, on les désarme ou on les réforme pour les rapprocher des citoyens.
05:13 Au fond, c'est quoi le rôle de la police ? Nous surveiller ou nous protéger ?
05:18 Je vais reprendre cette dernière phrase, Corentin, de votre Pourquoi Carlos Morel.
05:27 C'est quoi le rôle de la police ? C'est nous protéger ou nous surveiller ?
05:30 Eh bien, nous pensons que la police est là pour aider et protéger la société.
05:36 Pour être policier, la première chose que vous devez avoir, c'est une vocation policière,
05:41 la volonté d'aider votre prochain, d'aider tous vos voisins.
05:45 Eh bien, en Europe, la police est une police démocratique.
05:49 Et en théorie, nous ne sommes pas là pour surveiller ce qui ne va pas.
05:52 Nous sommes là pour poursuivre certains crimes une fois que les plaintes ont été déposées
05:56 ou si nous avons des soupçons, pour poursuivre les délinquants.
06:00 Mais en temps normal, nous sommes là pour protéger et aider notre prochain.
06:04 Alors, ce n'est pas évident pour la plupart de ceux qui ont travaillé avec nous sur cet atelier
06:10 en amont de cette émission.
06:11 Je voudrais revenir aussi sur ce débat qu'on a pu avoir entre insécurité et sentiment d'insécurité.
06:17 Qu'est-ce que cela vous inspire, Marjale Koffman ?
06:19 On vit une des périodes les plus sûres de l'histoire et pourtant, on est dans ce débat aujourd'hui.
06:25 Je pense que cela dépend beaucoup de la manière dont on définit la sécurité.
06:29 Dans de nombreux pays, les budgets alloués à la sécurité interne et externe sont très élevés,
06:34 supérieurs à la plupart des autres postes budgétaires.
06:37 Mais ces investissements rendent-ils vraiment le monde plus sûr ?
06:40 Ce n'est pas évident.
06:41 Et la question est justement de savoir si la tendance internationale à augmenter toujours plus les budgets de sécurité
06:47 butera contre ses propres limites à un moment donné.
06:49 Et je pense que oui.
06:51 Que signifie finalement être en sécurité ?
06:53 Nous parlons de sécurité financière, énergétique, d'accès à la nourriture.
06:57 Tout cela est en train de devenir très actuel.
06:59 Et nous sommes obligés de reconnaître que la notion de sécurité ne se limite pas à la présence de la police.
07:04 Il s'agit de quelque chose de bien plus complexe.
07:06 Alors justement, ce sera tout l'objet de ce débat que nous allons avoir.
07:10 J'aimerais toutefois vous entendre, M. Kolomanie.
07:13 Qu'est-ce que ça vous inspire, le fait qu'on soit encore aujourd'hui en train de se poser la question
07:17 entre sécurité et sentiment d'insécurité ?
07:19 Qu'est-ce que cela dit de nos sociétés ?
07:20 Que l'insécurité en fait est une question quand même très complexe.
07:23 Et qu'effectivement, il faut bien distinguer à mon sens la sécurité réelle,
07:28 le taux réel de délinquance ou le fait d'avoir été victime du sentiment
07:32 que peut avoir un certain nombre de personnes.
07:33 Et on voit que les études qui ont été menées sur le sujet montrent que
07:36 le sentiment de vulnérabilité, comme le fait d'être une personne âgée,
07:40 comme le fait d'être une personne LGBT ou d'être précaire,
07:42 finalement vient renforcer ce sentiment d'être vulnérable à l'agression,
07:45 d'être vulnérable à l'autre, qui va de pair aussi avec l'évolution de nos modes de vie actuels,
07:50 avec des sociétés de plus en plus anonymes, avec une perte des liens de solidarité primaire,
07:54 et puis une insécurité globale qui devient économique, climatique, voire géopolitique,
07:59 et qui vient renforcer aussi ce sentiment d'insécurité.
08:03 Alors Corentin, pour garantir la sécurité, il faut, impréalable,
08:06 et c'est établir un lien de confiance entre police et population,
08:09 est-ce que les Européens ont confiance dans leur police ?
08:12 En fait, plus tôt, selon l'Institut Eurostat qui a interrogé les Européens,
08:16 ils leur ont demandé de donner une note de confiance sur 10 à la police.
08:20 Et la moyenne en Europe, c'est 6 sur 10, c'est quand même pas mal,
08:23 c'est mieux que la note qui est donnée à la justice,
08:24 c'est mieux que la note, je vous parle pas de la note donnée aux politiques.
08:27 Alors ce qui est intéressant, c'est que cette note, elle diffère,
08:29 elle est très basse 5 sur 10, par exemple en Grèce ou en Lettonie,
08:32 et elle culmine avec 8 sur 10 en Finlande et au Danemark.
08:36 Mais alors pourquoi est-ce qu'on a plus confiance dans sa police quand on est Danois ou Finlandais ?
08:41 La réponse est un petit peu complexe, je vais pas trop vulgariser en face de chercheurs qui connaissent très bien le sujet.
08:46 En revanche, il y a un chiffre qui est intéressant que j'ai remarqué,
08:48 c'est quand on se pense sur le nombre de policiers par habitant en Europe,
08:52 et bien les deux pays européens où il y a le moins de policiers par habitant en Europe
08:55 sont la Finlande et le Danemark.
08:57 À l'inverse, la Grèce et la Lettonie où on a peu confiance, il y a beaucoup plus de policiers.
09:01 Alors, faut se méfier des conclusions hâtives, mais ce que je peux vous dire Nora,
09:03 c'est que les pays où la confiance dans la police est la plus forte en Europe,
09:06 sont les pays où il y a le moins de policiers.
09:08 Alors Carlos Morales, justement, l'Espagne est un des pays européens
09:13 qui compte le plus grand nombre de policiers.
09:16 Est-ce que vous estimez que c'est le nombre qui fait la sécurité ?
09:20 Tout d'abord, il faut analyser les raisons pour lesquelles nous sommes le pays
09:26 qui a le plus de policiers par habitant.
09:28 Beaucoup de pays du nord de l'Europe ont du personnel civil
09:33 pour effectuer tout le travail bureaucratique dans les commissariats de police.
09:37 Et nous, depuis des décennies, nous retirons ce travail au personnel civil
09:44 et le remplaçons par des policiers.
09:46 Justement parce que cela touche à certaines activités,
09:50 à certains sujets sensibles, à des informations sensibles.
09:56 Par ailleurs, il est vrai que les villes des pays du sud de l'Europe
10:00 ont beaucoup plus d'habitants que celles du nord de l'Europe.
10:04 Concrètement, en Espagne, nous parlons de 40 villes de plus de 200 000 habitants,
10:09 une situation similaire à celle de la France.
10:12 Et enfin, l'Espagne reçoit 48 millions de touristes par an.
10:18 Donc j'entends que ce que vous nous dites, c'est qu'il faut une présence policière
10:22 nombreuse pour rassurer les touristes, les habitants
10:25 et prendre en charge la dimension administrative de ces missions.
10:29 Est-ce que vous êtes d'accord, Marjel Kofman ?
10:31 Est-ce que vous aussi vous considérez que c'est le nombre d'uniformes
10:34 qu'on voit dans la rue, dans l'espace public, qui crée la sécurité ?
10:38 En tout cas, je ne pense pas que ce soit le cas en Norvège.
10:41 Il faut dire que la police lutte contre une image un peu compliquée,
10:44 à savoir que lorsqu'elle va dans la rue, il y a toujours une ambigüité.
10:48 Est-ce que je suis en danger ou est-ce que je ne suis pas en danger ?
10:51 Comment la police va-t-elle se comporter ? Est-elle intègre ? N'est-elle pas intègre ?
10:56 Jean-Sébastien Colombani, on se souvient qu'en France,
10:58 le président de la République, Emmanuel Macron, disait qu'il voulait plus de bleu dans la rue.
11:02 Finalement, le débat qu'on est en train d'avoir ici, c'est un débat profondément européen,
11:06 cette question de plus de présence policière. Qu'en est-il en France ?
11:10 En France, on voit qu'effectivement, c'est une question politique,
11:13 un choix de société aussi, de ce qu'on attend de la police.
11:16 Et quand on regarde les courbes, on voit que globalement,
11:19 le nombre d'effectifs de police nationale, de gendarmerie nationale
11:22 et de police municipale également, a largement augmenté depuis les années 60.
11:26 La question qui se pose aussi, c'est à quoi sont affectés ces policiers ?
11:30 Plus de policiers ne signifie pas nécessairement plus de policiers dans la rue.
11:33 Le choix qui a été fait, par exemple, depuis une vingtaine d'années,
11:36 était de créer des brigades anticriminalités,
11:39 des brigades en civil qui ont pour but de ne pas être vues de la population
11:43 et des délinquants pour pouvoir procéder à des interpellations.
11:46 Et donc, on voit ces dernières années qu'on a une intensification du travail,
11:49 une augmentation aussi du taux d'élucidation, mais à côté de ça,
11:52 des personnels en épuisement, des personnels qui, effectivement,
11:55 aujourd'hui, sont en burn-out. Et peut-être, effectivement,
11:58 on peut se poser la question, peut-être plus de policiers, mais où les affecter ?
12:01 Peut-être pas forcément dans la rue, peut-être effectivement sur ces domaines-là
12:04 de judiciaire pour faciliter le travail d'enquête et éviter d'avoir
12:07 un portefeuille de dossiers qui devient impossible à traiter.
12:10 Alors, justement, on l'évoquait à l'instant, Corentin,
12:13 on a débattu de cette question du nombre de policiers dans notre atelier
12:17 et pour les Européens, c'est pas la question centrale.
12:20 Oui, ils sont un petit peu d'accord avec vous, c'est pas tant le combien,
12:22 mais le comment. Enfin, ils ne doivent pas être plus les policiers,
12:24 ils ne doivent pas être moins, selon les participants de notre atelier,
12:27 ils doivent être mieux.
12:28 Les tâches administratives qui sont confiées aux policiers sont,
12:31 effectivement, extrêmement lourdes. Je pense que, que ce soit en France,
12:34 en Belgique ou ailleurs, ce qu'on aimerait bien, évidemment,
12:37 ça prend une part très, très importante du travail des policiers
12:40 et ça hypothèque leur présence sur le terrain et qui est essentiel,
12:43 pas nécessairement pour faire le pied-gru ou pour faire le porte-fleur,
12:47 pour le dire de manière un peu triviale, mais surtout pour nouer
12:52 le contact avec les citoyens.
12:54 On avait, à un moment, des îlotiers dans nos villes, c'est des policiers
12:59 qui passaient, qui parlaient avec les commerçants, qui parlaient
13:01 avec les gens, qui nous rassuraient aussi sur les problèmes de la sécurité.
13:06 Ça peut être des pannes de luminaires, d'éclairage public, ça peut être
13:11 des trous dans la chaussée, ça peut être des mauvais stationnements, etc.
13:16 Et je trouve que cette présence-là, c'est aussi de la sécurité
13:20 et ça rassure les gens.
13:22 On n'a pas besoin de connaître le policier par son prénom,
13:27 mais il faut lui faire confiance, il faut être sûr qu'il est compétent,
13:32 qu'il sait communiquer, qu'il n'est pas corrompu.
13:36 Il faut une police locale qui soit vraiment impliquée
13:41 dans sa mission de sécurité publique.
13:46 C'est intéressant ce qu'on vient d'entendre.
13:48 Pour justement garantir ce sentiment de sécurité, il faut créer un lien
13:52 direct avec la population.
13:54 Il est nécessaire d'avoir une police qui soit de proximité
13:58 et qui soit une condition du lien social ?
14:01 Oui, je pense que oui.
14:04 C'est précisément le modèle norvégien qui dit
14:07 "nous voulons être en contact avec les gens".
14:09 Il existe diverses versions de ce modèle, certaines impliquant le citoyen
14:13 et y compris dans la surveillance.
14:15 Tout cela est très discutable en fait.
14:17 Nous faisons également des recherches à ce sujet à l'université.
14:20 Mais l'Allemagne s'est également tournée vers le principe de désescalade
14:24 qui consiste à essayer d'entrer en contact et de discuter
14:27 là où la situation devient critique.
14:29 Je pense que cela fait déjà une différence.
14:33 En France, ce n'est pas du tout la doctrine qui est mise en œuvre
14:36 à la fois aujourd'hui dans le maintien de l'ordre,
14:38 mais plus globalement, on se souvient aussi de l'ancien président de la République
14:41 Nicolas Sarkozy, qui en 2003 disait "Organiser un match de rugby
14:45 pour les jeunes du quartier c'est bien, mais ce n'est pas le rôle de la police".
14:48 Il a étonné la fin de la police de proximité.
14:50 Est-ce qu'en fait, la France est dans l'erreur justement
14:53 à mettre en place ce type de fonctionnement ?
14:55 Ce qui est clair, c'est que la phrase de Nicolas Sarkozy à l'époque
14:58 était une caricature globalement de ce qu'était la police de proximité
15:01 qui visait aussi à décrédibiliser le gouvernement précédent
15:04 qui avait été pendant cinq ans aux manettes.
15:07 C'est vrai que depuis, on a rebasculé dans le modèle précédent,
15:10 ce qui veut dire davantage sur la répression que sur la prévention,
15:13 avec effectivement une dégradation aussi du lien entre police et population.
15:18 Et je pense effectivement qu'il faut revenir à ce modèle de police de proximité
15:22 dont les élus locaux étaient plutôt satisfaits, dont on avait de bons retours.
15:25 Mais en tout cas, c'est l'avis aussi aujourd'hui
15:27 de la Commission nationale consultative des droits de l'homme
15:29 qui dans son rapport l'année dernière
15:31 plaidait en faveur d'un retour à la police de proximité,
15:34 notamment dans les quartiers les plus difficiles
15:37 où le contrôle d'identité, où une rhétorique guerrière
15:40 de reconquête républicaine finalement vient rajouter de l'huile sur le feu
15:44 à une situation déjà très tendue entre de jeunes policiers
15:47 affectés là pour leur premier poste.
15:49 Parfois peu formés, qui ne connaissent pas les lieux.
15:51 Qui ne connaissent pas les lieux, effectivement.
15:53 C'est le modèle français aussi de police nationale
15:55 où on envoie des jeunes de province dans des cités
15:57 dont ils ne connaissent pas effectivement ni les mœurs, ni le domaine.
16:01 Et c'est effectivement à l'inverse de la police de proximité
16:04 qui s'axe autour d'une connaissance du territoire,
16:07 d'une connaissance des acteurs sociaux, des familles,
16:10 pour justement pouvoir créer un lien de confiance avec les populations
16:13 et notamment dans les endroits où c'est le plus difficile.
16:16 Sur le fond, je suis extrêmement d'accord sur ce point.
16:19 Et je pense qu'il est aussi très positif de s'appuyer
16:21 sur des programmes de prévention ou sur la police locale.
16:25 Mais je voudrais juste faire remarquer que la prévention
16:27 est aussi vue sous une perspective critique en criminologie.
16:31 Parce qu'il existe aussi une forme de prévention qui stigmatise,
16:34 qui concerne précisément les quartiers où l'on se dit
16:37 « nous pouvons nous attendre à ce que la criminalité vienne d'ici ».
16:40 Et il faut donc prendre au sérieux le fait que ces idées de prévention
16:43 et de prédiction, nous y reviendrons certainement,
16:46 peuvent aussi provoquer une stigmatisation.
16:49 Carlos Morales, justement, comment est-ce qu'on recrée du lien
16:51 avec la population quand on voit les difficultés parfois
16:54 dans certains quartiers populaires ? Comment ça se passe en Espagne ?
16:57 Dans le cas spécifique de l'Espagne, qui je le répète
17:02 est le pays de l'Union européenne qui a le plus d'agents de police par habitant,
17:05 nous avons encore des brigades de participation citoyenne
17:09 qui sont chargées d'intervenir dans les écoles
17:11 ou de rencontrer les associations de quartier.
17:14 Nous utilisons également beaucoup les réseaux sociaux
17:17 pour essayer de nous rapprocher des citoyens,
17:19 pour ne jamais nous en éloigner.
17:23 Alors justement, en Irlande, la police est proche aussi des citoyens,
17:27 proche au point d'échanger des informations avec eux
17:30 via une application. Celle-ci permet aux forces de l'ordre
17:33 d'alerter les populations, mais permet aussi aux citoyens
17:37 de littéralement pratiquer la dénonciation.
17:40 Reportage Marie-Claire Pollo.
17:42 Un soir, il y a eu une tentative de cambriolage chez mon frère.
17:52 Il a entendu de gros coups et a vu deux personnes
17:55 essayer d'enfoncer sa porte d'entrée.
17:59 Il a pris sa femme et son enfant et ils ont essayé
18:03 de s'enfermer dans une chambre.
18:05 Une minute plus tard, les coups se sont arrêtés.
18:08 La police est venue un peu après, ils ont parlé à quelques personnes
18:11 et ont conclu que des voisins avaient dérangé les voleurs.
18:14 Là, c'était un hasard. Mais pourquoi ne pas imaginer
18:18 un outil qui fasse en sorte que ce ne soit plus un hasard ?
18:22 Desclan Collins a alors l'idée d'inventer une application.
18:25 Le but ? Créer un lien entre la police et les citoyens.
18:29 Cordia est une application pour les téléphones qui permettent
18:33 aux gens d'être connectés à leurs voisins et à leurs amis.
18:36 Les messages viennent en premier lieu de la police pour informer
18:39 les gens et pour leur demander de l'aide quand quelque chose
18:42 est arrivé. Ils deviennent les yeux et les oreilles de la police.
18:46 Bonjour, commissariat d'abandon.
18:52 Savez-vous s'il y avait un passager dans le véhicule, monsieur ?
18:56 Ils ont vu un véhicule quitter leur cour de fer, mais certains outils
19:01 avaient disparu. Donc je vais envoyer une alerte au groupe
19:05 de la zone concernée.
19:08 Dans ce cas, environ 150 à 200 utilisateurs vont recevoir l'alerte.
19:13 Et s'ils repèrent le véhicule, ils appellent le commissariat
19:17 directement pour le signaler.
19:20 Cela nous permet d'avoir des informations de qualité
19:24 et en temps réel. On peut voir une baisse nette du nombre
19:28 de cambriolages. Je n'ai aucun doute sur le fait que l'application
19:31 Cordia et toutes nos mesures de prévention y sont pour quelque chose.
19:35 De fait, le nombre de cambriolages a baissé drastiquement
19:40 ces trois dernières années à Cork. De plus en plus de citoyens
19:44 se connectent à l'application et se mettent à observer avec vigilance
19:47 les moindres faits et gestes de leur entourage.
19:50 Quand cela leur semble inutile de prévenir la police,
19:53 ils communiquent directement entre eux.
19:56 Il y a toujours des gens qui viennent sonner chez vous,
19:59 qui vous proposent de faire des travaux, qui observent l'endroit
20:02 pour voir ce qu'ils peuvent faire ou ce qu'ils peuvent voler.
20:05 Et alors c'est très pratique de le partager tout de suite sur l'application.
20:08 Le conducteur d'une voiture verte, immatriculée XYZ,
20:11 est dans telle zone et seule chez les gens.
20:14 Comme on dit, faites attention, cela arrive souvent.
20:17 Ici j'ai plusieurs options. Alarmes cassées, comportement antisocial,
20:28 besoin d'aide, personne ou animal disparu, comportement suspect.
20:33 Nous sommes des cibles privilégiées avec si peu de voisins immédiats.
20:37 Avant dans la maison j'étais nerveuse, mais maintenant je ne le suis plus
20:41 parce que j'ai l'application. J'envoie un message et mes voisins arrivent
20:44 si j'ai besoin d'eux.
20:46 Dans le cas où un cambriolage est en cours, on encourage les gens
20:53 à être témoins, pas à s'impliquer directement.
20:56 On ne veut pas que les gens fassent justice eux-mêmes,
20:59 on veut qu'ils s'entraident et qu'ils veillent.
21:02 Avec Cordia, on partage des informations.
21:06 Même s'il ne se passe rien, le simple fait d'être connecté
21:09 aide les gens à se sentir plus en sécurité.
21:12 Finalement, Jean-Sébastien Colombani, c'est l'exemple à suivre en Irlande,
21:18 la sécurité c'est l'affaire de tous ?
21:20 Par cette application, on recrée entre voisins un petit peu ce lien
21:23 de solidarité qui a pu être fracturé par nos modes de vie actuels.
21:28 C'est vrai qu'après ça pose un certain nombre de questions,
21:31 par rapport à notre histoire aussi de la Seconde Guerre mondiale
21:34 et toutes les dérives qu'il peut y avoir finalement dans le fait
21:37 d'impliquer les citoyens dans la sécurité, qui est un domaine régalien,
21:40 qui est finalement un domaine aussi démocratique,
21:42 où la police est légitime parce qu'elle a un mandat pour le faire
21:45 et parce que derrière, un contrôle citoyen est possible.
21:48 Elle a le monopole de la violence légitime.
21:51 La fameuse phrase de Max Weber, mais qui effectivement
21:54 se pose la question de la légitimité de cette violence,
21:57 mais qui pose la question dès lors qu'on implique des citoyens
22:00 de quel est leur mandat, comment est-ce qu'on régule ces types de dispositifs.
22:04 Alors justement Corentin, certains citoyens vont plus loin
22:07 en faisant la police eux-mêmes.
22:08 Oui, alors c'est un chiffre à prendre avec des pincettes,
22:10 mais il y en aurait 3 millions de citoyens vigilants en Europe
22:13 et certains ne se posent pas la question de la légitimité de la violence,
22:16 justement pour beaucoup, notamment au Pays-Bas,
22:19 il y a un phénomène qui s'appelle les chasseurs de pédophiles
22:21 que vous connaissez peut-être, ce sont des justiciers autoproclamés
22:23 qui pourchassent les criminels présumés et puis les dénoncent
22:26 à leur famille, à leurs voisins, parfois à leurs employeurs
22:29 et ça pose problème et c'est la police néerlandaise elle-même
22:31 qui le dit, en 2020 il y aura eu 250 incidents
22:34 à cause de ces chasseurs de pédophiles,
22:37 alors ça peut être des passages à tabac, mais aussi des menaces de mort,
22:40 des maisons encerclées, il y aura même eu 2 morts récemment
22:43 au Royaume-Uni et au Pays-Bas, pourchassés par ces citoyens
22:45 un petit peu trop vigilants.
22:46 Alors Marèle Kaufmann, justement, ces citoyens qui s'organisent en milice,
22:51 qui deviennent parfois supplétifs de la police,
22:53 est-ce que ça c'est une dérive ou est-ce que finalement
22:55 c'est un constat d'échec des forces de l'ordre ?
22:57 Oui, en fait, je dirais que c'est vraiment un exercice d'équilibre.
23:01 Je ne connais pas l'application en Irlande,
23:03 mais il y a beaucoup d'autres choses à prendre en compte.
23:06 Dès que je partage des informations en ligne avec quelqu'un,
23:09 par le biais d'un système quelconque,
23:11 elles sont toutes, pour ainsi dire, traçables, n'est-ce pas ?
23:14 Ces informations sont donc surveillées,
23:17 ce que je partage à mon tour en tant que surveillant,
23:19 c'est toute une construction de surveillance, disons.
23:22 Carlos Morales, justement, quand on est fonctionnaire de police,
23:24 comment est-ce qu'on gère ces milices,
23:27 ces citoyens vigilants, cette auto-organisation ?
23:30 Est-ce que c'est l'échec des forces de l'ordre
23:32 quand on a des citoyens qui s'organisent ?
23:35 Non, pas forcément.
23:37 À Barcelone, par exemple, ce sont les policiers,
23:39 les Mossos d'Esquadra et la Guardia Urbana de Barcelone
23:42 qui travaillent avec ces citoyens vigilants.
23:44 Et j'imagine qu'ils se coordonnent avec eux.
23:47 À Madrid, où je suis en poste,
23:49 nous avons plusieurs associations de quartiers
23:51 qui nous aident à maintenir la sécurité.
23:53 Et nous coordonnons en permanence tous les commissariats
23:56 et tous les citoyens qui veulent aider.
23:58 Mais qu'est-ce qui fait qu'à la fin,
23:59 ce ne sont pas juste des supplétifs ?
24:01 Quels mandats ont-ils ?
24:02 Est-ce qu'il n'y a pas un problème démocratique
24:04 à avoir des citoyens qui collaborent avec vous ?
24:07 Non, pas spécialement.
24:09 Je vous explique.
24:11 Notre législation prévoit que la détention en tant que telle
24:14 ne peut pas être exercée par un citoyen.
24:16 Donc oui, si le citoyen retient une personne,
24:19 ce n'est pas prévu dans le Code pénal espagnol.
24:22 Mais s'il retient une personne et qu'il appelle le 091,
24:25 le numéro des forces de l'ordre,
24:27 nous nous rendons sur place et c'est nous qui arrêtons
24:30 et conduisons ce criminel présumé devant la justice.
24:34 Mais bon, la vérité, c'est que nous devons faire prendre conscience
24:37 aux citoyens qu'il faut se coordonner avec les forces de l'ordre.
24:41 Parce que leur propre sécurité
24:43 et la sécurité de leur entourage en dépend également.
24:47 Corentin, il y a un autre acteur
24:49 qui commence à jouer un rôle dans le maintien de l'ordre,
24:51 c'est le secteur privé.
24:52 Il est en forte croissance et on en a beaucoup parlé lors de notre atelier.
24:55 Oui, la sécurité privée, par exemple,
24:57 a vu ses effectifs doublés en 10 ans en Allemagne
25:00 avec un chiffre d'affaires qui atteint aujourd'hui 10 milliards d'euros.
25:03 En France, il y a une forte croissance aussi
25:05 avec 170 000 salariés de la sécurité privée.
25:08 C'est plus que le nombre de policiers en France.
25:10 Et ça n'était pas du goût de tous les membres de notre atelier.
25:13 Avec la révision générale des politiques publiques,
25:15 qui était un grand mouvement initié sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy,
25:19 de restrictions budgétaires qui a amené à la suppression
25:23 d'environ 13 700 postes de policiers et de gendarmes,
25:26 on a dû sous-traiter toute une partie de la sécurisation,
25:29 notamment des grands événements, par exemple.
25:31 On a vu ça à l'euro 2016, ça a été devenu flagrant
25:34 parce qu'après la période d'attentat, on avait besoin de main-d'œuvre.
25:38 Donc on a sous-traité ça à des sociétés de sécurité privée.
25:41 Maintenant, ça pose aussi d'autres questions.
25:43 Il faut savoir que les policiers et les gendarmes
25:45 ont une formation qui est bien plus complète
25:47 que ne l'ont les agents de sécurité privée.
25:50 Le maintien d'un ordre public correct dans un pays,
25:53 c'est une tâche régalienne de l'État.
25:55 Et je pense qu'il ne faut absolument pas confier ces tâches-là
25:58 à des sociétés privées qui sont des sociétés commerciales.
26:01 On ne le souligne jamais assez.
26:03 Et donner des données privées des citoyens à une société commerciale,
26:08 je trouve ça extrêmement dangereux.
26:10 Les services de police font eux l'objet de contrôles.
26:13 L'IGS, l'inspection générale en Belgique,
26:18 le comité payant en Belgique,
26:20 et donc on contrôle démocratique de la part du Parlement
26:22 sur les forces de police.
26:23 Et ça, c'est extrêmement important.
26:24 Ça veut dire qu'on ne peut pas se prendre à n'importe quoi
26:26 parce que les policiers sont des démocrates,
26:28 et j'y tiens beaucoup.
26:29 On vit dans une démocratie, dans un État de droit,
26:31 c'est extrêmement important, il faut veiller à garder ça.
26:33 Carlos Morales, est-ce qu'on l'aime ou pas ?
26:35 Il va falloir qu'on fasse avec la sécurité privée ?
26:37 Oui, c'est un fait.
26:39 Et c'est surtout une réalité qui fonctionne déjà dans quelques pays.
26:42 Moi, évidemment, je connais surtout l'Espagne
26:44 et le modèle policier espagnol,
26:46 et on travaille avec la sécurité privée.
26:49 En Espagne, les entreprises de sécurité privée
26:51 travaillent surtout avec les particuliers,
26:53 mais dans les métros de Madrid, de Barcelone
26:56 et d'autres grandes villes,
26:57 ils travaillent déjà avec nous, avec la police,
26:59 pour assurer la sécurité.
27:01 Marjel Koffman, c'est une dérive là aussi, selon vous,
27:04 ou il va falloir faire avec ?
27:06 La sécurité ici, elle devient commerciale,
27:09 devient un produit, une marchandise.
27:11 Et à un moment donné, nous devons nous demander
27:14 pour qui et quand devient-elle un produit de luxe ?
27:17 Qui peut se le permettre ?
27:19 Et surtout, quand il s'agit de technologies de sécurité privée,
27:22 nous entrons dans un tout nouveau domaine.
27:24 Cela signifie que ces entreprises privées
27:26 ont des données sensibles sur nous,
27:28 qu'elles ont un pouvoir sur ces données,
27:30 qu'elles peuvent décider quand ces données seront utilisées
27:32 et dans quel but.
27:34 Vous êtes d'accord, Jean-Sébastien Colombani,
27:37 finalement, cette marchandisation du marché, de la sécurité,
27:40 cela pose une question démocratique ?
27:42 Oui, tout à fait, cela pose la question du contrôle,
27:44 du contrôle des données,
27:46 des données qui appartiennent, comme c'était dit,
27:48 au domaine régalien.
27:50 Cela pose une vraie question, à mon avis,
27:52 de pouvoir de contrôle qui nécessite
27:54 que les citoyens puissent avoir un droit de regard
27:56 sur ce qui se passe dans ces sociétés.
27:58 Marjel Koffman, vous avez travaillé là-dessus,
28:00 la police de demain, finalement, face à cette réalité
28:03 du quotidien et de ses conditions de travail.
28:05 Comment est-ce qu'elle va pouvoir fonctionner ?
28:07 Que vous projetez dans cette police de demain ?
28:09 Oui, ok.
28:11 Alors, il y a deux aspects dont on pourrait parler ici.
28:14 D'abord, la notion de police prédictive,
28:16 dont on prétend maintenant qu'elle peut rendre
28:18 l'intervention policière plus efficace et plus concrète.
28:21 Mais Marjel Koffman, pour être claire,
28:23 la police prédictive, qu'est-ce que cela veut dire ?
28:25 L'idée est d'avoir des sortes de bases de données
28:28 sur les endroits où il y a le plus de criminalité dans les villes.
28:31 Et puis, on les alimente avec certains paramètres
28:34 sur la façon dont on pense, ou plutôt dont on théorise,
28:37 en quelque sorte, les éléments qui pourraient aider à prédire
28:40 quand et où une présence policière est nécessaire.
28:43 Il existe différentes théories à ce sujet,
28:45 et ces paramètres sont ensuite traduits en mathématiques.
28:48 Et ensuite, il y a un algorithme qui,
28:51 sur la base des données et de ces paramètres,
28:53 calcule, pour ainsi dire, où la police doit-elle aller ensuite.
28:56 Cela semble de prime abord assez inoffensif,
28:59 et c'est généralement le cas.
29:01 Mais le problème, c'est que l'un des plus grands problèmes
29:03 que je dois absolument mentionner ici,
29:05 c'est que si j'introduis toujours les mêmes données dans le système,
29:08 je fais automatiquement de la discrimination,
29:11 car je renvoie toujours la police aux mêmes endroits.
29:13 C'est effectivement un peu comme le film Minority Report,
29:15 où vous allez avoir des algorithmes d'intelligence artificielle
29:18 qui vont vous aider à prédire, avec le risque d'avoir des biais,
29:21 de favoriser, d'alimenter des formes de discrimination.
29:25 Cette police prédictive, est-ce qu'elle est déjà réelle ?
29:27 Elle existe ou pas ?
29:29 Oh oui, c'est clairement déjà une réalité aujourd'hui.
29:33 Alors pas encore tellement en Norvège,
29:36 mais si vous prenez la Suisse ou l'Allemagne,
29:39 où il y a de vraies propositions de coopération dans ce domaine,
29:42 là-bas, c'est déjà une réalité.
29:45 Jean-Sébastien Colomany, il faut accueillir ces nouvelles manières
29:49 d'enquêter, peut-être, de prédire ?
29:51 Effectivement, avec précaution,
29:53 parce que lorsqu'on regarde un petit peu l'activité policière,
29:55 la police et l'activité de patrouille des policiers
29:57 a toujours été prédictive, mais par rapport à l'expérience du policier,
30:00 de savoir que potentiellement tel ou tel quartier,
30:03 mais ce qui peut amener au biais cognitif, qu'on connaît tous,
30:06 où l'esprit humain, effectivement, amène à potentiellement des discriminations,
30:10 mais la police a toujours eu ce côté projectif,
30:13 d'aller essayer de se projeter à l'endroit où on s'attend potentiellement
30:17 à ce qu'il y ait de la délinquance.
30:18 Avec le risque à terme, aussi, du coup, qu'on ait une baisse d'effectifs
30:21 sur le terrain, si on a ce type d'outils.
30:24 Effectivement, mais ça pose une question globalement éthique
30:27 de quelle donnée on utilise, comment on les traite,
30:30 et effectivement, quelle transformation ça implique pour notre police.
30:33 Corentin, il y a une autre question aussi qui a été longuement discutée
30:37 par les participants de notre atelier.
30:40 Le fond du débat autour de la police, il serait un peu biaisé.
30:43 Il est largement instrumentalisé.
30:46 Oui, il est sous influence d'un acteur encore plus étrange que les algorithmes,
30:49 c'est la politique.
30:50 Or, la politique, ce sont des opinions,
30:52 et la sécurité, ce doit être des faits selon les membres de notre atelier.
30:55 Le fait que la sécurité soit l'un des enjeux politiques
30:58 prééminents dans notre époque,
31:01 fait qu'en fait, les politiques le voient via un prisme
31:04 totalement électoraliste qui, en fait, finit par affaiblir
31:08 les politiques de sécurité parce qu'on n'a aucune vision de long terme.
31:11 C'est quelque chose qui est vraiment véridique dans d'autres États,
31:15 notamment aux États-Unis, où on voit qu'en fait,
31:17 les politiques de sécurité, elles sont portées par des enquêtes d'opinion
31:20 et pas par des études qui sont factuelles,
31:23 qui vont être pensées par des experts sur le long terme.
31:28 On voit que le malaise policier découle par exemple
31:31 d'un manque d'investissement qui date d'il y a déjà 20 ans.
31:34 Il faut une intervention du politique,
31:38 mais pas une politisation de la police.
31:41 Le politique peut intervenir si on a besoin de ressources,
31:44 et encore, ces ressources doivent venir d'un réel besoin
31:47 pour améliorer la police sur le terrain,
31:51 pas pour essayer de gagner des voix pour la prochaine élection.
31:56 Carlos Morales, votre corps, en fait, est beaucoup trop politisé,
32:00 il est instrumentalisé politiquement.
32:03 Dans le cas spécifique de l'Espagne, non.
32:06 Et nous n'allons pas laisser les politiciens instrumentaliser
32:09 la police nationale ou la guardia civile.
32:12 Je pense que la question de la sécurité est un facteur très important
32:16 et que la sécurité de tous les citoyens est en jeu.
32:19 Logiquement, il faudrait un pacte d'État entre tous les partis politiques
32:23 pour valoriser les forces de police.
32:25 Marell Kofman, qu'en est-il de la réalité allemande ou norvégienne ?
32:29 Est-ce que vous diriez que la sécurité est un problème politique,
32:32 mais il ne faut pas trop politiser la police ?
32:35 Alors, je vais donner une réponse classique en sciences sociales,
32:40 qui est "tout est politique".
32:43 Dans le sens où, en fait, chaque décision qui est prise en matière du budget,
32:47 en matière de quand et où nous employons qui, c'est de la politique.
32:52 Ce sont toutes des caractéristiques qui, comme je le disais,
32:55 impliquent des priorités budgétaires différentes
32:57 de la part des différents gouvernements.
33:00 Donc, en ce sens, le gouvernement doit toujours faire partie,
33:03 automatiquement, de toutes les décisions concernant la police.
33:08 Jean-Sébastien Colombani, pourquoi cette instrumentalisation ?
33:11 Je rappelle qu'en France, il y a eu une manifestation de policiers
33:15 où la quasi-totalité de la classe politique s'était rendue.
33:19 Comment expliquer ce fait politique qu'est la sécurité ?
33:23 C'est quelque chose d'assez complexe, puisque finalement,
33:25 comme vous le disiez, la police est fondamentalement politique.
33:28 On retrouve d'ailleurs la même étymologie entre police et politique.
33:32 C'est "politeia" du grec ancien, qui signifie la gestion de la cité.
33:35 Et donc, je pense que la question de la police est très politique
33:38 et nécessite l'intervention des citoyens, justement,
33:40 pour donner leur avis, pas tant sur les faits, qui sont incontestables,
33:44 mais sur ce qu'ils attendent de leur police, de quelle police on souhaite.
33:48 Et ça, je voulais rajouter aussi que les policiers eux-mêmes en souffrent
33:52 et que lorsqu'on questionne les policiers, on voit aujourd'hui
33:54 une vraie perte de sens du métier de policier, une vraie lassitude
33:58 face aux injonctions contradictoires, face aux priorités changeantes,
34:01 face aux effets d'annonce, face à l'évaluation quantitative
34:04 de leur activité, face au manque d'autonomie qu'ont les commissaires de police,
34:08 par exemple, pour gérer leur service de police au niveau local
34:10 et adapter en même temps leur politique de sécurité aux besoins de la population,
34:14 mais aussi à la réalité de la délinquance au niveau local.
34:18 Et ce que j'entends, c'est qu'il va falloir aussi largement réimpliquer
34:21 les citoyens pour déterminer ce lien social qu'est la police
34:25 dans ces questions de sécurité et qu'il y ait un préalable au vivre ensemble.
34:29 Merci beaucoup. Merci à tous les trois.
34:32 Merci d'avoir accepté de venir débattre de ce sujet.
34:35 Merci Corentin. Tout de suite, c'est le Grand Entretien.
34:38 Je reçois le romancier et ancien policier Olivier Norek.
34:41 Gardien de la paix, lieutenant puis capitaine à la police judiciaire
34:49 de Seine-Saint-Denis en région parisienne, Olivier Norek est aussi un conteur.
34:53 En 2013, il connaît un succès immédiat avec son premier roman, Code 93.
34:58 À 40 ans, après 18 ans de service, il quitte l'uniforme pour se consacrer
35:02 à la fiction et participe aux scénarios de séries comme Engrenage ou Les Invisibles.
35:07 Sorti en avril dernier dans Les Brumes de Kaplan et son septième roman.
35:11 Bonsoir Olivier Norek. Bonsoir Nora.
35:13 Merci d'être avec nous. Merci à vous.
35:15 Alors, dans vos polars, le protagoniste, le capitaine Kos, est un flic humaniste et sensible.
35:21 Pourquoi est-ce que vous, Olivier Norek, par exemple, vous avez voulu devenir flic ?
35:26 Pour être utile ? Peut-être aussi parce que, bon là c'est un petit peu de la psychologie,
35:33 de la psychiatrie de comptoir, peut-être aussi parce que je n'aime pas beaucoup
35:37 ou alors que je ne trouve pas ma place.
35:39 Et c'est une merveilleuse manière, si on fait quelque chose pour l'autre,
35:42 d'avoir en retour un regard. Et ce regard, en fait, va me donner cette place, en fin de compte.
35:46 C'est-à-dire que si je travaille pour l'autre, si je peux être utile à l'autre,
35:49 alors, de par le fait, je crée en fait ma place.
35:52 Alors, vous êtes policier dans la police judiciaire, c'est l'enquêteur.
35:56 Qu'est-ce qu'on va chercher justement dans l'enquête ? C'est quoi ?
35:58 Qu'est-ce qui nous pousse à se dire "Allez, ok, je donne du sens parce que j'aide mon prochain".
36:03 Mais ça va un peu plus loin que ça.
36:04 Ça va un peu plus loin parce que je considère que les policiers, c'est les derniers aventuriers de ce siècle.
36:08 Le truc, c'est qu'il n'y a plus de découvreurs, il n'y a plus d'explorateurs, il n'y a plus d'aventuriers.
36:13 Et c'est vrai que le flic, c'est quand même quelqu'un qu'on met sur une zone,
36:16 criminel ou pas, délictuel ou pas, délinquant ou pas, je veux dire,
36:19 et on lui donne un pare-balle, on lui donne un flingue, en lui disant d'essayer de ne pas l'utiliser.
36:24 Mais on lui donne cette responsabilité de sécuriser, cette responsabilité d'être une sorte de...
36:29 Et là, je me départis du mot "justice", mais d'être "justicier",
36:32 d'aller dans une situation d'injustice, une situation de violence, une situation de pénibilité, enfin de drame,
36:38 et d'essayer d'être la solution de ça.
36:40 D'où le nom de la première fonction de policier, "gardien de la paix".
36:44 On dirait un film de super-héros, "Gardien de la paix".
36:47 Alors, on n'est pas sur les "Gardiens de la galaxie", mais toujours est-il que,
36:49 sémantiquement, c'est hyper intéressant.
36:51 Si on reste sur les mots, "gardien de la paix", c'est le métier le plus formidable qui puisse exister.
36:55 - Quelle est cette part de vérité dans vos romans ? Je le disais, vous avez exercé longtemps en Seine-Saint-Denis.
36:59 Comment est-ce que le romancier que vous êtes a utilisé ce terrain dans ses romans ?
37:04 - 90 à 95 % de ce que vous allez lire dans mes livres, ce sont des faits réels.
37:08 Je pense que la plupart des flics ont un petit calepin dans lequel ils notent les choses qui les touchent,
37:11 qui les émeuvent ou sinon qui les blessent.
37:14 Le fait d'écrire ce qui nous arrive sur un carnet, peut-être, permet aussi de s'en séparer.
37:20 - De mettre de la distance, c'est cathartique.
37:22 - C'est cathartique, oui, on peut utiliser ce mot-là, c'est cathartique,
37:25 mais c'est surtout que, métaphoriquement, on écrit cette chose-là qui nous pèse ou qui nous blesse ou qui nous peine,
37:32 et une fois qu'on l'a écrit, on tourne la page.
37:34 Et donc, après, on est prêt à écrire autre chose.
37:36 Donc oui, j'ai des carnets, j'en ai quelques-uns, où toutes les enquêtes les plus cocasses ou les plus incroyables ont leur place.
37:42 - Vous allez puiser, justement, dans cette expérience de terrain, dans ces carnets pour nourrir les intrigues.
37:46 Vous avez aussi fait de l'humanitaire, dans votre ouvrage "Entre deux mondes",
37:50 vous avez décidé de raconter la jungle de Calais.
37:52 Quel est le but de tout ça ? C'est quoi ? Vous êtes dans une forme de plaidoyer ?
37:56 Le roman, le polar, c'est un levier pour dénoncer ?
38:00 - Le polar, le roman noir, en tout cas, il a toujours été sociopolitique,
38:04 et, bien évidemment, les deux mots veulent dire la même chose.
38:06 En fin de compte, le roman policier, c'est une escroquerie séculaire.
38:08 Il y a un flic, un assassin, à la fin, le flic arrête l'assassin.
38:11 L'assassin, c'est la personne trahie, la personne amoureuse, celui qui n'a pas eu l'héritage, ou un serial killer.
38:16 Ça y est, on a fait le tour, c'est assez rapide, en moins de 20 secondes.
38:19 Donc moi, ce que je cherche, c'est des sujets métas, en fait.
38:21 C'est grâce à l'outil "Enquête de police", qu'est-ce que je vais pouvoir aborder comme sujet un peu plus important ?
38:26 Donc, métas.
38:27 La jungle de Calais.
38:29 Donc, j'ai découvert que, dans les camps de réfugiés, la police n'intervenait jamais.
38:33 Ça, je l'ai découvert aussi pendant mes missions humanitaires.
38:35 Et donc, j'ai découvert, en fin de compte, un endroit où on peut tuer sans aucune conséquence.
38:38 Et, intégrer dans un camp de réfugiés une enquête de police, ça me permet d'écrire 500 pages sur la jungle de Calais.
38:43 500 pages que vous n'auriez pas lues si vous aviez dit "Voici un essai de 500 pages sur la jungle de Calais".
38:48 Et à la fin, l'air de rien, vous avez quand même lu 500 pages sur le mouvement migratoire,
38:52 notre manière d'accueillir les réfugiés.
38:55 Vous n'y attendiez pas, vous ne le vouliez pas.
38:57 C'est une bonne manière de dénoncer.
38:58 Mais par le ludique, c'est possible.
39:00 Vous avez suivi le débat que nous avons eu autour de la police.
39:03 Bien sûr, avec beaucoup d'intérêt.
39:04 Je m'adresse à l'ancien policier que vous êtes, peut-être encore à l'actuel,
39:07 puisque vous avez gardé cette âme de gardien de la paix.
39:11 Dans la réalité, la police n'a pas toujours bonne presse.
39:13 Surtout, chez les jeunes, seuls 60% des 18-24 ans ont confiance en France, en la police.
39:19 Comment est-ce que vous expliquez cette fracture ?
39:22 Je pense qu'il y a une erreur, surtout.
39:25 Je pense que personne ne s'intéresse aux trains qui arrivent à l'heure,
39:27 et donc on fait un papier sur un train qui arrive en retard.
39:29 Personne ne s'intéresse aux 100, 50, 6 000 policiers qui font correctement leur travail.
39:34 Ce qui est intéressant, c'est la marge.
39:36 Ce qui va faire que je vais allumer ma télé, c'est quand on va me parler de la marge,
39:39 de quelque chose qui est hors de mon quotidien, parce que mon quotidien, je le vis déjà.
39:42 Donc, si on ne parle que de choses de la marge, on va parler des policiers ripoux.
39:46 Ou on va parler de ces jeunes dans les cités qui caillassent et qui brûlent des voitures.
39:50 Mais on ne va pas parler de tous les autres policiers qui font correctement leur travail.
39:53 On ne va pas parler de toutes ces initiatives,
39:55 de tous ces jeunes qui s'en sortent très bien en banlieue.
39:58 On ne va parler que de la marge.
39:59 Mais si on ne parle que de la marge, au fur et à mesure,
40:02 si on le répète et on le répète, ça devient une généralité.
40:05 Et cette généralité devient une réalité.
40:07 Et en fait, en fin de compte, ce n'est pas du tout la réalité.
40:10 On a un miroir déformant aujourd'hui de cette réalité.
40:13 Tout à fait. Je pense que c'est complètement faux.
40:14 Je pense que les gens, justement, aiment leur police.
40:16 Et que si on vous pose la question "Est-ce que vous aimez la police ?"
40:18 on a très envie de dire non.
40:20 Mais si on pose la question différemment,
40:22 "Est-ce qu'un jour la police a été nocive pour vous ?"
40:24 Et citez-moi ce moment.
40:25 Les gens sont un peu plus interdits.
40:27 Les gens sont un peu plus embêtés.
40:28 Parce qu'effectivement, c'est la marge.
40:30 Alors, avant cette émission, Olivier Norek,
40:32 nous réunissons 10 Européens autour d'une table virtuelle.
40:36 Parmi eux, sur le thème qui nous occupe,
40:38 Peter Lindström, il est chercheur et professeur à l'université Linnaeus en Suède.
40:43 On l'écoute.
40:44 Je pense que l'on devrait arrêter de regarder des séries scandinaves sur les crimes à la télé.
40:50 Arrêter de consommer toutes ces fictions sur nos vies.
40:54 Et profiter de la vie plutôt.
40:56 De la société telle qu'elle est.
40:59 On consomme trop de séries criminelles et après on a peur.
41:03 C'est la réalité.
41:05 Finalement, Olivier Norek, avec vos polars, avec vos séries,
41:10 vous participez du sentiment d'insécurité qui croît dans la population ?
41:13 Merci beaucoup.
41:15 Reprenons les propos de Peter, si je ne me trompe pas.
41:18 Il a raison, effectivement.
41:20 On reparle à nouveau de la marge.
41:21 C'est-à-dire que si la production scandinave nous sort 200, 300 romans policiers par an,
41:27 alors on a l'impression que justement, dans ces pays,
41:30 Islande, Norvège, Finlande, c'est catastrophique.
41:33 Alors que j'ai fait une table ronde avec Arnaldur Hindridsson,
41:36 qui est un des plus grands auteurs de polars en Islande,
41:39 qui me disait justement, toi Olivier, c'est facile pour toi.
41:42 Tu ouvres le journal, des crimes, il y en a partout dans ton 93,
41:44 tu as juste à piocher.
41:46 Moi, j'ai un meurtre par an en Islande, pour de vrai, réellement.
41:49 Donc je suis obligé d'inventer toutes mes horreurs.
41:52 Alors on pense effectivement que le Nord de l'Europe est hyper criminel,
41:54 alors que non, pas du tout.
41:55 C'est le concept de marge, de généralité, de réalité.
41:57 Alors, on le voit partout sur nos écrans,
42:00 on a eu Sherlock Holmes, on a eu Hercule Poirot,
42:02 on a eu Columbo, on a eu le flic de Beverly Hills,
42:05 on a eu l'inspecteur d'Eric, des flics à l'écran,
42:08 il y en a eu des pelletés.
42:11 Comment vous expliquez que nos imaginaires soient à ce point façonnés
42:15 par cette figure du flic ?
42:16 Pourquoi on fantasme autant cette personne-là ?
42:20 C'est un peu comme le pompier, c'est un peu comme le militaire,
42:23 c'est le gars ou la nana qui va quand nous on n'y serait pas allés.
42:26 C'est celui qui a le courage de revêtir son gilet pare-balles,
42:29 de prendre son arme et de se dire tous les matins,
42:32 peut-être que ce soir je ne rentrerai pas.
42:34 Ce n'est pas anodin, ce n'est pas commun de décider d'avoir un métier
42:36 qui peut être mortel.
42:38 Et parce qu'il y a ce concept assez héroïque,
42:42 on regarde, ça nous intéresse.
42:45 Mais de tout ce que vous avez cité, c'est assez intéressant
42:47 parce qu'il y a aussi le panel de l'être humain,
42:49 il y a d'Eric qui va à peu près à 2-3 km/h
42:51 et le flic de Beverly Hills qui lui va entre 300 et 400 km/h.
42:54 On peut s'identifier à n'importe quel flic
42:56 et on a besoin de toutes ces images de policiers,
42:58 toutes ces images de héros, pour se dire que nous aussi,
43:00 un jour, si on le décidait, on pourrait devenir un héros.
43:02 Olivier Norek, et ce sera ma dernière question,
43:04 vous dites que les Polars et le roman noir sont des livres d'histoire en avance,
43:07 ça veut dire quoi ?
43:09 Ça veut dire que pour ne pas se cannibaliser,
43:11 pour ne pas à chaque fois raconter la même histoire,
43:13 on est obligé d'être au plus proche du quotidien.
43:16 C'est-à-dire que dans les bouquins de demain,
43:18 il va y avoir des policiers, des victimes, des suspects
43:20 qui vont porter des masques, on va parler de Notre-Dame qui brûle,
43:22 on va parler du réchauffement climatique, c'est déjà le cas.
43:25 On est obligé de s'intéresser au quotidien, justement,
43:27 pour apporter de la nouveauté.
43:29 Et puisqu'on parle du quotidien, alors on ne sera jamais aussi proche du lecteur
43:32 et c'est pour ça, en fin de compte, que le Polar,
43:34 c'est ce qu'on consomme le plus à la télévision et dans les romans.
43:38 Alors, j'ai une vraie dernière question.
43:40 Allez-y.
43:42 Qu'est-ce que vous en pensez, justement, vous,
43:44 de tous ces débats autour de la police ?
43:46 Qu'est-ce que ça vous inspire en tant qu'ancien policier ?
43:48 La réalité de la police n'est jamais très loin de la réalité politique
43:52 et ce qui m'ennuie un peu, c'est de voir que ces débats se lancent à chaque fois,
43:55 en fin de quinquennat pour relancer un nouveau quinquennat
43:58 ou en début de quinquennat pour prévenir tout le monde que vous avez eu raison de m'élire.
44:00 Je pense que cette technique d'aller de colloque en colloque,
44:04 de réunion en réunion et de Grenelle en je-sais-pas-quoi et de numéro vert,
44:08 on parle beaucoup et il y a assez peu d'actes parce qu'en fin de compte,
44:11 la plupart des questions, on a les réponses.
44:13 C'est à peu près ce qu'il faut faire.
44:14 C'est juste la capacité de mettre le budget là où il le faut
44:17 et de mettre les efforts là où il les faut.
44:18 Et merci beaucoup.
44:19 Merci à vous.
44:20 Olivier Norek, je rappelle, dans les brumes de Kaplan s'est paru,
44:23 chez Michel Lafoncette à lire absolument.
44:26 Voilà, 27, c'est fini, mais comme vous le savez,
44:28 notre grande consultation continue.
44:30 Vous êtes très nombreux à y participer et merci pour cela.
44:32 Dans les prochaines semaines, nous discuterons 5G, gaz russe
44:36 ou encore sport et politique.
44:38 Vous avez envie de débattre, alors écrivez-nous.
44:40 27, c'est fini sur cet écran, mais ça continue sur tous les autres.
44:43 Alors n'hésitez pas à réagir et à commenter sur les réseaux sociaux.
44:46 Très belle semaine à tous.
44:47 Tchuss !
44:48 [Musique]
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