Parlons Vrai chez Bourdin avec Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS), Flavien Neuvy, directeur de l’Observatoire Cetelem, Dominique Vérien, sénatrice centriste, Maître David Fridman, spécialiste des cas de victimes de violences conjugales, Violaine De Filippis-Abate, porte-parole de l’association “Osez le féminisme”, Maître Nathalie Tomasini, spécialiste des cas de victimes de violences conjugales, milite pour l’inscription du féminicide dans le Code Pénal.
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00:00:00 Sud Radio Parlons Vrai chez Bourdin, 10h30, midi 30. Jean-Jacques Bourdin.
00:00:06 Il est 10h30, merci d'être avec nous, c'est un plaisir de vous retrouver tous les matins pour deux heures d'émission, vous le savez, Parlons Vrai chez Bourdin.
00:00:14 Ça veut dire que vous allez téléphoner, je l'espère, à 0826 300 300 parce qu'on a besoin de votre parole.
00:00:20 Bonjour à toutes et à tous, merci donc d'être avec nous pour téléphoner, vous connaissez le numéro 0826 300 300.
00:00:27 Nous aurons beaucoup d'invités ce matin et de nombreux sujets d'actualité que nous allons traiter en direct, toujours en direct, l'Ukraine et la Russie.
00:00:35 Joe Biden rencontre les neuf dirigeants des pays d'Europe centrale et de l'Est, membres de l'OTAN,
00:00:41 et réitère le soutien indéfectible de Washington face à Moscou, nous allons en parler, à l'ONU.
00:00:48 Projet de résolution soulignant l'attachement à l'intégrité territoriale de l'Ukraine et exigeant le retrait immédiat des forces russes,
00:00:56 explication analyse dans un instant avec Bruno Tertrey qui est directeur adjoint de la Fondation pour la Recherche Stratégique.
00:01:03 Le livret a plus de 9 milliards d'euros déposés par les Français au mois de janvier, c'est un record depuis 14 ans.
00:01:12 Et parallèlement, inflation toujours, l'association 60 millions de consommateurs affirme qu'il y aura un pic d'inflation à 15% en juin,
00:01:22 explication tout à l'heure dans notre journal jusqu'à 11h.
00:01:27 Les violences conjugales, faut-il créer une justice spécialisée ?
00:01:32 Débat entre 11h et midi sur l'antenne de Sud Radio, les condamnations pour violences conjugales sont en forte hausse.
00:01:40 A 12h05, je recevrai Claude Ardide qui est journaliste et auteur d'une longue enquête passionnante au cœur de la brigade des mineurs de Marseille.
00:01:49 Titre de son livre "Les enfants du purgatoire" aux éditions de l'Observatoire.
00:01:54 Mais comme tous les jours, dans quel monde vit-on ?
00:01:57 La chronique, le rendez-vous de Félix Mathieu, nous partons pour l'Espagne.
00:02:02 L'Espagne qui a commandé 31 trains, le problème c'est qu'ils se sont avérés trop grands. Félix ?
00:02:09 Heureusement, le constructeur s'en est aperçu juste avant de lancer la construction.
00:02:13 Mais les Espagnols ont frôlé la catastrophe industrielle. Ces 31 trains régionaux destinés au nord du pays avaient été commandés à l'entreprise espagnole CAF.
00:02:21 En juin 2020, commande à 258 millions d'euros tout de même.
00:02:26 Le scandale a été bruité il y a deux semaines, mais en réalité, le constructeur s'est rendu compte de l'erreur il y a quasiment deux ans.
00:02:32 En mars 2021, les dimensions fournies lors de l'appel d'offres n'étaient pas correctes avant même de démarrer la construction.
00:02:39 L'entreprise a donc averti les pouvoirs publics. Attention, vos trains ne passeront pas dans les tunnels.
00:02:44 De quoi causer un sacré contre-temps. Le temps de réajuster tout ça. Les futurs trains arriveront en 2026 et non pas 2024.
00:02:51 Comme prévu, initialement polémique, désormais politique.
00:02:55 L'opposition accuse le gouvernement d'avoir dissimulé la GAF pendant deux ans.
00:02:59 Les autorités régionales réclament une compensation financière, même si la compagnie ferroviaire affirme que les pertes sont limitées.
00:03:05 Finalement, le président de la compagnie, la RENF, vient de présenter sa démission, tout comme la secrétaire d'état aux transports,
00:03:12 la numéro 2 du ministère, qui était aussi l'ancienne présidente du gestionnaire de réseau.
00:03:17 Oui, en France, on se souvient des trains commandés par la région Centre qui n'entraient pas dans les gares,
00:03:23 qui n'arrivaient pas à passer entre les quais.
00:03:25 Ils étaient trop larges.
00:03:26 C'était une commande à bombardier, je crois, aux fabricants de rames.
00:03:30 Il est 10h33, merci d'être avec nous. Bien. La guerre entre l'Ukraine et la Russie.
00:03:36 Bruno Tertrais, bonjour.
00:03:37 Bonjour.
00:03:38 Quelle intense activité diplomatique depuis hier.
00:03:40 Nous avons eu le discours de Vladimir Poutine, nous avons eu le discours de Joe Biden,
00:03:44 nous avons maintenant Joe Biden qui est en Pologne et qui reçoit, qui rencontre,
00:03:50 les neuf dirigeants des pays d'Europe centrale et d'Europe de l'Est qui sont membres de l'OTAN.
00:03:58 Nous avons hier Mélanie, la première ministre italienne qui était à Kiev.
00:04:03 Nous avons eu un discours de Zelensky.
00:04:05 Nous avons une réunion à l'ONU.
00:04:08 Intense activité diplomatique en ce moment.
00:04:12 On va commencer avec Biden, si vous voulez bien.
00:04:14 Biden qui est donc à Varsovie, qui rassure, qui est là pour rassurer,
00:04:19 pour réaffirmer le soutien des États-Unis à ces pays qui sont les plus inquiets,
00:04:25 ces pays de l'OTAN, pays de l'Europe de l'Est et de l'Europe centrale.
00:04:28 Bruno Tertrais.
00:04:29 Oui, et je dois dire que Biden a quand même réussi une très belle manœuvre diplomatique.
00:04:34 Vous vous souvenez de ce que disait Lionel Jospin à propos de Jacques Chirac ?
00:04:37 Il l'avait trouvé vieilli, usé, fatigué.
00:04:40 On disait beaucoup ça à propos de Biden.
00:04:42 Et cet homme, qui d'ailleurs va probablement se représenter à la présidence,
00:04:46 il surprend son monde avec un voyage, qu'il faut le redire, absolument historique.
00:04:52 C'est une marque de confiance pour un président américain d'aller dans un pays en guerre.
00:04:56 On n'a absolument jamais vu une marque de confiance envers l'Ukraine,
00:04:59 qu'on n'a absolument jamais vue.
00:05:00 Alors, la deuxième séquence, c'est la Pologne.
00:05:03 Et la Pologne, c'est en train de devenir ce qu'était un peu l'Allemagne au temps de la guerre froide.
00:05:07 C'est-à-dire l'avant-poste de l'Europe et du monde occidental.
00:05:12 Bien sûr, elle est protégée par l'Amérique,
00:05:15 mais les Polonais, comme les Pays-Bas, ils ont toujours besoin d'être rassurés.
00:05:18 Et là, Biden a dit "je serai toujours avec vous,
00:05:21 l'Amérique sera toujours avec vous".
00:05:22 - Plus que jamais, on mesure l'opposition entre les États-Unis et la Russie.
00:05:27 Là, maintenant, c'est clair.
00:05:29 - Oui, mais j'allais dire qu'on la sentait monter depuis une bonne dizaine d'années.
00:05:33 Voilà, et je crois vraiment que c'est la Russie qui a choisi
00:05:38 de provoquer quelque chose qui ressemble à une nouvelle guerre froide.
00:05:41 Et elle est chaude en Ukraine, bien sûr, mais pour le reste de l'Europe,
00:05:44 et pour l'Europe de l'Est, pour l'Europe orientale, c'est une forme de guerre froide.
00:05:48 Mais que voulez-vous, là c'est quelque chose qui aussi rend,
00:05:52 pour Vladimir Poutine, le mais dans un cadre intellectuel qu'il a bien connu.
00:05:56 Lui, il a grandi, c'est un homme de la guerre froide, Vladimir Poutine.
00:05:59 Et finalement, il y a une espèce de confort politique pour lui,
00:06:03 à se dire "ben voilà, c'est de nouveau le monde contre nous",
00:06:06 parce que lui, ça le conforte intérieurement.
00:06:09 Il peut dire "je suis un président en guerre, l'Occident a voulu nous attaquer",
00:06:12 parce que c'est ça son discours.
00:06:14 Donc ça a quelque chose de confortable pour lui,
00:06:16 malgré l'échec militaire qui pour l'instant est patent.
00:06:19 - Oui, sa rhétorique n'a pas changé.
00:06:21 Là encore, revenons sur le discours de Vladimir Poutine hier,
00:06:25 sur le discours de Joe Biden hier également.
00:06:29 La rhétorique de Vladimir Poutine n'a pas changé,
00:06:31 on n'a pas été très surpris par ce qu'il a dit lors de ce discours.
00:06:35 Finalement, Joe Biden, on n'a pas été surpris non plus
00:06:39 par le discours de Joe Biden.
00:06:41 La situation est figée aujourd'hui.
00:06:43 Elle est figée militairement, elle est figée diplomatiquement.
00:06:47 - Elle l'est d'autant plus que Vladimir Poutine a coupé le dernier lien
00:06:51 qui reliait l'Amérique à la Russie,
00:06:54 le dernier canal de dialogue qui est celui du contrôle des armements nucléaires.
00:06:58 On disait beaucoup au temps de la guerre froide que,
00:07:00 d'accord, il y avait cette rivalité entre deux blocs,
00:07:03 mais au moins, avec cette affaire de maîtrise des armements nucléaires,
00:07:08 on avait un canal de discussion permanent
00:07:10 qui pouvait d'ailleurs servir à d'autres choses aussi.
00:07:12 Et là, Vladimir Poutine dit "Bah non, moi je suspends ma participation à ce processus".
00:07:17 - A cet accord signé en 2010.
00:07:21 - Oui, alors ça ne veut pas dire qu'on va repartir.
00:07:23 - Non, parce que les Russes, eux, quand même, ont précisé
00:07:26 Moscou continuera à respecter la limitation de son arsenal.
00:07:29 Ils ont tenu à...
00:07:31 C'est le ministère des Affaires étrangères russe
00:07:33 qui a donné cette précision dans l'après-midi.
00:07:36 - Elle n'est pas inutile, parce que ça veut dire qu'on ne va pas se diriger
00:07:39 à une nouvelle course aux armements nucléaires
00:07:41 comme c'était le cas au temps de la guerre froide.
00:07:43 - Bien sûr, bien sûr.
00:07:44 - Mais c'est quand même symbolique, et puis ça a une portée,
00:07:47 puisque, encore une fois, c'était le dernier canal de discussion permanent
00:07:50 entre Américains et Russes.
00:07:52 - Bien, suspension de la participation de la Russie à l'accord.
00:07:55 New start sur le désarmement nucléaire.
00:07:59 Emmanuel... Emmanuel... Vladimir Poutine
00:08:04 est passé à l'offensive contre un Occident qu'il juge dépravé.
00:08:08 Bon, là encore, cette rhétorique du discours, on la connaît,
00:08:12 on sait ce que veut Vladimir Poutine.
00:08:15 Vladimir Poutine qui est confronté quand même à une certaine difficulté.
00:08:21 J'ai été très intéressé par l'échange entre Prigojin,
00:08:27 le patron de Wagner, et le ministère russe de la Défense.
00:08:32 Vous avez vu ça, le haut commandement,
00:08:34 Prigojin reprochant à l'armée russe de ne pas lui fournir
00:08:39 le matériel nécessaire pour se battre,
00:08:41 et l'armée russe répondant assez sèchement à Prigojin.
00:08:45 Vous avez remarqué comme moi cela, Bruno Tertrais ?
00:08:49 - Oui, tout à fait. D'abord, un mot sur le discours de Poutine.
00:08:52 Juste pour dire que moi, ce qui m'a frappé,
00:08:54 c'était quasiment un discours soviétique.
00:08:56 Il y avait des passages, on entendait "nous avons réussi
00:09:00 à atteindre nos objectifs de production de céréales, d'acier",
00:09:03 on avait l'impression d'être dans les années 1970.
00:09:06 Alors, sur Prigojin, les milices Wagner,
00:09:09 elles sont très utiles pour le Kremlin,
00:09:12 et en même temps, il ne faut pas qu'elles prennent trop de place non plus,
00:09:14 parce que si elles arrivent à montrer ou si elles donnent le sentiment
00:09:17 qu'elles sont plus efficaces que l'armée régulière,
00:09:20 c'est un camouflet pour Vladimir Poutine lui-même.
00:09:23 Donc, il y a cette espèce de jeu un petit peu compliqué
00:09:27 entre Prigojin, Choygou, le ministre de la Défense,
00:09:30 et Gerasimov.
00:09:32 Et Poutine qui se tient un petit peu en arbitre.
00:09:35 Il y a une part de théâtre dans tout cela,
00:09:39 mais très clairement, ce qui compte, c'est que,
00:09:41 oui, les milices sont importantes pour la Russie aujourd'hui en Ukraine,
00:09:45 parce qu'elles réussissent mieux, entre guillemets,
00:09:47 avec d'énormes pertes humaines que l'armée classique.
00:09:52 Oui, Prigojin est quelqu'un qui compte,
00:09:54 mais c'est quand même quelqu'un qui n'est pas prêt,
00:09:57 il ne faut pas dire que ça va être le successeur de Poutine
00:09:59 et qu'il va renverser Poutine du jour au lendemain.
00:10:01 Non seulement ça, mais Prigojin,
00:10:03 dans tous les cas, on n'a pas vu Kadirov hier dans l'assemblée
00:10:06 qui assistait au discours de Poutine,
00:10:09 c'est très très important.
00:10:11 Il n'était pas là.
00:10:12 Ça veut dire que quand même,
00:10:14 Poutine laisse à l'écart et Prigojin et Kadirov.
00:10:19 Et n'oublions jamais l'importance de l'armée russe autour de Poutine.
00:10:28 Ils sont là et ils sont un peu les gardiens du temple.
00:10:31 Oui, mais ce n'est pas seulement l'armée,
00:10:33 c'est l'ensemble de ce qu'on appelle les civilisations.
00:10:35 C'est l'ensemble des services de sécurité.
00:10:38 Tous les gens qui ont des armes, on va refaire ça.
00:10:40 Et là, en grand classique des régimes autoritaires,
00:10:43 Poutine a organisé la rivalité entre ces services.
00:10:47 Ce que craint le plus un dictateur,
00:10:49 c'est un jour d'être renversé par l'armée ou les forces de sécurité.
00:10:52 Alors heureusement, en Russie, il n'y a pas de tradition de coup d'État militaire,
00:10:56 mais cette compétition entre services de sécurité divers et variés,
00:11:01 organisations qui ont des hommes en armes,
00:11:03 c'est un classique des régimes autoritaires.
00:11:05 Et aujourd'hui, avec la guerre en Ukraine, elle bat son doigt.
00:11:07 Vladimir Poutine devra tenir compte des remarques
00:11:10 de Gerasimov et de son ministre de la Défense.
00:11:13 Même s'ils sont alignés pour l'instant sur les positions de Vladimir Poutine,
00:11:17 mais si un jour il y a peut-être mouvement au sein même de la Russie
00:11:22 et au sein même du pouvoir russe, ça pourrait peut-être venir de l'armée.
00:11:26 Bon, on ne va pas épiloguer ni penser à ce que sera l'avenir.
00:11:30 Moi, ce qui m'intéresse aussi, c'est cette réunion de l'ONU qui commence aujourd'hui.
00:11:34 Alors, la Russie évidemment s'insurge contre la décision de l'ONU sur l'Ukraine.
00:11:41 Que se passe-t-il à l'ONU ?
00:11:43 Il y a une résolution.
00:11:45 L'Ukraine et ses partisans espèrent renforcer l'isolement diplomatique de la Russie
00:11:50 en cherchant à obtenir des votes positifs.
00:11:53 Sur quoi ?
00:11:54 Eh bien, l'Assemblée Générale de l'ONU, composée, on le rappelle, de 193 membres,
00:12:00 doit voter, je pense avant la fin de la semaine, je crois que c'est demain ou après-demain,
00:12:05 doit se prononcer sur un projet de résolution
00:12:08 soulignant la nécessité de parvenir dans les meilleurs délais
00:12:12 à une paix globale, juste et durable.
00:12:16 Et qu'exige cette résolution ?
00:12:19 Le retrait des troupes russes du territoire ukrainien,
00:12:23 l'arrêt des hostilités.
00:12:26 Retrait des troupes russes, arrêt des hostilités,
00:12:29 évidemment Moscou ne peut pas accepter cela.
00:12:33 Chacun va se compter.
00:12:35 Absolument, chacun va se compter.
00:12:36 Ce n'est pas tellement la portée, la force juridique de cette résolution qui compte.
00:12:42 C'est la force politique.
00:12:44 Il faut quand même rappeler que l'Assemblée Générale de l'ONU, c'est un peu le Sénat du monde.
00:12:49 C'est-à-dire chaque pays, les Kiribati ont la même voix que les États-Unis.
00:12:52 Ce qui va littéralement compter, c'est la comparaison avec la première résolution de l'Assemblée Générale de l'ONU, il y a un an.
00:13:03 Il y avait 141 pays qui avaient voté la résolution condamnant la Russie.
00:13:08 Sur 193.
00:13:10 C'est pour ça que quand on dit que l'Occident est isolé, les partisans des États-Unis et de l'Europe sont isolés,
00:13:17 il ne faut quand même pas exagérer.
00:13:20 141 pays, c'est quand même les trois quarts.
00:13:23 Il y en a beaucoup moins qui appliquent l'extinction.
00:13:25 C'est un autre sujet.
00:13:26 Donc là, il va falloir qu'on ait à peu près le même résultat.
00:13:29 Si on veut pouvoir dire à la Russie, le soutien que vous aviez dans une partie du monde est en train de s'effriter.
00:13:36 S'il y a 130 pays, ce sera une défaite politique pour les pays occidentaux.
00:13:42 S'il y en a 145, ce sera une victoire.
00:13:44 Vous voyez, ça a l'air symbolique, mais on est dans quand même quelque chose qui ressemble à une guerre froide politique
00:13:51 dans laquelle le monde est de nouveau un grand échiquier diplomatique sur lequel il faut compter ses soutiens.
00:13:58 Et ça compte, c'est moins important bien sûr que les victoires ou les défaites sur le champ de bataille,
00:14:04 mais dans la grande partie qui se joue, ce n'est pas mince.
00:14:07 Ce n'est pas mince.
00:14:08 Et nous nous serons attentifs aussi à ce que va déclarer la Chine.
00:14:12 L'ambassadeur chinois à l'ONU a déclaré hier aux journalistes que la Chine publierait probablement dans les jours qui viennent
00:14:19 un document de position sur l'Ukraine qui reflètera principalement les positions cohérentes de la Chine sur cette question.
00:14:28 On l'attend avec impatience ce document ?
00:14:30 Personnellement, je l'attends avec absolument aucune impatience.
00:14:33 Alors allez-y, Bruno Tertre.
00:14:34 Je peux déjà vous dire ce qu'il y aura.
00:14:37 Ça sera de l'eau tiède.
00:14:39 Oui, respect de la souveraineté, de l'intégrité territoriale de tous les pays, ça va être ça.
00:14:45 Oui, ça va être ça.
00:14:46 Et ça va s'inscrire dans ce que la Chine appelle sa doctrine de la sécurité globale.
00:14:51 Un mot dont on ne sait pas trop ce qu'il veut dire concrètement, mais ça veut dire que...
00:14:56 Qu'est-ce que cherche à faire la Chine ?
00:14:58 Non pas susciter une négociation en direct, encore moins être un médiateur.
00:15:02 D'ailleurs la Chine le dit, nous ne sommes pas médiateurs.
00:15:04 Exactement.
00:15:05 Voilà, ça c'est un message à tous ceux qui s'imaginaient, y compris en France, que la Chine pouvait être une sorte d'intermédiaire.
00:15:11 Non, ce que la Chine veut faire, c'est projeter une image d'elle-même qui est différente de celle de la Russie.
00:15:16 L'image d'un pays raisonnable, qui serait, contrairement à d'autres, moins pront à utiliser la force militaire,
00:15:24 qui cherche la paix dans le monde, les grands équilibres et la souveraineté de chaque État au monde.
00:15:30 C'est ça qu'elle cherche à faire. Elle ne se fait à mon avis aucune illusion sur ce que ce fameux texte,
00:15:36 cette fameuse initiative pourrait apporter concrètement au déroulement du conflit en Ukraine.
00:15:42 Dites-moi, je voulais revenir sur le traité New START.
00:15:48 Beaucoup disent "ça y est, c'est une escalade nucléaire". Moi je ne vois pas où aller.
00:15:52 Non.
00:15:53 Y a-t-il escalade nucléaire ?
00:15:55 Non, y a pas d'escalade nucléaire. Premièrement, je le rappelle, ni les États-Unis ni la Russie ne veulent s'engager,
00:16:02 non les moyens d'ailleurs, non les moyens de s'engager dans une course aux armements nucléaires analogue à celle de la guerre froide.
00:16:09 S'il y a plutôt une montée des arsenaux, c'est plutôt du côté de la Chine qu'il faut la chercher d'ailleurs.
00:16:15 La Chine voudrait devenir une puissance nucléaire majeure.
00:16:19 Ce qui compte, c'est qu'avec cette suspension, la Russie dit "moi maintenant je fais ce que je veux".
00:16:25 Mais si vous voulez, c'est pas non plus...
00:16:27 Mais est-ce qu'on ne peut pas aussi comprendre la position russe quand les russes disent "mais attention,
00:16:31 sur le terrain nucléaire, on prend en compte les ogives américaines,
00:16:37 mais on ne prend pas en compte la puissance nucléaire de la Grande-Bretagne et de la France".
00:16:41 Alors ça c'est un très vieux sujet, c'était une obsession de la diplomatie soviétique pendant la guerre froide.
00:16:46 En gros, ils disaient "attendez, on ne peut pas mettre d'un côté l'Amérique, de l'autre côté l'Union soviétique,
00:16:53 puisque vous avez en plus les Français et les Britanniques".
00:16:57 Ce à quoi les Français et les Britanniques répondaient régulièrement et continueraient.
00:17:01 "Attendez, pas du tout, nous sommes souverains, notre décision de faire quoi que ce soit dans le domaine nucléaire
00:17:07 n'est pas soumise au veto de Washington".
00:17:09 C'est un très vieux débat, et là encore je vous parlais du discours de Vladimir Poutine
00:17:13 qui me rappelait l'Union soviétique sur le côté, la production de blé, la production d'usines, ceci.
00:17:18 Là, encore une fois, Vladimir Poutine reprend un discours soviétique.
00:17:22 Merci Bruno Tertrais d'être venu nous voir, directeur adjoint de la Fondation pour la Recherche Stratégique.
00:17:29 C'est "Explication analyse", vous savez, je préfère ça à tous les commentaires,
00:17:34 des commentaires qui parfois nous conduisent.
00:17:37 Alors si on reprenait tout ce qui a été dit depuis février, depuis le 22 février, 24 février 2022,
00:17:43 on sera un peu surpris.
00:17:45 Mais enfin bon, il est 10h48, merci d'être avec nous.
00:17:48 Dans un instant je vais changer totalement de sujet.
00:17:50 Nous allons parler du livret A, plus de 9 milliards d'euros déposés par les Français en janvier.
00:17:55 C'est un nouveau record, depuis 14 ans on n'avait pas vu ça.
00:17:58 Et puis de l'inflation aussi, puisque 60 millions de consommateurs prévoient un pic d'inflation en juin prochain.
00:18:05 Il est 10h48.
00:18:06 - Bien, il est 10h51, nous allons parler d'inflation, nous allons parler d'épargne,
00:18:12 parce qu'il y a quand même des paradoxes dans ce pays.
00:18:15 Voilà une France qui souffre de l'inflation, une bonne partie de la France, vous êtes de ceux-là, 0,826, 300, 300,
00:18:23 les prix montent, vous le voyez au quotidien.
00:18:25 Et puis il y a une autre France, celle qui épargne, qui malgré l'inflation épargne.
00:18:30 Et je donne le chiffre qui est faramineux, 9 milliards d'euros déposés par les Français en janvier sur l'épargne, sur les livrets d'épargne.
00:18:39 C'est un record depuis 14 ans.
00:18:41 Avec nous, Flavien Neuville qui est directeur de l'Observatoire CTLM.
00:18:44 Flavien Neuville, bonjour.
00:18:46 - Bonjour Jean-Jacques Bondart.
00:18:47 - Est-ce que ce chiffre vous surprend, Flavien Neuville ?
00:18:51 - Alors disons qu'on est dans un contexte de hausse des taux d'intérêt,
00:18:55 c'est vrai que le taux du livret A a beaucoup augmenté.
00:18:58 - 3% hein ?
00:18:59 - Voilà, c'est ça.
00:19:00 Et donc du coup, les gens qui avaient des liquidités disponibles,
00:19:02 et c'est vrai qu'avec le Covid, les Français ont accumulé quand même pas mal de liquidités disponibles,
00:19:07 orientent ces liquidités vers ce qui rémunère le plus, les livrets d'épargne, en tout cas c'est sans risque.
00:19:12 Et donc du coup, c'est ce qui explique pourquoi on a ce pic-là.
00:19:15 Néanmoins, on a un taux d'épargne qui reste très élevé, autour de 15% des revenus.
00:19:19 Et c'est vrai que c'est un peu une spécificité française,
00:19:22 on a un taux d'épargne qui est parmi les plus élevés d'Europe derrière l'Allemagne.
00:19:25 - Ouais, derrière l'Allemagne, il est l'un des plus élevés du monde,
00:19:28 bon, loin derrière le Japon qui est le champion en la matière,
00:19:31 mais tout de même, tout de même, hein, Favien Neuville.
00:19:35 Alors, les Français arrivent toujours à épargner,
00:19:38 attention, hein, pas tous les Français, certains Français arrivent à épargner,
00:19:43 et d'autres ont des difficultés chaque mois, chaque fin de mois, et même en début de mois parfois, hein.
00:19:49 - Oui, c'est ça, c'est-à-dire que c'est pas homogène, si vous voulez, tout le monde ne met pas de l'argent de côté.
00:19:53 Il faut rappeler que la hausse des prix, l'inflation, ne touche pas tous les Français de la même manière.
00:19:58 Ce sont les Français qui ont les revenus les plus faibles, qui sont les plus touchés,
00:20:01 parce que ce qui augmente le plus en ce moment, ce sont les prix de l'alimentaire,
00:20:04 et le poids des dépenses alimentaires est beaucoup plus important chez les ménages modestes.
00:20:08 Et donc ces ménages-là ont déjà du mal à boucler les fins de mois,
00:20:12 et évidemment, ils ont encore beaucoup plus de mal à mettre de l'argent de côté.
00:20:16 Et à l'inverse, ceux qui ont les revenus les plus élevés,
00:20:18 eux ont la possibilité de mettre de l'argent de côté,
00:20:20 et c'est ce qui explique pourquoi on a un taux d'épargne global qui est assez élevé,
00:20:23 mais c'est pas du tout homogène entre les Français.
00:20:25 - Flavien, nous allons prendre Jean-Louis, qui est dans les Bouches-du-Rhône et qui témoigne.
00:20:28 Bonjour Jean-Louis.
00:20:29 - Oui, bonjour.
00:20:31 - Bonjour, merci vraiment d'être avec nous, Jean-Louis.
00:20:34 - Non, y'a pas de soucis, c'est toujours des émissions intéressantes,
00:20:37 même si je suis pas toujours d'accord avec les intervenants, mais c'est comme ça.
00:20:39 - Mais c'est comme ça, ça, c'est normal. Moi non plus, je suis pas toujours d'accord.
00:20:42 Mais bon, qu'est-ce que vous voulez, c'est comme ça.
00:20:44 Mais au moins, on débat et on s'exprime.
00:20:47 - Exactement.
00:20:48 - Vous ressentez l'inflation, Jean-Louis ?
00:20:50 - Ah bah oui, c'est énorme, parce que, je veux dire, ne serait-ce que sur l'alimentaire,
00:20:54 on peut imaginer que le caddie, grosso modo, a pris 10 et 15%
00:21:02 entre la viande, le poisson, les choses comme ça,
00:21:04 on y va vraiment au compte-gouttes, quoi.
00:21:06 C'est pas possible entre ça et l'énergie.
00:21:08 - Vous faites vos courses autrement, Jean-Louis ?
00:21:10 - Je fais mes courses, moi, toujours en proximité.
00:21:13 - Oui.
00:21:14 - J'ai pris cette habitude où j'habite, je vais chez mon primeur à proximité,
00:21:19 parce que lui, il joue le jeu.
00:21:20 - Oui, comme moi, comme moi.
00:21:21 - Il fait pas mal de promotions, il fait pas mal de choses intéressantes.
00:21:24 Et après, on est obligé d'aller quand même sur certains supermarchés,
00:21:28 et qui, je pense, profitent quand même pas mal de la conjoncture.
00:21:34 Encore parenthèse, c'est pas toujours très équitable, c'est pas toujours très justifié.
00:21:39 - Jean-Louis, est-ce que vous arrivez parallèlement à ces difficultés ?
00:21:42 Vous faites très attention au prix.
00:21:44 Est-ce que vous arrivez à épargner ?
00:21:46 - Alors, épargner, c'est un bien grand mot.
00:21:49 Je mets un petit peu d'argent de côté, parce que je suis un privilégié, on va dire, quelque part,
00:21:55 malgré que j'ai perdu des revenus de ministre.
00:21:58 Je suis un petit peu privilégié, je suis en retraite depuis pas longtemps.
00:22:02 J'ai la chance de ne pas avoir de loyer à payer.
00:22:06 - Ah, important.
00:22:07 - Donc, là, c'est très important.
00:22:09 Donc, ce qui me permet de mettre, on va dire, un petit peu d'argent de côté,
00:22:13 et de pouvoir aussi aider mes enfants, qui, eux, par contre, n'ont pas du tout la même configuration.
00:22:18 - Bien sûr.
00:22:19 - Et ça permet de...
00:22:20 - Mais Jean-Louis, je vais être indiscret, Livret A ?
00:22:23 - Alors, non, c'est pas vraiment Livret A, c'est une épargne que j'ai sur ma banque.
00:22:28 - D'accord.
00:22:29 - Bon, c'est un contrat qui vaut un peu pour Livret A.
00:22:31 Sachant que Livret A, en tout cas, quand on met de l'argent, là, oui,
00:22:34 c'est plus pour, on va dire, le mettre de côté sans y toucher que d'épargner.
00:22:38 Parce qu'avec 3% et avec une inflation à 15%, on perd de l'argent tous les mois, quoi.
00:22:42 - Oui, oui, oui, oui, oui, oui.
00:22:45 Bien, merci, merci, oui.
00:22:47 Enfin, pour trouver un placement à 15%, si vous le connaissez, vous me l'indiquez, hein, Jean-Louis.
00:22:53 - Bien sûr, bien sûr.
00:22:54 Une fois près, aller boursicoter dans les plateformes boursières,
00:22:57 et là, moi, je suis pas du tout là-dedans, quoi.
00:22:59 - Ah oui, bah, non, c'est sûr, vous avez raison.
00:23:01 Merci, Jean-Louis.
00:23:02 - Je vous en prie.
00:23:03 - Merci beaucoup.
00:23:04 Flavien Neuilly, est-ce que les Français, parallèlement à ça,
00:23:07 prennent de plus en plus de crédits à la consommation ?
00:23:11 - Non, la réponse est non.
00:23:13 Ils n'ont pas recours aux crédits.
00:23:15 On voit la production de crédits en France qui a beaucoup baissé sur ces 10 dernières années.
00:23:19 Le niveau de surdétentement, d'ailleurs, qui est à un niveau historiquement bas.
00:23:22 Mais par contre, ils font autre chose.
00:23:23 C'est-à-dire que pour s'adapter à ce contexte inflationniste très difficile à gérer,
00:23:27 d'abord, ils font des renoncements, et on vient de l'entendre, Jean-Louis l'a dit,
00:23:30 sur les produits alimentaires, par exemple, moins de viande, moins de produits frais.
00:23:33 Donc, il y a des renoncements.
00:23:35 Il y a l'utilisation aussi des circuits à discount et low cost qui sont très porteurs en ce moment.
00:23:40 Et puis, il y a aussi un phénomène qui monte en puissance année après année,
00:23:43 c'est le marché de l'occasion.
00:23:44 C'est-à-dire que les gens achètent plutôt des produits d'occasion parce que c'est moins cher.
00:23:47 Et ils revendent aussi par eux-mêmes des produits,
00:23:49 ce qui leur permet de faire rentrer un petit peu d'argent dans le budget familial,
00:23:53 parce que les biens qu'on a à la maison et qu'on n'utilise plus, ça vaut de l'argent.
00:23:57 Et donc, ce sont toutes ces façons, si vous voulez, de s'adapter
00:24:00 qui sont utilisées par les Français, qui sont très, très réactifs
00:24:03 et qui ne restent pas les bras ballants face à ce contexte inflationniste très difficile.
00:24:07 – Merci Flavien Neuville pour l'observation du comportement des Français.
00:24:13 Vous êtes directeur de l'Observatoire CET-LM, merci vraiment d'être avec nous.
00:24:17 Flavien Neuville, il est 10h57, c'est ainsi sur l'antenne de Sud Radio,
00:24:23 entre 10h30 et 12h00, vous témoignez, il y a des intervenants, tous en direct.
00:24:27 Tout le monde est en direct, je ne pourrais pas faire une émission qui ne serait pas en direct.
00:24:32 Et dans un instant, nous allons parler des violences conjugales.
00:24:36 Changer encore une fois complètement de sujet, faut-il créer une justice spécialisée ?
00:24:40 Le débat est en cours dans notre pays, débat donc entre 11h et 12h00 sur l'antenne de Sud Radio.
00:24:46 Il faut savoir que les condamnations pour violences conjugales sont en forte hausse en France.
00:24:51 [Générique]
00:24:57 – Bien, nous allons parler des violences conjugales entre 11h et 12h00.
00:25:00 Vous savez que tous les jours, nous ouvrons un dossier,
00:25:03 nous ouvrons un débat sur un sujet d'actualité, pourquoi les violences conjugales ?
00:25:09 Parce que ça va revenir dans l'actualité dans les jours qui viennent.
00:25:12 Je posais simplement la question pour ce débat,
00:25:16 faut-il mettre en place une justice spécialisée ?
00:25:19 Mais nous allons aller beaucoup plus loin évidemment que cette question,
00:25:22 parce que les violences conjugales méritent tant, tant d'attention.
00:25:27 Les violences conjugales, nos invités, nous avons avec nous,
00:25:32 Maître Nathalie Tomazini qui sera au téléphone tout à l'heure.
00:25:36 Nous avons avec nous Dominique Vérien qui est sénatrice centriste.
00:25:39 Bonjour Dominique Vérien, merci d'être avec nous.
00:25:41 – Bonjour.
00:25:42 – Vous travaillez sur un rapport, vous allez le rendre quand d'ailleurs ce rapport sur les violences conjugales ?
00:25:46 – Au plus tard fin mars.
00:25:47 – Au plus tard fin mars.
00:25:48 – Et quelques propositions pour la première ministre avant le 8 mars ?
00:25:51 – Eh bien nous allons parler de vos propositions,
00:25:53 que va reprendre peut-être Elisabeth Borne.
00:25:57 Avec nous est également Violaine de Philippe Sabat
00:26:00 qui est porte-parole de l'association Oser le féminisme.
00:26:03 Bonjour.
00:26:04 Et avec nous Maître David Friedman qui accompagne des victimes de violences conjugales.
00:26:08 Maître Friedman, bonjour.
00:26:09 – Bonjour.
00:26:10 – Merci d'être avec nous ce matin.
00:26:12 Alors, les violences conjugales, faut-il mettre en place une justice spécialisée ?
00:26:16 D'abord je voudrais revenir sur les chiffres tout simplement de 2022.
00:26:20 Je ne sais pas si nous avons les chiffres définitifs,
00:26:22 moi les chiffres que j'ai c'est 111 féminicides en 2022.
00:26:26 Est-ce que ce sont les bons chiffres ?
00:26:28 – Oui, j'avais un chiffre un peu plus élevé.
00:26:30 – Un peu plus élevé ?
00:26:31 – Alors, c'est toujours beaucoup trop.
00:26:33 – Oui, non mais ça on est bien d'accord.
00:26:35 111 féminicides, 15 homicides, il y a aussi des homicides,
00:26:39 ça existe par des compagnes ou ex-compagnes.
00:26:42 Il y a aussi des infanticides, ne les oublions pas,
00:26:45 parce qu'on parle de violences conjugales, n'oublions pas les enfants.
00:26:48 Il y a des matricides, il y a des parricides, il y a des fratricides,
00:26:54 et il y a des sororicides, ça existe aussi.
00:26:57 Il y en a eu trois, sororicides, en 2022.
00:27:02 Bien, alors regardons, faisons un premier tour de table, violences conjugales.
00:27:07 Je parlais de votre rapport, maître Dominique Vérien,
00:27:12 votre rapport, donc dans les premiers jours de mars,
00:27:15 vous allez rendre, après rapport, quelques propositions, lesquelles ?
00:27:21 – Non mais je suis direct, lesquelles ?
00:27:24 Normalement vous ne devez pas le dire.
00:27:26 – Je ne vais évidemment pas les dire,
00:27:27 puisque nous sommes seulement en train de les finaliser
00:27:31 pour les proposer à la première ministre.
00:27:33 Par contre, puisque votre question c'était, faut-il une justice spécialisée ?
00:27:36 Je peux déjà vous dire que nous allons vers, effectivement,
00:27:39 une spécialisation et à minima une équipe dédiée sur ces sujets-là,
00:27:43 autant en justice que ce qu'on voit qui se met déjà en place d'ailleurs,
00:27:47 en police, en gendarmerie, et des formations.
00:27:50 – Des équipes dédiées au sein des tribunaux.
00:27:52 – Des équipes dédiées au sein des tribunaux.
00:27:54 – Voilà, il n'y aura donc pas de justice spécialisée.
00:27:57 – C'est une justice spécialisée.
00:28:00 – Oui, ce serait en Espagne, on est bien d'accord.
00:28:03 – Ah mais parce que de toute façon,
00:28:04 notre fonctionnement n'est pas du tout le même que celui en Espagne.
00:28:07 Le procureur ne fonctionne pas comme le nôtre,
00:28:09 les juges ne fonctionnent pas comme les nôtres,
00:28:12 leurs juges fonctionnent un peu comme nos procureurs,
00:28:15 donc on ne peut pas tout à fait calquer.
00:28:17 Par contre, on peut s'en inspirer, et nous revenons d'Espagne,
00:28:20 nous venons d'y passer deux jours justement pour pouvoir aller regarder,
00:28:23 et donc nous allons nous en inspirer aussi dans nos propositions, c'est très clair.
00:28:28 Et donc si, on peut parler de justice spécialisée malgré tout,
00:28:31 puisque ce sera une chambre spécialisée qui mêlera aussi bien
00:28:36 un procureur spécialisé que un juge aux affaires familiales spécialisé,
00:28:40 éventuellement juge d'application des peines, juge des enfants,
00:28:44 donc une vraie équipe spécialisée qui ne traitera que de ça.
00:28:47 – Dédiée à ce sujet, on est bien d'accord.
00:28:51 Dans chaque juridiction.
00:28:53 – Dans chaque juridiction, et c'est là justement que c'est très important,
00:28:56 il faut absolument mailler le territoire,
00:28:58 parce qu'on se rend compte que la ruralité est plus lourdement touchée encore que les villes,
00:29:03 puisque 50% des féminicides ont lieu en ruralité,
00:29:06 alors que nous n'avons que 30% de la population en ruralité.
00:29:09 – Bon, donc chaque juridiction aura son équipe,
00:29:12 il va falloir, dites-moi, il va falloir des moyens pour ça ?
00:29:15 – Il va falloir des moyens, alors moi j'ai bien entendu…
00:29:17 – Des moyens de l'argent et puis des magistrats.
00:29:21 – J'ai bien entendu que le garde des Sceaux nous avait annoncé 300 magistrats nouveaux,
00:29:27 de plus par an sur les 5 ans qui viennent,
00:29:30 je pense qu'on devrait lui en subtiliser déjà un tiers sur ce sujet-là.
00:29:34 – Au moins 100 magistrats pour ce sujet.
00:29:38 – Au moins, on ne l'a pas encore estimé, je vous dis,
00:29:41 notre rapport on le remet vraiment fin mars,
00:29:43 et les premières propositions, donc on analysera plus finement,
00:29:47 mais on le sait, ça demandera des moyens, ça demandera des moyens en justice,
00:29:51 mais ça demandera aussi des moyens, on en parlait tout à l'heure,
00:29:55 en police, en gendarmerie, notamment sur les travailleurs sociaux en gendarmerie
00:30:01 ou les travailleurs sociaux en police,
00:30:03 où on a, on le sait, l'État qui finance 50%,
00:30:06 c'est la croix et la bannière pour faire financer les 50% restants,
00:30:10 et là on se rend compte que c'est tellement utile qu'on veillera à les faire financer.
00:30:14 – Alors, Violaine de Philippe-Issabat, qu'en pensez-vous ?
00:30:17 C'est insuffisant ou c'est suffisant, ou c'est prometteur ?
00:30:20 – Je dirais qu'il y a deux temps, le constat on est d'accord avec,
00:30:23 et je remercie madame la sénatrice d'avoir rappelé quelques chiffres très importants,
00:30:28 mais les solutions on n'est pas tout à fait d'accord, pourquoi ?
00:30:31 Et là je parle aussi en tant qu'avocate, militante du terrain,
00:30:34 les pôles spécialisés en réalité, c'est-à-dire une cohésion entre équipes,
00:30:38 ça existe dans les tribunaux aujourd'hui, c'est pas uniformisé,
00:30:42 et ça aurait le mérite, c'est sûr, d'uniformiser cette pratique.
00:30:46 – Je vous arrête, les magistrats ne feraient que ça, on est bien d'accord,
00:30:50 que ça, ils consacreraient tout leur temps,
00:30:53 parce que les dossiers sont tous très nombreux.
00:30:55 – Il y a des chambres déjà où des magistrats,
00:30:57 enfin il y a des chambres dans les juridictions où les magistrats…
00:30:59 – Je vous dis ça parce que, par exemple, je prends l'exemple d'Orléans,
00:31:02 5% des affaires sont des affaires de violences conjugales.
00:31:05 – Mais vous pouvez le dupliquer sur d'autres tribunaux,
00:31:08 c'est tout à fait l'ordre.
00:31:10 – Et on a donc des magistrats spécialisés, c'est ça en fait ?
00:31:12 – Oui, mais au-delà des magistrats spécialisés, si vous voulez,
00:31:14 c'est que depuis les années 2000, l'Espagne a mis en place
00:31:17 ces juridictions spécialisées.
00:31:19 J'entends bien que l'Espagne n'a pas notre modèle juridique,
00:31:21 je ne remets pas en question ça, et j'ai bien noté aussi
00:31:23 que vous aviez dit "à minima" des pôles dans les tribunaux,
00:31:27 donc peut-être plus, c'est ce que je vais vous expliquer, plus comment.
00:31:30 En réalité, des juridictions spécialisées, c'est-à-dire un tribunal dédié
00:31:34 aux violences intrafamiliales, ce ne serait pas que des mises en relation judiciaires,
00:31:38 ce seraient aussi des mises en relation avec les acteurs externes,
00:31:41 notamment, je vous donne l'exemple de ce qui existe à Bordeaux,
00:31:44 le COVA, qui est un centre d'accueil d'urgence des victimes,
00:31:46 qui fait aussi des expertises et des missions dans le cadre
00:31:50 de procédures judiciaires, mais pas que.
00:31:52 Ces acteurs-là devraient être approchés du système judiciaire,
00:31:56 c'est-à-dire qu'on devrait envisager la prise en charge des victimes
00:31:59 dans sa globalité, et non pas comme une mise en relation,
00:32:02 par exemple, du JAF, juge d'affaires familiales, avec le procureur,
00:32:05 mais bien dans une globalisation, c'est-à-dire dans un parcours
00:32:09 qui serait total, qui serait global.
00:32:12 Et pourquoi je vous dis ça ?
00:32:13 C'est parce qu'aujourd'hui, ça existe déjà, ces équipes dans certains tribunaux,
00:32:18 et la relation entre JAF et Parquet, elle existe déjà,
00:32:21 et le constat, c'est que ça ne suffit pas.
00:32:23 Donc même si on officialise demain et qu'on uniformie ces équipes,
00:32:26 il n'en reste pas moins qu'il ne va pas y avoir de changement.
00:32:31 Et je vous donne un exemple concret.
00:32:33 J'avais un dossier, un dossier vraiment terrible.
00:32:36 La jeune femme est désormais à l'hôpital,
00:32:39 elle a fait une rechute en anorexie.
00:32:41 Le JAF avait condamné son ex-conjoint à une ordonnance de protection
00:32:46 qui lui disait de ne pas s'approcher d'elle pendant une période déterminée.
00:32:49 Et pendant l'audience devant le JAF, il avait reconnu,
00:32:52 et c'est dans le jugement, dans l'ordonnance,
00:32:54 il avait reconnu qu'il avait eu des comportements
00:32:56 qui pouvaient s'apparenter à des violences sexuelles.
00:32:58 On va à la police pour la confrontation.
00:33:03 Dans le cadre de la confrontation,
00:33:05 la police, qui a cet élément dossier, qui a l'ordonnance du JAF,
00:33:08 dit "bon, vous avez reconnu les faits, etc."
00:33:11 sur le volet civil.
00:33:13 Et au volet pénal, eux étaient chargés de faire la confrontation,
00:33:17 ensuite de faire rapport au procureur.
00:33:19 Donc, partons de là, moi, effectivement, je dis à la police
00:33:21 "oui, il a reconnu les faits", son avocat dit "non, pas tout à fait".
00:33:23 Ça arrive que le procureur, en fin de journée, ce rapport,
00:33:26 classe sa suite.
00:33:28 Pourtant, le procureur était informé qu'il y avait eu des éclats.
00:33:31 - Et pourquoi ?
00:33:32 - Écoutez, j'aimerais bien le savoir,
00:33:33 j'ai toujours pas la copie de l'avis du classement.
00:33:35 Ce que je veux dire, c'est que même quand il parle entre eux,
00:33:37 il n'y a pas de formation, il n'y a pas de prise en charge globale.
00:33:40 - Bien.
00:33:41 - Le premier point, la première des choses,
00:33:44 parce que ça, depuis le départ, je le dis d'ailleurs
00:33:47 aux gardes des Sceaux et à qui veut bien m'entendre,
00:33:49 le premier des points, ce sera de toute façon la formation.
00:33:52 Pour éviter ce genre de choses.
00:33:54 Et ensuite, réellement, dans l'équipe dédiée,
00:33:56 on fait rentrer le procureur et on crée un lien plus fort.
00:34:00 Ça va nous demander quelques modifications législatives
00:34:02 et notamment pour pouvoir échanger des données
00:34:05 entre Jaffe et procureur,
00:34:07 puisque on sait bien que, par rapport au contradictoire,
00:34:09 tout n'est pas aussi simple que ça.
00:34:11 Mais on l'a bien en tête pour que ça avance.
00:34:14 Je suis d'accord sur le fait que ce classement sans suite
00:34:17 est absurde.
00:34:19 Mais, et probablement, ça manque de formation.
00:34:23 Avec un procureur spécial, enfin un procureur dédié,
00:34:27 un procureur vif, je pense qu'une telle chose ne serait pas arrivée.
00:34:30 - Ça permettra d'éviter, par exemple,
00:34:31 ces classes sans suite qui sont...
00:34:33 - Par ailleurs, je suis d'accord sur la globalité.
00:34:35 Sur le fait qu'il faut prendre vraiment les choses dans la globalité.
00:34:38 C'est-à-dire, et d'ailleurs, notre rapport,
00:34:41 on a vraiment voulu le faire, du signalement.
00:34:43 C'est-à-dire, comment on repère,
00:34:45 comment on aide la femme à pouvoir le dire,
00:34:48 parce que ça c'est très compliqué.
00:34:50 Jusqu'à la fin, le traitement et comment on l'aide
00:34:53 à se sortir de ce système, et surtout aux hommes à ne pas recommencer.
00:34:56 - Alors, je vais revenir sur tout ça,
00:34:58 à travers le témoignage de Faustine,
00:35:00 que nous allons prendre en ligne dans quelques instants,
00:35:02 après la pub.
00:35:03 Je rappelle certains points,
00:35:05 ensuite je vous donnerai la parole.
00:35:07 Je rappelle certains points.
00:35:09 Ce rapport, vous le travaillez avec la députée Émilie Chandler,
00:35:13 je voudrais le préciser.
00:35:15 Vous êtes sénatrice de Lyon, en ce qui vous concerne.
00:35:18 Vous êtes vice-présidente de la délégation
00:35:20 aux droits des femmes du Sénat,
00:35:22 et je crois que c'est bon de le préciser.
00:35:24 Je voudrais préciser aussi la promesse d'Emmanuel Macron.
00:35:26 Voilà ce qu'il disait.
00:35:28 Il souhaitait la mise en place d'un pôle juridictionnel spécialisé.
00:35:31 C'est ce qu'il souhaitait dans sa campagne présidentielle.
00:35:35 Je voudrais le rappeler également.
00:35:37 Et puis, les condamnations pour violences conjugales,
00:35:40 entre 2018 et 2021, sont passées de 22 949
00:35:44 à 43 725.
00:35:47 L'autorité parentale retirée est passée de 9 à 217,
00:35:52 à 187 en 2022.
00:35:55 Il y a aujourd'hui 954 bracelets anti-rapprochement actifs
00:36:00 en décembre 2022, décembre dernier,
00:36:03 et 64% des téléphones grave danger
00:36:07 sont actuellement attribués.
00:36:10 - Il y a un vrai progrès.
00:36:12 - Il y a un progrès, même si c'est encore insuffisant.
00:36:15 Mais il y a un progrès.
00:36:16 - Il faudrait regarder le quantum des peines quand même.
00:36:18 Il faudrait quand même s'intéresser à cette question.
00:36:20 Parce qu'effectivement, si les condamnations sont plus nombreuses,
00:36:23 il faudrait regarder si elles sont efficaces,
00:36:25 et quel est le quantum des peines dans le cadre des violences conjugales.
00:36:29 Parce que je trouve que c'est quand même insuffisant
00:36:31 et que ce n'est pas assez répressif.
00:36:33 - Alors maître, vous allez réagir après Faustine,
00:36:35 qui sera avec nous.
00:36:37 Il est 11h14, vous êtes sur Sud Radio,
00:36:39 qui sera avec nous dans deux minutes.
00:36:40 A tout de suite.
00:36:41 - Alors, il est 11h17.
00:36:42 Il y a des dizaines et des dizaines de milliers de victimes de violences conjugales.
00:36:46 Bon, heureusement, pas toujours le décès au bout de la violence.
00:36:52 Mais prenons Faustine, qui est avec nous.
00:36:55 - Bonjour.
00:36:56 - Bonjour Faustine.
00:36:57 - Bonjour, merci d'être venu me recevoir.
00:36:58 - Je vous en prie Faustine.
00:36:59 Faustine, vous êtes toute jeune.
00:37:01 Vous avez vécu avec un compagnon qui s'est avéré violent.
00:37:07 Racontez-nous.
00:37:08 - Alors, je voulais déjà tout d'abord vous remercier
00:37:12 d'accepter d'écouter ce témoignage.
00:37:15 Je voulais également signifier que je m'exprime en mon nom.
00:37:20 C'est mon vrai prénom, Faustine.
00:37:22 C'est un choix, parce que j'avais envie de montrer
00:37:25 à toutes les personnes qui nous entendent,
00:37:27 que ce soit des femmes ou des hommes,
00:37:29 qu'il n'y a aucune honte, premièrement,
00:37:32 d'avoir vécu finalement ces violences.
00:37:35 Il n'y a aucune honte.
00:37:36 Je voulais aussi vous montrer à travers mon profil
00:37:38 que la violence n'a pas du tout de religion,
00:37:41 elle n'a pas de statut social ou encore moins d'étiquette politique.
00:37:44 Parce que moi, j'ai été sensibilisée à ces questions.
00:37:47 J'ai préparé l'ENA, j'étais à Sciences Po.
00:37:50 Mon copain, mon ex-copain, était collaborateur au Sénat.
00:37:55 Mes parents sont médecins, donc un milieu privilégié.
00:37:59 C'est pour montrer que la violence,
00:38:01 ça peut vraiment arriver à n'importe quel moment dans un parcours.
00:38:05 Donc, il ne faut pas en avoir honte.
00:38:07 Pour vous expliquer ce climat de violence que j'ai vécu,
00:38:11 qui était mon calvaire pendant un peu plus d'un an,
00:38:14 ça commence toujours comme ça, les histoires d'amour,
00:38:18 par un amour partagé.
00:38:20 Ça a l'air très idyllique au début,
00:38:22 et puis ça se transforme en cauchemar.
00:38:24 Moi, ça a commencé par des violences très progressives
00:38:28 qui se sont exercées à l'encontre de mes chats.
00:38:31 J'ai deux chats, et je me suis rendue compte
00:38:33 qu'il y avait une caméra chez moi qui les frappait à coup de balai
00:38:36 quand je n'étais pas à mon domicile.
00:38:38 Et ensuite, à partir de son licenciement,
00:38:41 lorsqu'il a été licencié de son poste au Sénat,
00:38:44 il a commencé à me violenter.
00:38:46 Il me disait souvent, "Comme tes chats,
00:38:48 je déteste les personnes fragiles.
00:38:50 Ça me donne encore plus envie de les frapper."
00:38:52 Il me disait aussi beaucoup, "Tu ne mérites pas d'être frappée.
00:38:55 Tu me remercieras. Dans un sens, je t'ai renforcée.
00:38:58 Tu seras une femme forte maintenant."
00:39:00 Donc, ça a été des violences très psychologiques,
00:39:03 des dégradations quotidiennes,
00:39:06 comme on peut souvent les entendre,
00:39:08 "Tu es trop bête pour comprendre",
00:39:10 "Tu ne seras rien dans la vie",
00:39:12 des crachés au visage, des menaces de mort.
00:39:15 C'était mon quotidien.
00:39:17 Et puis, également, la nuit,
00:39:19 souvent, j'étais une sorte de buffet un peu humain.
00:39:23 Je dirais que c'est le mot qui décrit ma relation
00:39:26 avec mon ex-copain.
00:39:28 C'est-à-dire qu'il se servait à n'importe quel moment.
00:39:30 Donc, la nuit, quand il avait des pulsions,
00:39:33 il n'y avait pas de consentement, en fait, dans cette relation.
00:39:37 Voilà, pour être...
00:39:39 - Faustine, ça a duré combien de temps ?
00:39:42 - Alors, ça a duré...
00:39:44 Je l'ai rencontrée en septembre 2021.
00:39:47 Et je l'ai quittée.
00:39:49 Oui, parce que ça, je dois le dire,
00:39:51 c'est moi qui ai pris cette décision de le quitter
00:39:53 après une énième tromperie.
00:39:55 J'ai décidé de le quitter en novembre 2022.
00:39:57 Ça a duré un peu plus d'un an, je dirais un an et quatre mois.
00:39:59 - Vous étiez amoureuse ?
00:40:01 - Ah oui, très amoureuse.
00:40:03 Et d'ailleurs, c'est bien souvent ça, le problème.
00:40:05 Parce que c'est vrai que quand on est victime de violence,
00:40:07 on a souvent tendance à vous dire
00:40:10 "Mais pourquoi vous n'êtes pas partie ?"
00:40:11 Et c'est vrai que l'amour, malheureusement...
00:40:13 L'amour, parfois, va vous permettre de justifier un peu tout
00:40:16 et n'importe quoi.
00:40:18 Et ça, si je dois m'adresser à toutes les personnes
00:40:20 qui m'entendent et qui vivent ce que j'ai vécu,
00:40:23 c'est leur dire que l'amour ne ressemble jamais
00:40:26 à la violence.
00:40:27 Voilà, quand on aime quelqu'un, on ne veut pas lui faire du mal.
00:40:29 Et moi, c'est quelque chose qui...
00:40:31 C'était très difficile à accepter.
00:40:33 Aujourd'hui, je l'accepte.
00:40:35 L'amour et la violence ne vont pas ensemble.
00:40:37 - Comment a-t-il réagi au moment de la séparation ?
00:40:41 - Alors, étonnamment, il l'a plutôt bien pris.
00:40:44 Je l'ai bloqué sur tous les réseaux.
00:40:46 Je l'ai complètement...
00:40:48 - Il s'est rendu compte de son comportement ?
00:40:50 Il vous a parlé de son comportement ?
00:40:53 - Alors, son comportement, il se rendait compte
00:40:57 qu'il avait un comportement...
00:40:59 - Violent ?
00:41:00 - Violent, disons-le, oui.
00:41:02 - Mais l'idée, c'est qu'en fait, il a été...
00:41:05 Il y a aussi le rôle de la famille.
00:41:07 Sa famille avait tendance à beaucoup justifier son comportement
00:41:11 parce que c'est un garçon qui aurait vécu des traumatismes.
00:41:15 Son père était dans un poteau roulant,
00:41:17 qui a eu un grave accident en 2002.
00:41:19 Donc, tout l'entourage, et même des amis,
00:41:23 avaient tendance à un peu...
00:41:25 Oui, à minorer, finalement, son réel comportement.
00:41:29 - Oui, c'est un point important, Faustine.
00:41:31 Le comportement de l'entourage.
00:41:33 - C'est ça, exactement.
00:41:35 - Toutes celles et ceux, vous êtes tous les trois autour de moi,
00:41:38 ici dans le studio, vous opinez tous du chef.
00:41:40 Vous dites "Oui, c'est vrai, c'est important".
00:41:42 Qui veut en parler ? Maître ?
00:41:44 - Effectivement.
00:41:45 On se rend compte qu'il y a quand même une constante dans ces dossiers-là
00:41:48 où la personne qui va être mise en cause
00:41:51 et qui fait des violences conjugales, en l'occurrence,
00:41:54 on voit qu'il y a une famille, en général,
00:41:56 qui minimise le sujet et qui...
00:41:58 - Je voulais demander à Faustine.
00:42:00 Faustine, vous avez déposé plainte ?
00:42:02 - Oui, j'ai déposé plainte en décembre 2022.
00:42:06 - En décembre 2022.
00:42:08 Et qu'est devenue votre plainte ?
00:42:10 - Cette plainte, pour le moment, tout est en cours.
00:42:14 Et justement, je voulais saluer,
00:42:16 ce qu'on n'entend pas forcément dans les médias,
00:42:18 mais je voulais saluer l'accueil que j'ai pu recevoir.
00:42:20 J'ai été reçue au commissariat du 17e,
00:42:23 puis ça a été géré dans le 11e,
00:42:25 puisque c'est là où je vis actuellement.
00:42:27 Et j'y étais, en fait, étrangement.
00:42:29 C'était d'ailleurs le même mois
00:42:31 où cette jeune a tenté de déposer plainte
00:42:34 et qu'elle a été ensuite frappée par son compagnon
00:42:36 et qu'il est dans le coma actuellement.
00:42:38 C'est exactement ce mois-ci.
00:42:39 Donc j'avoue que je suis arrivée au commissariat
00:42:41 avec pas mal d'appréhension.
00:42:43 Mais étrangement, j'ai été très bien reçue,
00:42:45 j'ai été écoutée.
00:42:46 Et donc ça c'est encore quelque chose
00:42:47 que je voudrais dire aussi aux personnes qui entendent,
00:42:49 c'est de ne pas avoir peur de déposer plainte,
00:42:51 parce qu'il y a toujours quelqu'un
00:42:52 qui va croire en votre récit.
00:42:55 - Oui.
00:42:56 - Simplement...
00:42:57 - Violente de Philippe Issabate.
00:42:59 - Ça illustre très bien ce qu'on pense chez "Osé le féminisme",
00:43:01 c'est qu'en réalité c'est une loterie,
00:43:03 le dépôt de plainte.
00:43:04 Et dans votre malheur,
00:43:06 vous êtes tombée sur une équipe formée,
00:43:08 mais dans la plupart des cas,
00:43:10 c'est pas du tout...
00:43:11 - Pas de formation, ouais.
00:43:12 - Mais pas que pas de formation, pas d'accueil.
00:43:14 - Pas de pari peut-être, je ne sais pas.
00:43:16 - Non pas forcément,
00:43:17 et c'est une question que je voudrais poser à Faustine.
00:43:19 Est-ce que les policiers qui vous ont entendues
00:43:22 font partie d'une brigade de protection des familles ?
00:43:25 C'est-à-dire une cellule un peu spécialisée
00:43:27 au sein du commissariat ?
00:43:28 - Alors il me semble que celle-ci, non.
00:43:30 C'était pas une brigade des familles.
00:43:33 - Pour le coup c'est une touche enceinte.
00:43:35 - Mais la personne qui m'a reçue en effet
00:43:37 avait l'air...
00:43:38 Elle ne m'a absolument pas jugée, voilà.
00:43:40 Elle n'a porté aucun jugement en mon encontre,
00:43:42 elle a vraiment écouté.
00:43:43 Je pense qu'elle était assez choquée
00:43:44 parce que c'est vrai que dans ma plainte,
00:43:47 il y a aussi le fait que j'ai des vidéos,
00:43:49 parce que j'ai installé des vidéos pour les chats,
00:43:51 pour les protéger,
00:43:52 et dans un sens j'ai oublié ensuite
00:43:54 que ces vidéos étaient encore actives.
00:43:56 Donc c'est vrai que ça a permis dans un sens
00:43:59 de justifier finalement mes propos.
00:44:01 Et c'est ça qui est difficile aussi dans les plaintes
00:44:05 pour violences conjugales,
00:44:06 c'est qu'il n'y a pas de preuves malheureusement.
00:44:08 C'est difficile de montrer qu'on a souffert
00:44:10 pendant plus d'un an.
00:44:12 - Merci Faustine, à moins que vous ayez une autre question.
00:44:14 Une question à poser à Faustine.
00:44:16 - Non mais ça montre que la formation des policiers,
00:44:19 des gendarmes et de tout ce qui travaille sur ces domaines
00:44:22 s'améliore mais est nécessaire surtout.
00:44:24 - Ça recette aussi la culture du viol,
00:44:26 quand on parle de l'entourage.
00:44:28 Vous savez, il y a plus d'un jeune homme sur deux
00:44:31 entre 18 et 24 ans qui considère
00:44:33 que quand une femme accuse son ex-conjoint
00:44:35 ou un homme avec qui elle a une relation,
00:44:36 c'est pour se venger ou par déception amoureuse.
00:44:38 - Exactement, c'est vrai.
00:44:39 - Donc un sur deux.
00:44:40 - La culture du viol, elle est omniprésente.
00:44:42 Je l'ai vécue moi-même parce que j'ai également été violée
00:44:45 et je le dis parce que je pense qu'il ne faut pas en avoir honte.
00:44:47 C'était quand j'étais étudiante.
00:44:49 Et les réactions de l'équipe médicale ont été horribles.
00:44:54 Mais horribles.
00:44:55 C'est pourquoi vous êtes rentré chez lui,
00:44:56 en même temps vous l'avez fréquenté ensuite,
00:44:58 foutu comme vous êtes.
00:44:59 - Vous l'avez provoqué.
00:45:00 - Il est médecin donc c'est pas possible qu'il ait fait ça.
00:45:03 Ça c'était la médecine universitaire.
00:45:04 Alors c'est avant #MeToo mais je peux vous assurer
00:45:06 qu'avec toutes les femmes que j'accompagne,
00:45:07 c'est toujours pareil.
00:45:08 Et pour revenir aux dépôts de plaintes,
00:45:10 les dépôts de plaintes auxquels j'ai assisté,
00:45:12 parce qu'il faut rappeler aussi que la police,
00:45:13 malgré que dans le code de procédure pénale,
00:45:15 se soit indiqué vaguement,
00:45:16 qui a une obligation de dire à la personne
00:45:18 qui vient déposer plainte qu'elle peut être accompagnée
00:45:20 par une avocate ou un avocat,
00:45:21 ce n'est pas fait.
00:45:22 Dans les cas où je suis là,
00:45:23 j'essaye de limiter la casse.
00:45:24 Mais les cas où ça se passe bien, c'est rare.
00:45:26 Souvent la porte du bureau où on dépose plainte est ouverte.
00:45:29 Il y a plusieurs policiers dans le bureau,
00:45:31 ça rende sa soeur...
00:45:32 - Oui, c'est compliqué de parler et de dire ce qu'on vit.
00:45:35 - Petite question pour Faustine,
00:45:37 je voulais savoir où on en était justement de la procédure pénale
00:45:39 à la déposer plainte, elle a été bien accueillie.
00:45:41 Et donc là aujourd'hui, on en est où ?
00:45:43 - Oui, donc pour répondre à votre question,
00:45:47 aujourd'hui ça avance très bien.
00:45:49 Maintenant, ma plainte est gérée par le commissariat du 11e.
00:45:53 Je suis très bien accompagnée par Simon Calinet d'avocat.
00:45:57 Je tenais à le signaler, c'est vrai que c'est simple.
00:45:59 - D'ailleurs, je dis, et je suis totalement transparent,
00:46:03 Maître Tomasini qui sera avec nous est l'une de vos avocates.
00:46:07 - Exactement, c'est exactement ça.
00:46:09 - Je voudrais le dire, parce que je ne voudrais pas que ça se...
00:46:11 - Oui, bien sûr.
00:46:12 - Il faudrait une prise en charge par l'État des avocats,
00:46:15 des avocats systématiques, sans condition de ressources.
00:46:17 - C'est-à-dire qu'il faudrait que l'État prenne en charge les frais d'avocats.
00:46:22 - Pour les violences sexuelles, je pense que c'est indispensable.
00:46:24 Puisque c'est un frein, les honoraires,
00:46:26 l'aide juridictionnelle, ça ne couvre pas les cas de moyenne base.
00:46:29 - Et qu'en pensez-vous Dominique Véria ?
00:46:31 - Que ça peut être débloqué immédiatement.
00:46:34 Alors après, je pense que le donner de façon systématique...
00:46:39 Je pense qu'il faut le débloquer effectivement tout de suite,
00:46:42 pour que tout de suite la personne puisse être accompagnée par un avocat.
00:46:45 - Ah oui, vous parlez de l'aide d'urgence ?
00:46:47 - Oui, parce que l'aide d'urgence peut exister.
00:46:50 Après, il y a des gens qui ont largement les moyens de payer un avocat aussi.
00:46:54 - Oui, et ça dépend de lui.
00:46:56 Et puis il y a des avocats qui sont plus chers que d'autres aussi.
00:46:59 - Moi je pense qu'une victime devrait avoir accès à la même qualité de défense,
00:47:04 peu importe ses revenus.
00:47:05 Et aujourd'hui, l'aide juridictionnelle ne prend pas en charge l'assistance
00:47:09 au moment du dépôt de plainte.
00:47:11 - Oui, alors ça par contre, c'est une chose qui serait nécessaire.
00:47:15 - Dès le dépôt de plainte.
00:47:17 - On l'a noté, nous dépôts de plainte,
00:47:19 de telle sorte que l'avocat puisse s'accompagner dans le dépôt de plainte.
00:47:21 - A la fin de la procédure, il est possible justement pour les victimes,
00:47:24 lorsqu'elles ont gain de cause, de se voir rembourser les frais au site justice.
00:47:27 Notamment les frais d'avocat.
00:47:28 - A la fin, oui, mais ça dure tellement longtemps, je suis d'accord avec vous.
00:47:31 - Bon, nous allons laisser en paix Faustine.
00:47:34 Merci beaucoup Faustine.
00:47:36 - Je vous en prie, c'est la remercie.
00:47:37 - Ça va bien maintenant ?
00:47:38 Vous avez comment...
00:47:39 Aujourd'hui, quel regard portez-vous sur ce que vous avez vécu ?
00:47:43 - Alors moi j'ai l'impression, en tout cas de mon vécu,
00:47:47 j'en ai plus honte.
00:47:49 Parce que c'est vrai que cette relation m'a fait beaucoup cultabiliser.
00:47:52 On parlait justement de la cultabilité de la victime.
00:47:55 Je trouve ça bien dommage aujourd'hui que les seules personnes qui consultent des psychologues
00:47:58 ou des psychiatres, en fait, ce sont les victimes et pas les coupables finalement.
00:48:01 C'est vrai que moi ça m'a beaucoup affectée.
00:48:03 Parce que quand on est dans une relation comme celle que j'ai vécue,
00:48:07 on a beaucoup tendance à justifier en fait la violence de l'autre,
00:48:10 en se disant finalement que c'est peut-être de ma faute.
00:48:13 C'est vrai que c'est une attitude qui a été la mienne pendant un peu plus d'un an.
00:48:16 Je me suis dit, bon, je vais essayer de le sauver de ses démons si je puis dire.
00:48:19 Et donc aujourd'hui, je tente peu à peu de me reconstruire.
00:48:22 Premièrement, c'est que je suis déjà bien soutenue par mes familles.
00:48:26 Et je pense que c'est très important, les proches, l'entourage en fait.
00:48:29 Ensuite, il y a évidemment le cabinet d'avocats.
00:48:32 Je suis très, très bien entourée.
00:48:34 Et c'est vrai qu'on parlait de justice spécialisée.
00:48:37 Les victimes de violences conjugales, c'est très, très différent.
00:48:40 Elles sont différentes des victimes tout court.
00:48:42 Parce qu'en fait, la violence conjugale, dans un sens, il y a tout le regard de la société.
00:48:46 Moi, souvent, quand j'en parle à des amis, plus ou moins proches,
00:48:50 il y a toujours ce côté "j'ai souffert parce que j'ai aimé".
00:48:53 Vous voyez ?
00:48:54 Donc il y a ce côté un peu culpabilité,
00:48:56 comme si j'avais choisi finalement de subir ces violences pendant plus d'un an.
00:49:00 Mais le problème, c'est quand on est dans cette relation,
00:49:02 on aime en effet, mais c'est très difficile d'en sortir quand on est complètement sous emprise.
00:49:08 Et donc je dirais qu'aujourd'hui, c'est un petit peu plus difficile même que pendant la relation.
00:49:12 Parce que quand on n'est plus sous emprise, on réalise en fait tout ça.
00:49:15 On réalise que cette dignité a été perdue pendant un peu plus d'un an.
00:49:19 On réalise qu'on a été là pour quelqu'un qui a été complètement destructeur,
00:49:23 parce que c'est le 40.
00:49:25 Et donc aujourd'hui, je dirais que c'est une reconstruction.
00:49:28 Et c'est là où la justice est aussi...
00:49:31 - Est-ce que cet ex-compagnon s'approche encore de vous ?
00:49:36 - Ah, plus du tout, non, non. Moi, je n'ai écouté plus du tout, absolument pas, non.
00:49:40 - Bon, ok. Merci beaucoup Faustine.
00:49:42 - Bon courage.
00:49:43 - Merci pour votre témoignage. Il est 11h30.
00:49:46 Vous êtes sur Sud Radio. Je reviendrai tout à l'heure après-midi sur ce qui s'est passé au Pays Basque.
00:49:52 Une enseignante a été poignardée par un élève. Elle est entre la vie et la mort.
00:49:56 Il est 11h30 et vous aurez des détails, évidemment.
00:49:59 Il est 11h31. Merci d'être avec nous. A tout de suite.
00:50:02 Il est 11h34. Nouveau témoignage, celui de Vanessa qui nous a appelé.
00:50:06 Bonjour Vanessa.
00:50:07 - Bonjour.
00:50:08 - Vous avez subi des violences conjugales de la part de votre ex-compagnon.
00:50:12 C'était il y a longtemps, Vanessa ?
00:50:14 - Juste avant le Covid.
00:50:16 - Juste avant le Covid. Que s'est-il passé ?
00:50:20 - Alors malheureusement, ce jour-là, il m'a agressée avec un couteau de cuisine.
00:50:25 Pour une histoire de jalousie, parce que je me suis fait très très jaloux.
00:50:30 Et voilà. Et donc le problème, c'est qu'il m'a agressée devant ma fille.
00:50:35 - Devant votre fille, oui.
00:50:37 Il vous a agressée, il vous a menacée ?
00:50:39 - Ah non, il m'a sauté dessus.
00:50:40 - Il vous a sauté dessus ? Et est-ce qu'il a porté, est-ce qu'il a utilisé ce couteau ?
00:50:47 - Alors quand il m'a sauté dessus, je suis tombée à l'arrière-envers.
00:50:50 Je me suis connue contre un meuble.
00:50:52 Et en fait, si vous voulez, moi mon réflexe, ça a été de l'attraper par le cou.
00:50:58 Et malheureusement, je dirais malheureusement parce que par la suite, ça m'a porté préjudice.
00:51:03 Je l'ai griffée dans le cou.
00:51:05 Ce qui fait qu'elle a arrêté l'agression.
00:51:07 Et on va dire que j'ai réussi à me libérer et à m'échapper.
00:51:15 - Et à crier, à vous échapper.
00:51:17 - Ma fille a crié autant que moi.
00:51:19 Moi j'ai eu très peur.
00:51:21 Effectivement j'ai fermé les yeux parce que je me suis dit "ça y est, je suis morte".
00:51:24 Ma fille s'est mise à hurler.
00:51:27 Donc quand je réussis à m'en défaire, j'ai vite pris ma fille.
00:51:31 Je suis vite allée l'amener chez une amie.
00:51:33 Et je ne suis pas rentrée chez moi.
00:51:35 Et là, si vous voulez, il a essayé de me chercher, de me trouver comme il pouvait.
00:51:41 Et c'est là que j'ai vu que les gendarmes arrivaient.
00:51:44 Moi j'étais cachée dans le village.
00:51:46 Je m'étais mise à l'air en me disant que je pensais justement que les gendarmes allaient arriver.
00:51:54 - Bon Vanessa, les gendarmes sont arrivés.
00:51:56 Donc là vous étiez un peu soulagée.
00:51:59 Vous avez déposé plainte j'imagine ?
00:52:01 - Pas du tout, c'est pas moi qui l'ai fait.
00:52:03 C'est mes voisins qui ont entendu ce qui se passait et qui l'ont fait.
00:52:06 Et à mon grand soulagement, parce que moi j'avais...
00:52:09 C'était pas la première fois que je subissais des agressions physiques.
00:52:13 Moins violentes, mais...
00:52:15 Enfin, moins violentes.
00:52:16 Il m'a percé le tympan, il m'a fait un trauma crânien, enfin bon bref.
00:52:19 - Moins violente, enfin trauma crânien, percé le tympan...
00:52:24 Vous appelez ça moins violent Vanessa ?
00:52:26 - Moins violent parce que là s'il m'avait porté le coup de couteau, je pense que je n'aurais pas su vivre.
00:52:31 - Vous seriez morte peut-être.
00:52:32 Vanessa, Vanessa, vous avez déposé plainte ensuite ?
00:52:35 - Non.
00:52:36 - Pourquoi non ?
00:52:37 - Parce que j'avais trop peur de ces représailles.
00:52:40 Je voulais pas... La plainte de mes voisins a suffi pour qu'on passe devant le tribunal.
00:52:46 - C'est pas moi.
00:52:47 - Donc du coup, moi j'avais trop peur que si moi...
00:52:51 - Oui, alors attendez Vanessa, attendez.
00:52:53 Qu'est-ce que vous vouliez dire, Violette ?
00:52:55 - Oui, oui, oui, c'était simplement pour préciser.
00:52:56 Effectivement, c'est un dispositif qui existe, le signalement au procureur,
00:52:59 qui ensuite décide de s'autosaisir, donc un tiers peut signaler...
00:53:03 - Un tiers peut signaler la violence.
00:53:05 - Et si jamais les gendarmes donnent suffisamment d'éléments,
00:53:08 le procureur s'autosaisit, poursuit,
00:53:10 et l'homme peut être condamné sans que la femme ait eu besoin à aucun moment de porter plainte.
00:53:13 - Donc cet homme est poursuivi maintenant, Vanessa, par la justice ?
00:53:16 - Alors, le problème c'est que nous avons été tous les deux poursuivis.
00:53:20 Parce que du coup, les gendarmes nous ont demandé,
00:53:22 enfin, lui parce qu'il n'avait pas de permis, donc ils l'ont conduit...
00:53:25 - Parce que vous l'avez griffé, vous vous êtes défendue.
00:53:27 - Voilà, et du coup j'ai été condamnée comme agresseur moi aussi.
00:53:31 J'ai été condamnée...
00:53:33 - Non mais ça c'est absolument invraisemblable.
00:53:35 - Je ne sais plus comment on dit le terme, mais j'ai été condamnée pour agression.
00:53:38 - Mais c'est là où on parle justement de la formation des policiers et des gendarmes.
00:53:42 C'est-à-dire, c'est à la base, si on tombe sur des policiers ou des gendarmes,
00:53:46 je vois que sur l'auditrice précédente, c'était le cas.
00:53:49 Là, en l'occurrence, ce n'est pas le cas,
00:53:50 donc on a des policiers qui ne comprennent pas exactement la situation de madame,
00:53:54 qui ne comprennent pas qu'il y a d'un côté une situation de menace imminente
00:53:58 et de l'autre, quelqu'un qui essaye de se défendre.
00:54:00 Et finalement vont dire, vont banaliser tout ça,
00:54:02 vont mettre des violences réciproques,
00:54:04 et à la fin on a les deux qui sont renvoyés devant un tribunal correctionnel,
00:54:06 avec des magistrats qui de temps en temps, eux aussi,
00:54:09 ne sont pas formés ou en tout cas ne sont pas spécialisés,
00:54:11 et donc ne vont pas comprendre la distinction,
00:54:13 et vont condamner tout le monde.
00:54:14 - Alors je remarque aussi, on parlait de Paris tout à l'heure,
00:54:17 du 17e arrondissement, du 11e arrondissement de Paris,
00:54:20 bien doté avec des policiers qui ont parfaitement bien reçu Faustine,
00:54:24 mais là, les gendarmes, ça se passe à la campagne,
00:54:28 il y a d'énormes différences selon le lieu où on se trouve, n'est-ce pas ?
00:54:32 - Alors, il y a d'énormes différences, mais non, en gendarmerie,
00:54:36 il y a aussi des maisons de protection des familles
00:54:39 qui sont des gendarmeries spécialisées,
00:54:41 et réellement, la plupart des gendarmes se forment...
00:54:44 - Ils sont formés en plus, les gendarmes se forment.
00:54:46 - Sachant qu'en plus, cette formation, malheureusement pour l'instant,
00:54:49 elle est encore trop sur la base du volontariat,
00:54:51 sachant que les gendarmes sont un peu plus volontaires que d'autres,
00:54:54 parce qu'ils ont probablement un chef qui leur donne un tout petit peu moins le choix
00:54:57 qu'en police, mais pour autant, on voit bien que tous les gendarmes
00:55:00 et tous les policiers ne sont pas encore formés, ce qu'ils devraient être,
00:55:04 et en fait, là, très sincèrement, Madame aurait dû être réorientée
00:55:09 justement vers cette gendarmerie spécialisée,
00:55:12 pour que les choses soient prises en main en connaissance de cause.
00:55:15 Sachant qu'il y a déjà eu des faits,
00:55:18 après, je ne sais pas si votre conjoint avait mis...
00:55:23 puisque vous parliez de jalousie très forte,
00:55:25 j'imagine qu'il regardait comment vous vous habillez,
00:55:30 il vous disait quand vous aviez le droit de sortir,
00:55:34 et tout ça sont des éléments de texture...
00:55:36 - Il se comportait ainsi, Vanessa ?
00:55:38 - Oui, tout à fait, il me reprochait mes activités loisires,
00:55:42 il me reprochait quand j'allais chercher ma fille de faire la bise à notre papa
00:55:46 pour lui dire bonjour, de lui sourire, tout simplement...
00:55:49 - C'est la violation de la vie, ça commence par ça...
00:55:52 - C'est ce qu'on appelle aujourd'hui le contrôle coercitif,
00:55:55 mais qui sont des éléments qui prouvent qu'il y a violence et pas conflit,
00:55:59 parce que là, le fait qu'elle ait été condamnée,
00:56:01 c'est parce que des policiers ont considéré qu'il y avait un conflit conjugal,
00:56:04 or, quand ces éléments sont mis en place,
00:56:06 et là, très clairement, il l'était mis en place,
00:56:08 on sait qu'on est dans de la violence conjugale de l'un sur l'autre,
00:56:12 on n'est plus du tout dans du conflit,
00:56:14 on n'est pas dans un couple qui se dispute,
00:56:16 on est vraiment de la violence de l'un sur l'autre.
00:56:18 - Alors je pense que c'est le rapport médical qui a joué,
00:56:22 dans le sens où, moi j'ai eu 15 jours d'ITT,
00:56:25 parce que je n'avais aucune, à part une grosse bosse sur la tête,
00:56:29 je n'avais aucune violence apparente, physique,
00:56:32 que mon ex-compagnon, en fait,
00:56:35 du coup il avait une trace de trois doigts qui l'ont griffé dans le cou,
00:56:39 donc lui il a eu trois jours d'ITT.
00:56:41 - Et vous n'avez pas eu d'ITT psychologique ?
00:56:43 Le commissariat ne vous a pas envoyé justement faire des ITT psychologiques ?
00:56:46 - La gendarmerie.
00:56:48 - Non, je ne vois pas du tout de quoi vous me parlez,
00:56:51 mais par contre, la procureure a demandé le retrait immédiat de ma fille,
00:56:57 donc les assistantes sociales sont venues,
00:57:00 ils voulaient me retirer ma fille,
00:57:02 ce qui s'est passé c'est que le père a reçu un courrier,
00:57:07 on était séparés, il était dans une autre région,
00:57:09 et il a de suite déménagé pour venir emménager dans la région,
00:57:13 et ce qu'il n'a pas apprécié du tout,
00:57:15 c'est qu'on ne le prévienne pas pour lui confier la garde à lui.
00:57:20 Ensuite on lui a dit "on retire la fille à votre ex-compagne, mais on la place".
00:57:27 Mais la procureure a été vraiment,
00:57:30 moi je l'ai pris comme presque une agression de sa part aussi,
00:57:34 genre c'était ma faute.
00:57:36 - Comme si vous étiez la fautive.
00:57:39 Bien, Vanessa, merci, je voudrais que maître Tomasini se joigne à nous,
00:57:44 bonjour maître.
00:57:45 - Bonjour.
00:57:46 - Et merci pour le témoignage de Faustine tout à l'heure,
00:57:49 un mot sur Faustine,
00:57:51 Faustine nous disait que ça suivait son cours,
00:57:54 maître Tomasini, c'est bien le cas ?
00:57:58 - Oui, tout à fait.
00:57:59 Je voudrais revenir juste sur ce dossier,
00:58:02 parce qu'il est assez emblématique en ce qu'il va à l'encontre des idées reçues,
00:58:08 puisque dans notre inconscient collectif,
00:58:10 on a tendance à envisager les violences dans les milieux non favorisés,
00:58:15 avec des victimes extrêmement fragiles,
00:58:19 notamment sur le plan intellectuel et psychologique,
00:58:22 et pas forcément aussi jeunes.
00:58:24 Donc là, dans le dossier de Faustine,
00:58:26 vous voyez qu'il s'agit d'une jeune fille brillante,
00:58:29 qui est issue d'un milieu très favorisé,
00:58:34 et qui est jeune.
00:58:36 Donc ça il faut le savoir,
00:58:38 aujourd'hui toutes les couches de la société sont frappées par ce fléau des violences conjugales,
00:58:42 et de plus en plus de très jeunes femmes,
00:58:45 avec des auteurs très jeunes également.
00:58:48 Alors le dossier de Faustine, là aussi il a reçu un traitement privilégié,
00:58:52 elle a été parfaitement accueillie au commissariat.
00:58:55 - Vous venez d'entendre Vanessa, c'est pas tout à fait le cas pour Vanessa.
00:58:59 - Mais voilà, c'est-à-dire que vous avez parfaitement raison,
00:59:02 vous avez compris que le dossier de Faustine est assez exceptionnel,
00:59:07 dont le traitement qu'il a subi,
00:59:10 la façon dont elle a été entendue, écoutée,
00:59:13 alors que d'une manière générale, encore aujourd'hui en France,
00:59:17 on a un accueil dans les commissariats ou les gendarmeries,
00:59:20 qui n'est pas de niveau.
00:59:22 Les professionnels gendarmes ou officiers poligédiciaires
00:59:27 ne sont pas encore suffisamment formés à l'écoute.
00:59:30 - C'est ce que nous disions.
00:59:33 En ce qui concerne, je ne vais pas revenir sur le cas de Faustine maintenant,
00:59:37 et sur le cas de Vanessa, mais je voudrais avancer,
00:59:40 en ce qui concerne les agresseurs.
00:59:43 Est-ce que les agresseurs sont condamnés comme il faut, ou pas ?
00:59:50 Est-ce que les mesures permettant l'éloignement de ces agresseurs sont suffisantes ou pas ?
00:59:58 Il y a les téléphones grave danger,
01:00:01 il y a les bracelets anti-rapprochement, mais est-ce que c'est suffisant ?
01:00:05 - Alors absolument pas, ça c'est très clair en ce qui me concerne,
01:00:09 et au vu de l'expérience que je peux avoir dans différents dossiers.
01:00:14 Déjà les téléphones graves danger,
01:00:17 ils ne sont pas en nombre suffisant.
01:00:20 En ce qui concerne les bracelets anti-rapprochement,
01:00:24 là aussi c'est exactement la même chose,
01:00:27 ils n'ont pas suffisamment de bracelets anti-rapprochement.
01:00:30 Il faut savoir qu'il y a quand même 220 000 plaintes par an pour violences conjugales.
01:00:38 Donc vous imaginez bien qu'il n'y a pas autant de bracelets anti-rapprochement.
01:00:42 De surcroît, il faut du personnel qualifié pour les mettre en place,
01:00:46 pour expliquer son fonctionnement aux victimes notamment.
01:00:51 Donc tout ça c'est aussi une question de budget.
01:00:54 Et le budget, évidemment le compte n'y est pas.
01:00:57 Vous le savez, depuis très longtemps on réclame 1 milliard
01:01:01 pour lutter efficacement contre les violences conjugales,
01:01:04 et évidemment le gouvernement fait la sourde oreille.
01:01:07 - Dominique Vérien, pas assez de bracelets anti-rapprochement ?
01:01:11 - Je pense que, objectivement, les bracelets anti-rapprochement,
01:01:15 il y a une autre difficulté qui fait qu'on ne les met pas,
01:01:18 mais qui est une difficulté technique, qui à mon avis est en train d'être réglée.
01:01:22 Mais parce qu'en fait il en existe plus que ce qui est attribué.
01:01:25 Donc on peut encore en attribuer.
01:01:27 Et il me semble pareil sur les téléphones grave danger,
01:01:29 tout n'est pas attribué parce qu'il y a eu une augmentation,
01:01:32 une vraie augmentation en nombre de bars,
01:01:35 qui sont les bracelets anti-rapprochement, qu'en téléphone grave danger.
01:01:38 Et je pense que techniquement, et puis ce n'est pas tant le coût du téléphone grave danger,
01:01:42 que ça c'est quelque chose de réalisable.
01:01:45 Par contre, là où on parle de financement,
01:01:47 c'est vrai qu'il y a un vrai besoin de financement, d'autant que chez nous,
01:01:50 alors justement le fonctionnement est un petit peu différent de ce qu'on peut voir en Espagne,
01:01:54 et beaucoup reposent sur les associations.
01:01:57 Je pense aussi à l'IDFF par exemple, qui est à Paris,
01:01:59 et celui qui donne les téléphones grave danger, qui va expliquer...
01:02:02 - Les associations qui ont besoin d'être accompagnées ?
01:02:04 - Les associations ont besoin de financement, alors les financements arrivent...
01:02:07 - Les associations, pardon...
01:02:09 - Oui, allez-y, chez Oseille Féminisme par exemple.
01:02:12 - Voilà, chez Oseille Féminisme, ce qu'on dénonce,
01:02:14 c'est qu'en fait on est en train de pallier la carence de l'État.
01:02:16 Et pas que nous ! On a des assos qui permettent aux victimes
01:02:20 de collecter leurs propres preuves sur la blockchain.
01:02:23 Vous vous rendez compte à quel point on en arrive ?
01:02:25 Nous faisons les enquêtes que l'État doit réaliser 80% de classements sans suite
01:02:30 pour les violences conjugales. Est-ce que c'est normal ?
01:02:32 Est-ce que créer des équipes qui sont plus formées suffira ?
01:02:36 - Et pourquoi 80% de classements sans suite ?
01:02:38 - Parce que l'absence de preuves, c'est ce que disait Vanessa.
01:02:41 - L'exemple de Vanessa est absolument incroyable.
01:02:44 C'est presque elle qui était accusée dans cette affaire.
01:02:47 - L'exemple de Vanessa, alors qu'en plus il y a apparemment des éléments,
01:02:50 qu'il y a les voisins qui sont prêts à témoigner,
01:02:52 l'exemple de Vanessa est effectivement incroyable.
01:02:54 - Et puis qu'il y avait des antécédents, pardon, mais...
01:02:56 - Les investigations n'ont pas forcément été réalisées,
01:02:58 puisqu'aujourd'hui, en fait, il n'y a pas d'obligation
01:03:00 à réaliser un minimum d'investigation avant de classer.
01:03:02 Ce qui fait qu'on peut classer sans avoir récupéré la mémoire d'un téléphone.
01:03:06 Et aujourd'hui, les classements sans suite,
01:03:08 c'est soit pour défaut de preuves, enfin,
01:03:10 manque de preuves par manque d'investigation,
01:03:12 soit pour la prescription.
01:03:13 Nous, on estime que l'imprescribilité des infractions conjugales et sexuelles
01:03:18 se discute vraiment, notamment à cause des mécanismes
01:03:21 de mémoire traumatique et de troubles de stress post-traumatique.
01:03:23 - Soulevez la prescription.
01:03:25 - En tout cas, en matière de violences conjugales, c'est un sujet.
01:03:28 Plus largement sur les violences sexuelles,
01:03:30 donc les violences sexuelles et conjugales,
01:03:32 peut se mettre en place dans l'esprit de la victime
01:03:34 une mémoire traumatique, un état dissociatif
01:03:36 qui provoquera qu'elle ne peut pas porter plainte
01:03:38 avant plusieurs années, parfois 10 ans, 20 ans, 30 ans, 40 ans, 50 ans.
01:03:41 - Quand on parlait, là il y a quelque chose
01:03:43 où je suis vraiment en désaccord, c'est quand on parlait
01:03:45 de classements sans suite pour manque de preuves,
01:03:47 moi je reviens justement au personnel formé,
01:03:49 que ce soit de la part des policiers ou des magistrats.
01:03:51 Il y a le phénomène d'emprise, je trouve,
01:03:53 qui n'est pas du tout compris par la majorité du personnel,
01:03:57 notamment en police.
01:03:59 Et donc, les gens ne comprennent pas que
01:04:01 cette emprise psychologique, c'est une violence,
01:04:03 et donc ça peut permettre de créer un élément matériel
01:04:06 pour entrer en voie de condamnation.
01:04:08 - Alors, je rebondis, et c'est pour ça que je parlais tout à l'heure
01:04:10 du contrôle coercitif, parce que justement,
01:04:12 ce sont des éléments de preuves,
01:04:14 et il faut qu'on les fasse rentrer vraiment
01:04:16 dans la grille d'évaluation.
01:04:18 Aujourd'hui, justement, les policiers ou les gendarmes formés
01:04:21 font vraiment une évaluation du danger.
01:04:23 Et dans cette grille d'évaluation,
01:04:25 il y a un certain nombre de points,
01:04:27 et il faut absolument que ces points rentrent,
01:04:29 et donc le contrôle coercitif, c'est,
01:04:31 est-ce que vous avez le droit de dépenser votre argent
01:04:33 comme vous l'entendez ?
01:04:35 Bien que vous gagnez votre argent, est-ce que vous avez accès à la carte bleue ?
01:04:37 Est-ce que vous avez le droit de vous habiller comme vous voulez ?
01:04:39 Ou alors, est-ce que le matin, ils vous disent
01:04:41 "tu ne vas pas mettre une mini-jupe aujourd'hui" ?
01:04:43 Est-ce que vous avez le droit de voir qui vous voulez ?
01:04:45 Est-ce que vous faites...
01:04:47 Est-ce qu'ils vous harcèlent
01:04:49 si jamais vous rentrez avec un quart d'heure de retard ?
01:04:51 Tout ça, ce sont des éléments
01:04:53 qui sont effectivement plutôt psychologiques.
01:04:55 On se rend compte que dans 100% des féminicides,
01:04:57 dans 100% des féminicides,
01:04:59 ce n'est pas un élément qui a été mis en place.
01:05:01 Parce qu'en fait, l'emprise se construit.
01:05:03 Et le gros avantage de ce contrôle coercitif,
01:05:05 c'est que ça fait porter sur l'auteur
01:05:07 la pression, et pas sur la victime.
01:05:09 C'est pas la pauvre victime qui est sous emprise,
01:05:11 c'est l'auteur qui met en place
01:05:13 tout un système pour mettre
01:05:15 sa victime dans sa toile.
01:05:17 - Mais vous voyez toute cette technicité,
01:05:19 la technicité de notre débat aujourd'hui,
01:05:21 finalement, montre qu'il faut des juridictions
01:05:23 vraiment spécialisées. Et je ne dirais pas que
01:05:25 pour les violences à intérêts familiales,
01:05:27 spécialisées pour les violences conjugales
01:05:29 et sexuelles et sexistes.
01:05:31 Et dans cette juridiction spécialisée,
01:05:33 un pôle violences intrafamiliales.
01:05:35 Pourquoi ? Pour former tout le monde, pour avoir dans le même
01:05:37 immeuble les intervenants médicaux et sociaux,
01:05:39 comme c'est le cas en Espagne. Et aujourd'hui,
01:05:41 je me demande ce qui valablement
01:05:43 justifierait qu'en France, on n'aurait pas les moyens
01:05:45 de le faire. - Bien, il est 11h49.
01:05:47 Maître Tomasini, restez avec nous
01:05:49 parce que vous faites une proposition, vous militez
01:05:51 pour l'inscription du féminicide dans le code pénal.
01:05:53 On va en parler.
01:05:55 Il est 11h49.
01:05:57 A tout de suite. - Avec Bourdin. - Bien.
01:05:59 Il est 11h51. Je voudrais simplement...
01:06:01 On a 2-3 précisions
01:06:03 concernant ce qui s'est passé à Saint-Jean-de-Luz.
01:06:05 C'est une professeure
01:06:07 d'un établissement privé de Saint-Jean-de-Luz
01:06:09 qui est décédée
01:06:11 après avoir été poignardée
01:06:13 par un élève. C'était ce matin.
01:06:15 L'élève a été interpellée.
01:06:17 Nous allons évidemment
01:06:19 développer après-midi pour avoir
01:06:21 de nouvelles informations.
01:06:23 - Il est 11h52.
01:06:25 Maître Tomasini, vous êtes là. Vous demandez
01:06:27 en ce qui concerne les féminicides,
01:06:29 vous demandez l'inscription
01:06:31 du féminicide dans le code pénal.
01:06:33 Expliquez-nous.
01:06:35 - Alors, comme vous le savez, le féminicide
01:06:37 aujourd'hui n'existe pas dans le code pénal.
01:06:39 On parle de
01:06:41 homicides surconjoints
01:06:43 qui pour l'instant
01:06:45 est une circonstance aggravante.
01:06:47 Aujourd'hui, je souhaiterais
01:06:49 qu'on réfléchisse et je vais
01:06:51 d'ailleurs m'y atteler
01:06:53 pour rédiger
01:06:55 un projet,
01:06:57 une proposition de loi
01:06:59 sur le féminicide.
01:07:01 Mais le féminicide, aujourd'hui,
01:07:03 pas seulement dans le huis clos
01:07:05 conjugal, puisque c'est un terme
01:07:07 qu'on emploie,
01:07:09 un terme qui est connu
01:07:11 des spécialistes en violence
01:07:13 conjugale, et tout autant
01:07:15 pour moi, il y a féminicide
01:07:17 quand une femme est tuée
01:07:19 dans notre société, femme.
01:07:21 Donc, si vous parlez de féminicide
01:07:23 non intime,
01:07:25 qui donc se passe...
01:07:27 - Oui, pas uniquement dans le cadre de la famille.
01:07:29 - Absolument.
01:07:31 Et j'estime,
01:07:33 on peut réfléchir à cela, parce que
01:07:35 finalement, dans cette société
01:07:37 dominante patriarcale, une femme
01:07:39 est constamment en danger
01:07:41 parce qu'elle est femme. Et lorsqu'elle
01:07:43 est tuée, puisqu'il y avait un exemple
01:07:45 récemment devant une cour d'assises
01:07:47 où une jeune femme avait été tuée
01:07:49 lors d'un vol
01:07:51 dont des transports ont commun,
01:07:53 et en réalité,
01:07:55 cette victime a été
01:07:57 choisie parce qu'elle était
01:07:59 femme, parce qu'elle était plus vulnérable,
01:08:01 parce qu'elle était plus fragile.
01:08:03 - Oui, je comprends.
01:08:05 Mais alors, maître,
01:08:07 le féminicide inscrit
01:08:09 dans le code pénal,
01:08:11 mais évidemment,
01:08:13 la violence conjugale,
01:08:15 c'est assez large.
01:08:17 Il y a évidemment les femmes qui sont les premières victimes,
01:08:19 mais il peut y avoir des hommes
01:08:21 victimes, il peut y avoir des frères
01:08:23 victimes, des sœurs victimes, et des enfants
01:08:25 victimes, maître.
01:08:27 Et des couples homosexuels aussi.
01:08:29 - Bien sûr, mais la proportion n'est pas la même.
01:08:31 La proportion n'est pas la même,
01:08:33 parce que dans les décomptes
01:08:35 qui sont effacés...
01:08:37 - Oui, mais est-ce une raison, la proportion ?
01:08:39 - Bien sûr, c'est une raison.
01:08:41 Parce qu'en réalité,
01:08:43 aujourd'hui, on parle d'homicide
01:08:45 conjugal, mais moi, ce qui m'intéresse,
01:08:47 c'est qu'on parle de féminicide
01:08:49 hors du clo familial.
01:08:51 - Hors le clo familial.
01:08:53 - Absolument.
01:08:55 Et c'est très important, parce que
01:08:57 ça démontre précisément
01:08:59 qu'une femme, dans cette société,
01:09:01 c'est malheureux de le dire, encore
01:09:03 aujourd'hui, en 2023, est une proie.
01:09:05 Et très souvent,
01:09:07 lorsqu'elle est tuée, elle est choisie
01:09:09 parce qu'elle est femme.
01:09:11 Et elle est victime parce qu'elle est femme.
01:09:13 - Oui, je comprends.
01:09:15 - Historiquement, il y a une raison législative
01:09:17 aussi qui montre qu'on avait un traitement différent.
01:09:19 Jusqu'en 1975,
01:09:21 le Code pénal précisait que si
01:09:23 un homme trouvait sa femme au foyer
01:09:25 conjugal en train de le tromper,
01:09:27 s'il la tuait, ça pouvait être excusable.
01:09:29 Le terme excusable, jusqu'en 1975.
01:09:31 Ensuite, la Cour de cassation a reconnu le viol
01:09:33 conjugal entre époux seulement en 1990.
01:09:35 En fait, le corps des femmes a toujours
01:09:37 été un objet à disposition des hommes
01:09:39 tel que le Code Napoléon l'a posé.
01:09:41 Et aujourd'hui, on vit encore
01:09:43 dans cet héritage historique, ce qui fait que
01:09:45 les féminicides ont une réalité actuelle
01:09:47 et s'inscrivent aussi dans
01:09:49 un système patriarcal de longue date.
01:09:51 - Oui, mais ça évolue
01:09:53 doucement, peu à peu.
01:09:55 Bon, qu'est-ce que vous pensez ?
01:09:57 Est-ce qu'il faut aller jusque-là ?
01:09:59 - Alors, moi j'emploie
01:10:01 assez facilement le terme de féminicide,
01:10:03 mais je trouve qu'il couvre effectivement
01:10:05 plus que les violences intrafamiliales,
01:10:07 puisque une femme qui va être tuée dans la rue
01:10:09 et qui sera violée, on sait bien qu'elle
01:10:11 sera violée parce qu'elle est une femme,
01:10:13 et qu'elle sera du coup tuée comme telle.
01:10:15 Après, il est vrai que
01:10:17 par rapport aux violences intrafamiliales,
01:10:19 on parle d'homicides conjugaux,
01:10:21 alors on pourrait dire féminicide conjugal,
01:10:23 ce qui n'est pas inintéressant,
01:10:25 parce qu'il est vrai que
01:10:27 dans la sphère conjugale,
01:10:29 il se passe quelque chose
01:10:31 qui est "tu m'appartiens".
01:10:33 En gros, si l'homme
01:10:35 exerce cette violence
01:10:37 et ce contrôle dont j'ai parlé,
01:10:39 c'est parce qu'il considère que sa femme lui appartient.
01:10:41 - La possession.
01:10:43 - Et quand on lit
01:10:45 le code civil de Napoléon,
01:10:47 globalement c'est ça quand même.
01:10:49 L'homme a le droit sur son
01:10:51 foyer quasiment de vie et de mort.
01:10:53 Et c'est ce qui n'est pas encore tout à fait gommé.
01:10:55 Et c'est pas si vieux que ça, donc effectivement
01:10:57 on progresse, mais pas assez vite.
01:10:59 - C'est gommé législativement, ça a été gommé récemment
01:11:01 à l'échelle historique, mais dans les mentalités.
01:11:03 Pourquoi plein d'hommes considèrent que
01:11:05 violer une femme qui dort,
01:11:07 c'est pas violer ? Pourquoi plein d'hommes considèrent que
01:11:09 si une femme recouche avec son violeur, alors
01:11:11 elle a pas été violée ? Vous voyez, c'est parce qu'en fait
01:11:13 notre corps, il est considéré
01:11:15 comme étant à la disposition de la personne
01:11:17 qu'on fréquente. - Enfin, ça relève aussi plus
01:11:19 de la déviance de ces hommes-là que d'un héritage
01:11:21 du code
01:11:23 et de Napoléon.
01:11:25 - Cette déviance, elle leur a été historiquement transmise.
01:11:27 On les a éduqués comme ça, l'éducation,
01:11:29 l'école, le H.E.O. a encore relevé la présence très forte
01:11:31 du sexisme à l'école. - Alors aujourd'hui,
01:11:33 justement, les jeunes... - Et de la pornographie.
01:11:35 - Voilà, j'allais y venir.
01:11:37 Est-ce qu'aujourd'hui, les jeunes sont
01:11:39 sensibilisés suffisamment ?
01:11:41 Non. Non. - Absolument pas.
01:11:43 - À toutes ces questions-là. - Il y a un gros travail
01:11:45 à faire sur les jeunes.
01:11:47 Et effectivement, aujourd'hui, on est dans une ère,
01:11:49 alors on voit, le H.E.O. en a
01:11:51 parlé, mais la délégation en droit des femmes du
01:11:53 Sénat a sorti un rapport sur
01:11:55 la pornographie, l'enfer du décor.
01:11:57 - Oui, j'ai vu ça. - On voit bien que les jeunes ont accès
01:11:59 à partir de 11 ans, et
01:12:01 le modèle qui est montré est clairement
01:12:03 un modèle d'un homme possesseur de la femme.
01:12:05 - Oui, le Sénat a fait un excellent travail, et je préciserai
01:12:07 d'ailleurs que Oser le féminisme est constitué
01:12:09 partie civile dans les procès contre l'industrie pornographique,
01:12:11 et que plusieurs hommes sont
01:12:13 en détention provisoire actuellement, des producteurs,
01:12:15 des réalisateurs. - Eh bien, merci
01:12:17 à tous, M. Tomasini, merci.
01:12:19 Merci à tous les trois d'être venus nous voir.
01:12:21 Encore une fois, je vais, après...
01:12:23 Merci d'avoir
01:12:25 participé à cette émission. Après
01:12:27 les infos, je vais revenir sur ce qui s'est
01:12:29 passé à Saint-Jean-de-Luz. Nous aurons
01:12:31 en ligne le secrétaire régional Nouvelle-Aquitaine
01:12:33 d'Alliance Police Nationale. Il y a des informations
01:12:35 à nous donner sur ce qui s'est passé.
01:12:37 Je vous rappelle qu'une femme,
01:12:39 une femme, professeure d'un établissement
01:12:41 privé de Saint-Jean-de-Luz,
01:12:43 est décédée après avoir été
01:12:45 poignardée par un élève. C'était ce matin.
01:12:47 L'élève a été interpellée.
01:12:49 A tout de suite. Il est 11h58.
01:12:51 Vous êtes sur Sud Radio.
01:12:53 - Bien, je voudrais tout de suite
01:12:55 que nous ayons... Nous essayons d'avoir
01:12:57 des informations sur ce qui s'est passé
01:12:59 à Saint-Jean-de-Luz. Vous savez qu'une
01:13:01 professeure d'un établissement
01:13:03 privé de Saint-Jean-de-Luz a été
01:13:05 poignardée par un
01:13:07 élève ou un ancien élève.
01:13:09 Nous allons en savoir un peu plus
01:13:11 avec Éric Maroc, qui est secrétaire
01:13:13 régional Nouvelle-Aquitaine, Alliance
01:13:15 Police Nationale. Bonjour
01:13:17 Éric Maroc.
01:13:19 - Bonjour, Jean-Luc. - Éric,
01:13:21 ça s'est passé ce matin dans un collège
01:13:23 lycée catholique, le collège lycée
01:13:25 Saint-Thomas d'Aquin, à Saint-Jean-de-Luz,
01:13:27 qui est un établissement
01:13:29 privé.
01:13:31 C'était donc ce matin,
01:13:33 c'est un élève qui a fait irruption
01:13:35 dans une classe
01:13:37 lors d'un cours ?
01:13:39 - Alors, je n'ai pas
01:13:41 les informations aussi précises
01:13:43 que vous venez d'avancer. Ce que je peux
01:13:45 vous dire, moi, c'est qu'une professeure
01:13:47 âgée de 50 ans, à l'occasion
01:13:49 d'un cours d'espagnol dans
01:13:51 son lycée, a été
01:13:53 victime d'un
01:13:55 ou plusieurs coups de couteau
01:13:57 par un individu mineur qui a été
01:13:59 interpellé sur les lieux.
01:14:01 - Voilà, il a été interpellé. Alors,
01:14:03 d'après les informations que j'ai de mon
01:14:05 côté,
01:14:07 c'est le journal Sud-Ouest qui les
01:14:09 donne. Il s'agit d'un professeur d'espagnol,
01:14:11 donc vous l'avez confirmé,
01:14:13 qui était en train de donner son cours à une classe
01:14:15 de seconde,
01:14:17 donc dans un lycée. L'auteur de
01:14:19 l'agression a fait irruption dans
01:14:21 la salle avec un couteau,
01:14:23 et l'a agressé.
01:14:25 - Jacques, je vous répète, je ne peux pas
01:14:27 confirmer cette version. J'ai des
01:14:29 collègues qui sont sur place, et vous savez
01:14:31 que dans les premières minutes d'une enquête criminelle
01:14:33 aussi médiatisée,
01:14:35 je me dois de protéger
01:14:39 la capacité opérationnelle de la PJ
01:14:41 Bayonne, qui est en train d'investiguer
01:14:43 pour faire la lumière
01:14:45 sur ce dramatique incident.
01:14:47 - D'abord,
01:14:49 il a été interpellé, ça vous pouvez le confirmer.
01:14:51 - Oui, et il est placé en garde à vue.
01:14:53 - Et il est placé en garde à vue.
01:14:55 Il est mineur ou pas ?
01:14:57 - Oui, il est mineur.
01:14:59 - Il est mineur. Donc on ne sait pas
01:15:01 si c'est un ancien élève ou pas
01:15:03 de cet professeur. On n'en sait pas
01:15:05 plus pour l'instant.
01:15:07 Et Eric, même si vous en savez plus,
01:15:09 vous ne me le direz pas, si j'ai bien compris.
01:15:11 - Je suis
01:15:13 soumis au devoir de réserve dans
01:15:15 une enquête criminelle.
01:15:17 Je comprends que vous soyez
01:15:19 avides d'informations, mais vous comprenez aussi
01:15:21 qu'il y a une famille
01:15:23 du côté de la victime, du côté de l'auteur,
01:15:25 et surtout des policiers professionnels,
01:15:27 qui doivent rendre compte au parquet,
01:15:29 et ce n'est pas à moi de faire la réponse à la presse.
01:15:31 - Évidemment, Éric.
01:15:33 Non, non, Eric Maroc, il n'y a aucun souci.
01:15:35 Je comprends très bien le ministre
01:15:37 de l'Éducation nationale,
01:15:39 Pap Ndiaye, va se rendre
01:15:41 sur place. Évidemment, la police,
01:15:43 le préfet du département,
01:15:45 le procureur de Bayonne, la rectrice
01:15:47 de l'académie, sont aussi
01:15:49 sur place, parce que
01:15:51 il est rarissime, c'est dramatique,
01:15:53 il est rarissime qu'un
01:15:55 élève poignarde
01:15:57 son professeur ou sa professeure.
01:15:59 C'était déjà arrivé.
01:16:01 Alors, nous allons essayer.
01:16:03 Évidemment, tout le monde pense à Samuel Paty,
01:16:05 mais il n'est pas
01:16:07 question de faire le rapprochement tout de suite.
01:16:09 Je ne veux pas des élèves,
01:16:11 des professeurs poignardés.
01:16:13 C'est extrêmement rare.
01:16:15 Merci, Éric Maroc.
01:16:17 Merci d'avoir été avec nous
01:16:19 et d'avoir pu donner ce que vous pouviez
01:16:21 nous donner comme informations.
01:16:23 Évidemment, si nous avons de nouvelles informations,
01:16:25 nous vous les donnerons.
01:16:27 Dans un instant, je vais recevoir mon confrère
01:16:29 Claude Ardide, qui publie une enquête inédite
01:16:31 au cœur de la brigade des mineurs
01:16:33 de Marseille.
01:16:35 Il publie un livre sur cette
01:16:37 enquête, "Les enfants du purgatoire",
01:16:39 aux éditions de l'Observatoire.
01:16:41 Il va
01:16:43 nous parler de tous
01:16:45 ces enfants,
01:16:47 ou pas enfants, adolescents,
01:16:49 qui vivent
01:16:51 la violence au quotidien,
01:16:53 qui subissent, qui sont responsables.
01:16:55 Allez, Claude Ardide,
01:16:57 dans deux minutes. A tout de suite, 12h11.
01:16:59 "Les enfants du purgatoire",
01:17:01 c'est
01:17:03 mon confrère Claude Ardide
01:17:05 qui publie ce livre, qui a pour titre
01:17:07 "Les enfants du purgatoire", aux éditions de l'Observatoire.
01:17:09 C'est une enquête inédite au cœur
01:17:11 de la brigade des mineurs de Marseille.
01:17:13 Claude Ardide, bonjour et merci d'être avec nous.
01:17:15 - Bonjour et merci de me recevoir. - C'est un remarquable travail.
01:17:17 Je le dis,
01:17:19 parce qu'il est remarquable de précision.
01:17:21 Et j'aime la précision.
01:17:23 Les faits, ce sont des faits.
01:17:25 Huit semaines d'enquête
01:17:27 auprès de cette brigade des mineurs.
01:17:29 Vous vous êtes installé, vous avez vécu avec eux
01:17:31 discrètement,
01:17:33 avec votre petit carnet, vous avez pris des notes.
01:17:35 Je connais ça par cœur.
01:17:37 Vous avez pris des notes et vous rapportez
01:17:39 dans ce livre
01:17:41 strictement ce que vous avez
01:17:43 entendu, ce que vous avez vu
01:17:45 et ce que vous avez vécu.
01:17:47 - C'est exactement ça. J'arrivais le matin
01:17:49 très très tôt à 7h30 pour prendre le café
01:17:51 avec les premières enquêtrices, enquêteurs
01:17:53 qui arrivaient pour
01:17:55 d'abord débriefer ce qui s'était passé la veille
01:17:57 et puis raconter ce qui éventuellement
01:17:59 allait se passer parce que quand vous êtes à la brigade
01:18:01 des mineurs, il peut se passer tout
01:18:03 et n'importe quoi à tout instant.
01:18:05 Et donc je m'installais dans
01:18:07 un bureau sur un siège
01:18:09 avec mes carnets, je prenais des notes
01:18:11 et soit
01:18:13 on venait me chercher,
01:18:15 parce que la brigade des mineurs de l'Evêché au 3ème étage
01:18:17 à Marseille, c'est un couloir de 30 mètres
01:18:19 de long, 5 bureaux,
01:18:21 4 groupes, maintenant il y en a 5
01:18:23 et puis les enquêtrices et enquêteurs
01:18:25 venaient me voir en me disant "Claude, on a une histoire d'inceste
01:18:27 est-ce que ça t'intéresse ?" Donc je filais dans le bureau
01:18:29 "Claude, on a un bébé secoué"
01:18:31 donc j'allais dans le bureau
01:18:33 et puis "Claude, on a une tentative d'assassinat
01:18:35 Claude, on a une agression sexuelle"
01:18:37 etc. Donc en fonction
01:18:39 des violences que subissent ou les nourrissons
01:18:41 ou les enfants
01:18:43 ou les adolescents, ou les femmes
01:18:45 parce qu'une brigade des mineurs c'est aussi aujourd'hui
01:18:47 ce qu'on appelle une unité de protection familiale
01:18:49 j'intervenais.
01:18:51 Mais je restais toujours dans un coin, je prenais des notes
01:18:53 et chaque fois les flics prenaient
01:18:55 le soin de dire "Vous avez un journaliste
01:18:57 dans le coin du bureau
01:18:59 est-ce que ça vous dérange ou pas ?"
01:19:01 Et que ce soit des mises en cause
01:19:03 ou que ce soit des victimes
01:19:05 les gens disaient "Non, non, il peut rester là"
01:19:07 et donc ça m'étonnait parce que je pensais
01:19:09 que je pouvais éventuellement déranger
01:19:11 le maire de l'Éclaration. Mais les mises en cause
01:19:13 ils sont tellement sonnées parce qu'ils sont en garde à vue
01:19:15 qu'en fait ils s'en foutent un peu
01:19:17 et les victimes
01:19:19 c'est le contraire
01:19:21 c'est-à-dire qu'ils sont là pour témoigner
01:19:23 et pour faire en sorte qu'un journaliste
01:19:25 puisse être leur porte-parole
01:19:27 et dire les violences dont ils sont victimes.
01:19:29 - Donc, lors de ce travail
01:19:31 vous avez rencontré
01:19:33 des hommes, des femmes, des enfants
01:19:35 des adolescents, des victimes
01:19:37 des auteurs
01:19:39 de meurtres
01:19:41 des meurtriers
01:19:43 enfin des agresseurs
01:19:45 toutes sortes de violences
01:19:47 toutes formes de violences
01:19:49 des hommes, des femmes, parce qu'il y a aussi
01:19:51 violence de la part des femmes
01:19:53 enfin bon
01:19:55 vous commencez
01:19:57 le premier chapitre de votre livre
01:19:59 c'est ce drame à Marseille
01:20:01 dont on avait beaucoup parlé, qui avait été très
01:20:03 médiatisé, cet homme qui a tué
01:20:05 sa mère, qui a tué sa femme
01:20:07 qui a agressé
01:20:09 à coups de couteau sa fille aînée
01:20:11 et qui, bon
01:20:13 les deux sont mortes, les deux femmes sont mortes
01:20:15 la jeune fille est vivante
01:20:17 aujourd'hui et elle a
01:20:19 une phrase, attendez, il faudrait que je retrouve
01:20:21 la phrase
01:20:23 étonnante
01:20:25 la fille aînée de cet homme qui dit
01:20:27 je crois que ça faisait du bien à mon père
01:20:29 de me poignarder, il y prenait
01:20:31 du plaisir. - Oui c'est exactement ça
01:20:33 elle dit deux choses cette gamine
01:20:35 qui sont faudroyantes, alors moi c'est
01:20:37 arrivé au moment où je m'installais à la brigade
01:20:39 des mineurs, j'ai du mal à le croire
01:20:41 parce que là en l'occurrence la réalité dépasse
01:20:43 toujours la fiction, et
01:20:45 donc les enquêtrices qui me racontent cette histoire
01:20:47 après j'ai regardé un certain nombre
01:20:49 de synthèses pour essayer de mieux
01:20:51 m'imprégner de cette affaire, la gamine
01:20:53 dit deux choses qui sont intéressantes, la première
01:20:55 c'est qu'elle dit "ma mère était
01:20:57 dans une mare de sang en train d'agoniser"
01:20:59 parce que son mari venait de
01:21:01 la poignarder, donc le père de cette gamine
01:21:03 et cette femme qui est au sol
01:21:05 qui vit dans une mare de sang
01:21:07 c'est une tête de chapitre du livre
01:21:09 dit, sa mère
01:21:11 dit à cette gamine "je t'en supplie
01:21:13 ma fille, achève-moi, achève-moi, je
01:21:15 souffre". Elle demande à sa fille
01:21:17 de l'achever parce qu'elle est dans la souffrance horrible
01:21:19 et elle va mourir quelques minutes après
01:21:21 et deuxièmement, elle dit
01:21:23 à la brigade des mineurs
01:21:25 elle dit qu'elle
01:21:27 avait le sentiment que
01:21:29 son père allait lui faire
01:21:31 du bien en la faisant disparaître, c'est-à-dire
01:21:33 qu'est-ce qu'il a été pris par
01:21:35 une crise mystique, une crise de délire
01:21:37 est-ce qu'il a cru qu'en tuant ses enfants
01:21:39 il irait plus vite au paradis, je sais pas
01:21:41 mais en tout cas c'est exactement
01:21:43 ce que dit cette gamine
01:21:45 et quand les gamins disent ça
01:21:47 ils trichent pas, c'est la vérité. - Bien sûr.
01:21:49 - Ils ne mentent jamais,
01:21:51 ils n'inventent pas. - Alors justement,
01:21:53 ils ne mentent jamais, ce que j'ai aimé
01:21:55 il y a deux choses que j'ai aimées dans votre livre
01:21:57 Claudard d'Hyde, la première c'est que
01:21:59 vous racontez
01:22:01 ce que vous avez vu
01:22:03 des violeurs de petites filles
01:22:05 des violeurs de jeunes garçons
01:22:07 des pères et des mères incestueux
01:22:09 des agresseurs sexuels, des meurtriers
01:22:11 des ventards, vous dites des pervers
01:22:13 narcissiques, des paumés, des cinglés
01:22:15 enfin vous avez vu
01:22:17 et vous avez vu parallèlement le travail
01:22:19 de ces hommes et de ces femmes
01:22:21 de cette brigade, qui ne jugent
01:22:23 jamais, qui sont
01:22:25 qui ne jugent jamais.
01:22:27 - Alors ils jugent jamais, alors quand je suis arrivé
01:22:29 le premier jour, je suis allé chez un enquêteur
01:22:31 une enquêtrice m'a dit "Claude, on va aller
01:22:33 ensemble au fond du caniveau" première chose
01:22:35 deuxième chose, Nadia
01:22:37 tout le monde ne savait pas que c'était un jour à elle parce que j'étais tellement discret
01:22:39 Nadia est arrivée vers moi, c'est le
01:22:41 gropin, et elle me dit "mais vous êtes qui ?"
01:22:43 elle me dit "vous êtes un boeuf carotte
01:22:45 vous êtes un..." parce que je passais d'un couloir à un autre, d'un bureau à un autre
01:22:47 elle me dit "vous êtes l'avenue de Moses Pionnet"
01:22:49 je lui dis "non je suis journaliste et je fais un livre
01:22:51 sur la brigade des minéraux" et là elle me dit
01:22:53 "bienvenue à la boutique des horreurs"
01:22:55 - Il est vrai que quand
01:22:57 on feuillette votre livre, on les croise
01:22:59 ces horreurs, parce que vous vous rapportez
01:23:01 fidèlement ce que vous avez
01:23:03 entendu et ce que vous avez vu, donc on les
01:23:05 croise ces horreurs. - Alors on les croise ces
01:23:07 horreurs, mais en même temps on croise des hommes et des femmes
01:23:09 hier Eric, qui était
01:23:11 un des chefs de groupe, m'a envoyé
01:23:13 un texto, il m'a dit "tu parles beaucoup
01:23:15 des enquêtrices, tu ne parles pas assez des mecs"
01:23:17 alors en fait la brigade des mineurs de Marseille
01:23:19 c'est sur 30 policiers
01:23:21 il y a 23 femmes, qui sont
01:23:23 extraordinaires, d'une humanité absolue
01:23:25 qui sont d'un humour
01:23:27 je ne sais pas si c'est typiquement marseillais, mais d'un humour
01:23:29 délirant, et puis Eric m'a
01:23:31 envoyé un texto hier soir
01:23:33 il me disait "tu sais on a eu 4
01:23:35 mises en cause dans des affaires de violence
01:23:37 aux enfants, aux femmes, aux adolescents
01:23:39 on a 4 déférés, c'est à dire 4 personnes
01:23:41 qui sont allées en prison, et pour eux c'est une victoire
01:23:43 ça veut dire que quand ils vont
01:23:45 jusqu'au bout d'une affaire et que
01:23:47 l'agresseur, le mis en cause
01:23:49 va en détention, pour eux c'est
01:23:51 une réussite, parce que leur enquête a abouti
01:23:53 à quelque chose, ils ont surtout
01:23:55 sauvé des enfants, mais moi
01:23:57 c'est un mystère pour moi, je suis
01:23:59 resté un peu plus de 2 mois, parce que je faisais
01:24:01 des allers-retours entre Toulon
01:24:03 chez moi et la brigade des mineurs, et je
01:24:05 me disais tous les jours
01:24:07 comment elles font pour tenir ?
01:24:09 Comment ils font pour
01:24:11 tenir avec toute l'horreur ?
01:24:13 - Oui, cette horreur au quotidien
01:24:15 côtoyer au quotidien !
01:24:17 - En plus, il y a des groupes
01:24:19 qui travaillent sur le flagrant délit
01:24:21 des groupes qui sont de permanence, ils ne savent jamais
01:24:23 ce qui va leur tomber, jamais !
01:24:25 C'est à dire qu'à 10h elles sont en train de boire le café
01:24:27 de rigoler, et puis d'un coup
01:24:29 vous avez quelqu'un qui téléphone
01:24:31 et qui leur dit "voilà il y a une femme qui a été
01:24:33 massacrée par son ex-conjoint
01:24:35 et son ex-conjoint
01:24:37 a essayé de fracasser sa fille
01:24:39 etc. Donc vous voyez un mec arriver
01:24:41 avec les menottes
01:24:43 et puis qui s'installe dans un bureau, et puis dans le bureau
01:24:45 d'à côté vous avez une affaire d'inceste
01:24:47 qui est en train d'éclater
01:24:49 parce qu'il y a une histoire à Marseille
01:24:51 absolument incroyable, où une gamine
01:24:53 qui a été violée par son grand-père
01:24:55 pendant un barbecue familial
01:24:57 a libéré la parole de sa propre mère
01:24:59 qui avait été violée
01:25:01 par son père, et de fil en aiguille
01:25:03 du témoignage de cette petite fille de 5 ans
01:25:05 au témoignage de la mère qui dit
01:25:07 "oui mon père m'a violée il y a 15-20 ans"
01:25:09 la nièce a aussi raconté qu'elle avait été violée
01:25:11 donc l'OMERTA
01:25:13 qui pesait cette famille a explosé
01:25:15 tout ça grâce
01:25:17 aux auditions, la façon
01:25:19 de procéder, de poser les questions
01:25:21 pour ramener l'enfant
01:25:23 - De l'attention portée au lecteur
01:25:25 - Quand vous êtes dans un voyage
01:25:27 imaginez, on est dans un studio
01:25:29 vous êtes avec deux enquêtrices
01:25:31 vous avez des mises en cause, ou des victimes en même temps
01:25:33 etc, vous êtes dans un vie-clos
01:25:35 et moi j'écoutais
01:25:37 et je me disais "c'est pas possible"
01:25:39 si j'avais une caméra
01:25:41 s'il avait été une fiction
01:25:43 on m'aurait traité de scénariste ou de réalisateur
01:25:45 mythomane. Là je l'ai écrit
01:25:47 c'est la pure réalité
01:25:49 mais je me dis la réalité dépasse 100 fois
01:25:51 la fiction parce qu'on arrive
01:25:53 soit à des aveux au moment
01:25:55 où vous y attendez le moins, moi j'ai vu un mec
01:25:57 29 ans après un viol
01:25:59 il avait violé la fille de sa compagne
01:26:01 qui craque
01:26:03 et qui avoue
01:26:05 en disant "mais c'est pas grave, je l'ai violée"
01:26:07 - C'est cet homme de 78 ans ?
01:26:09 - Non, c'est un gars, un travailleur
01:26:11 père de trois enfants
01:26:13 - Ah bon, parce qu'il y a un autre dans l'histoire
01:26:15 qui craque, qui a 78 ans
01:26:17 et sa belle-fille
01:26:19 à 40 et quelques années
01:26:21 - Elle le supplie de dire la vérité
01:26:23 - Elle le supplie, exactement
01:26:25 - Elle lui dit "mais dis la vérité
01:26:27 rends-moi ma dignité"
01:26:29 lui il ne va pas craquer
01:26:31 il y a un deuxième homme
01:26:33 qui a 75 ans
01:26:35 qui est un beau mec, un mec qui s'est évadé
01:26:37 à la prison des Beaumet, un braqueur
01:26:39 - Un peu proxénète aussi
01:26:41 - Oui un peu proxénète, etc
01:26:43 et lui, première audition, il dit "non, non, non
01:26:45 c'est pas vrai, c'est pas vrai"
01:26:47 moi je suis derrière, je sens que le mec peut craquer
01:26:49 à tout instant, vous le sentez, vos attitudes physiques
01:26:51 dès lors qu'un homme
01:26:53 qui est entendu par les enquêteurs
01:26:55 s'est affaissé, il y a un souffle au cou
01:26:57 vous vous dites "là il ne va pas tarder à craquer"
01:26:59 moi j'étais là, j'avais tout le temps pour observer
01:27:01 deuxième audition, et là, le flic
01:27:03 Alex, utilise une méthode
01:27:05 qui est assez intelligente, il dit "mais en fait
01:27:07 vous êtes un beau mec, vous êtes un braqueur
01:27:09 vous êtes respecté
01:27:11 à la prison des Beaumet, tout le monde dit
01:27:13 que vous étiez un voyou
01:27:15 de haut niveau, etc
01:27:17 et vous avez violé une gamine pendant des années
01:27:19 vous vous rendez compte
01:27:21 que vous allez mourir avec cette espèce
01:27:23 de culpabilité, etc, et que cet enfant
01:27:25 qui aujourd'hui est une jeune fille
01:27:27 ou une femme, n'aura jamais
01:27:29 récupéré sa propre dignité
01:27:31 et là, je suis derrière
01:27:33 le gars d'un coup, il se fait, il dit
01:27:35 "oui c'est vrai, je l'ai violé"
01:27:37 là vous dites, c'est extraordinaire
01:27:39 parce que le boulot des enquêteurs
01:27:41 des enquêtrices, le fait
01:27:43 qu'on soit arrivé à
01:27:45 lui faire dire la vérité, c'est formidable
01:27:47 et dans le cas de cet homme qui a une cinquantaine
01:27:49 d'années, qui a violé la fille de sa compagne
01:27:51 vingt ans plus tôt, le gars
01:27:53 à un moment donné, il dit
01:27:55 "mais j'ai commis, j'ai fait des bêtises
01:27:57 il y a 29 ans, c'est pas un viol, il y a 29 ans
01:27:59 c'est fini" et là, l'enquêtrice
01:28:01 Andrine dit, et Valérie qui est à côté
01:28:03 qui est la chef de groupe, il dit "mais monsieur, même 29 ans
01:28:05 après, un viol reste un viol"
01:28:07 et là le mec, il s'effondre
01:28:09 - Et là le mec s'effondre
01:28:11 - Je vois
01:28:13 oui, il a violé sa fille, sa
01:28:15 petite fille, sa nièce, et personne dans son
01:28:17 entourage n'a rien dit pendant des décennies
01:28:19 - Oui, parce que la nièce
01:28:21 et la mère de cette gamine qui a été violée
01:28:23 donc c'était en septembre, octobre dernier
01:28:25 avaient parlé
01:28:27 à leur mère, à leur marraine
01:28:29 à l'entourage familial
01:28:31 la nièce avait parlé aussi, elles étaient en psychothérapie
01:28:33 elles avaient des problèmes
01:28:35 pour avoir une sexualité normale, etc
01:28:37 et tous les membres de la famille
01:28:39 leur disaient "mais tais-toi, ne dis rien
01:28:41 ça va déclencher un scandale"
01:28:43 donc ces femmes ont dit
01:28:45 qui étaient des gamines, ont dit "bon ben je me tais"
01:28:47 elles ont gardé le silence pendant des années et des années
01:28:49 - Le quotidien de la brigade
01:28:51 des mineurs de Marseille, je vous invite
01:28:53 vraiment à lire ce livre parce que c'est absolument
01:28:55 passionnant, "Les enfants du purgatoire"
01:28:57 de Claude Ardide, je regarde la quatrième de couverture
01:28:59 et ça résume bien
01:29:01 il y a toujours
01:29:03 plus d'enfants esquintés, de familles
01:29:05 disloquées, de jeunes obligés de se vendre
01:29:07 sans compter un manque cruel de moyens
01:29:09 pour la police et la justice, parce que vous
01:29:11 c'est en filigrane
01:29:13 tout au long de l'ombre
01:29:15 - J'ai répondu aux enquêtrices
01:29:17 et inquéteurs de la brigade des mineurs mais j'ai rencontré
01:29:19 deux juges pour enfants de Marseille qui sont
01:29:21 extraordinaires - Ce livre met aussi
01:29:23 en lumière l'investissement, l'abnégation
01:29:25 le sens du devoir unique de ces fonctionnaires
01:29:27 la majorité sont des femmes
01:29:29 vous l'avez dit, dont la mission, souvent
01:29:31 une vocation, est aujourd'hui plus
01:29:33 qu'essentiel. Merci pour eux
01:29:35 - C'est moi - Pour elles et pour eux
01:29:37 - C'est moi qui vous remercie, c'est formidable d'être là
01:29:39 - Non, enquête inédite
01:29:41 au coeur de la brigade des mineurs de Marseille aux éditions
01:29:43 de l'Observatoire. Merci
01:29:45 de nous avoir accompagnés depuis 10h30 ce matin
01:29:47 c'est l'heure d'André Bercoff