Paris se vide, Hidalgo s’en vante

Europe 1

Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi. Retrouvez "Voyage en absurdie" sur : http://www.europe1.fr/emissions/chronique-en-absurdie

Transcript

00:00 - Emmanuel Ducrox, place à vous du journal L'Opinion.

00:03 Paris se dépeuple, Céline sait qui nous le dit, en 10 ans.

00:06 La capitale a perdu 123 000 habitants.

00:08 On ne compte plus que 2 100 000 habitants à Paris l'an dernier.

00:12 Et ça n'inquiète pas beaucoup Anne Hidalgo, qui est maire de la capitale depuis 2014.

00:17 - La population de la capitale est au plus bas depuis 20 ans.

00:20 Les familles fuient.

00:21 Paris est une ville où on ne fait plus que passer.

00:23 La natalité est en chute libre.

00:25 Entre 2011 et aujourd'hui, la natalité a acheté de 25 % dans la capitale.

00:30 C'est une ville repoussoir.

00:32 Ça va à rebours du destin des grandes métropoles européennes.

00:35 Mais contre toute attente, la maire de Paris, Anne Hidalgo,

00:37 invitée de France Info mardi matin, s'en est félicitée sur le mode

00:40 "fait de chaque défaite une victoire".

00:43 Ce n'est pas une bonne nouvelle qu'une capitale se vide, dit-elle.

00:46 Mais que Paris se dédensifie, oui.

00:48 - Ah oui, question de point de vue.

00:49 Alors tout est dans le choix des mots.

00:51 - Ah oui, la dédensification, c'est le nouveau nom de la fuite des habitants.

00:55 Et à en croire la maire, une nécessité pour que les Parisiens puissent mieux vivre.

01:00 Alors que la ville a une densité moyenne élevée de 20 500 habitants au km2,

01:05 que les habitants s'en aillent, c'est un moyen d'avoir plus de parcs,

01:08 plus de jardins, plus d'air, moins de voitures et plus de nature.

01:10 C'est une citation.

01:11 Si seulement c'était ça, on les cherche encore.

01:14 Et puis, c'est quand même un contresens écologique.

01:16 La ville danse contre toute attente.

01:18 On n'a pas trouvé mieux pour économiser les ressources,

01:21 éviter la bétonisation des campagnes et optimiser toutes les infrastructures.

01:24 Mais ça, évidemment, ça se vend mal à l'électorat rikiki d'Anne Hidalgo,

01:28 qui rêve de forêt urbaine et d'agriculture vivrière de balconière.

01:32 - Il y avait donc trop de Parisiens ?

01:34 - Il faut croire.

01:34 Étrange message que délivre la maire de Paris à ses administrés,

01:38 ou plutôt à ses futurs ex-administrés.

01:40 Débarrasser le plancher, c'est mieux pour ceux qui restent.

01:43 Alors d'ordinaire, on entend les maires dire qu'ils font tout pour que leur ville fasse envie.

01:48 Là, on affiche une volonté décomplexée de l'entre-soi cycliste,

01:51 éco-responsable participatif, compter sur le découragement d'une partie des habitants

01:56 pour donner de l'air aux autres.

01:57 C'est une conception de la politique assez spéciale.

01:59 Courage les Parisiens, quand les autres auront jeté l'éponge, ça ira mieux.

02:03 - La dédensification est vue comme une victoire personnelle par Anne Hidalgo.

02:07 - Plus c'est gros, mieux ça passe.

02:09 Cette dédensification a été voulue.

02:12 On l'a construite avec le Grand Paris, s'est réjoui Anne Hidalgo,

02:15 dans la petite couronne et dans la grande couronne

02:17 où l'on subit le cavalier seul perpétuel de la capitale

02:20 sur les plans de circulation et sur absolument toutes les initiatives.

02:23 On s'étrangle, les habitants des banlieues, les artisans par exemple,

02:27 éjectés de Paris où leurs camionnettes sont indésirables,

02:29 ils doivent trouver ça sacrément gonflé.

02:31 - Mais Anne Hidalgo n'incrimine pas le bruit, les travaux, les bouchons,

02:35 la saleté, le manque d'entretien ou encore l'insécurité dans la fuite des habitants.

02:39 - Eh bien écoutez, pas une seconde.

02:41 "Oh écoutez, ben non enfin !" a-t-elle répondu quand on lui a posé la question.

02:45 - C'est comme ça, elle l'a dit ?

02:46 - Oui, je le fais sans le ton, mais "Oh écoutez, ben non enfin !"

02:49 - C'est pas mal.

02:51 - Il y a un problème du coût du logement.

02:53 Oui, ça à l'entendre, c'est à peu près le seul qu'elle reconnaît,

02:56 mais elle accélère sur le logement social.

02:59 La ville est ultra accueillante pour les familles,

03:02 c'est bien connu, rien à signaler, tout va absolument bien.

03:05 Tellement bien qu'il y a même de quoi faire des sauts périlleux rhétoriques.

03:08 Le fait que la capitale se vide, ça montre même, et c'est encore une citation,

03:12 l'attractivité de Paris, oui oui, sur le plan international et économique.

03:17 Avoir dégoûté les habitants au point que la capitale ne fasse plus rêver

03:20 que les touristes et les millionnaires qui ont les moyens d'y acheter,

03:22 c'est une grande victoire.

03:24 Paris était une fête, c'est désormais une fuite.

03:26 - Oui, et alors les JO, elle a aussi parlé des Jeux Olympiques sans climatisation,

03:30 a-t-elle expliqué Anne Hidalgo, malgré l'inquiétude de nombreuses délégations

03:33 du risque de canicule.

03:34 Elle dit "Il n'y aura pas besoin, j'ai beaucoup de respect pour le confort des athlètes,

03:38 mais je pense beaucoup plus à la survie de l'humanité."

03:41 Quelle phrase !

03:42 - Quelle grande âme !

03:43 - Merci beaucoup Emmanuelle Ducroch.

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