Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • 06/02/2023
Chroniqueur : Thomas Sotto 


Thomas Sotto reçoit Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, dans les 4 vérités. 

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00 [Musique]
00:03 Bonjour et bienvenue dans les 4V, Philippe Martinez.
00:05 Bonjour.
00:05 Nous allons bouger, a dit Elisabeth Borne dans le journal du dimanche hier.
00:08 Est-ce que vous êtes prêt à bouger avec la Première Ministre ?
00:10 Ça dépend dans quel sens on bouge.
00:13 Pour l'instant, c'est des petits bougers et ça ne correspond pas aux attentes
00:18 qu'expriment les manifestants, les grévistes et l'opinion publique en France.
00:22 Mais ce qu'elle dit sur les carrières longues par exemple, c'est pas intéressant ?
00:25 Vous ne prenez pas ça quand même ? Vous ne mettez pas à son crédit ?
00:28 Non mais on voit que les mobilisations, ça pèse puisqu'elle est obligée de revoir sa copie.
00:32 Mais ne le conteniez pas, c'est du bricolage ce qu'elle fait.
00:35 Même avec ce qu'elle propose sur les carrières longues, on va quand même travailler plus longtemps.
00:40 Le débat parlementaire va débuter aujourd'hui, c'est donc aussi là que ça va se jouer dans l'hémicycle.
00:44 Est-ce que vous allez le suivre ? Est-ce qu'il vous intéresse ce débat parlementaire ?
00:47 Bien sûr qu'on le suit, mais pour voir comment se positionnent les uns et les autres
00:52 et puis comment les élus de la République écoutent l'opinion publique, écoutent les citoyens
00:58 parce qu'ils sont quand même élus par les citoyens.
01:00 Mais ce n'est pas la rue qui gouverne ?
01:03 Ce n'est pas la rue qui gouverne, je ne sais pas.
01:05 En tout cas c'est la rue qui élit les députés.
01:09 Et les députés sont censés représenter le peuple.
01:14 Or quand ils votent des lois qui sont contraires à ce que veut le peuple, il y a un problème démocratique.
01:20 Ils seraient illégitimes à voter cette réforme, les députés ?
01:23 Ils seraient à contre-courant de la majorité de l'opinion publique et là aussi ça pose un problème démocratique.
01:31 On ne peut pas se faire élire pour cinq ans et pendant cinq ans faire ce qu'on veut.
01:36 Il me semble qu'il y a quelques manifestations en ce moment, il y en a encore une demain, il y en aura une samedi, il y a des grèves.
01:42 Il y a des sondages qui montrent que toute catégorie et socioprofessionnelle de tout âge,
01:47 les citoyens de ce pays et les citoyennes sont contre cette réforme.
01:51 C'est ça qu'il faut écouter.
01:53 Dans les faits il se peut que cette réforme passe, avec les 64 ans, cette mesure d'âge contre laquelle tous les syndicats se mobilisent,
01:59 et qu'elle passe de manière démocratique.
02:01 Du coup, est-ce que l'intérêt des salariés et des travailleurs que vous défendez n'est pas d'obtenir des avancées sur d'autres sujets ?
02:06 La pénibilité, les carrières longues, les femmes, l'emploi des seniors, etc.
02:09 Est-ce que c'est un des enjeux de ce qui se passe à l'Assemblée ou est-ce que pour vous c'est 64 ans ou rien ?
02:13 Pour nous, comme pour tous les syndicats, vous avez raison de le signaler, il n'y a pas que pour nous, c'est 64 ans.
02:20 Et l'allongement de la durée des cotisations, ce n'est pas acceptable.
02:23 Après, les avancées, il faut des avancées dans le cadre de la réforme, ou en tout cas du système de retraite qu'il y a aujourd'hui en France.
02:32 Oui, il y a un problème, j'ai entendu, il y a un problème de l'emploi des seniors dans notre pays.
02:36 Qu'est-ce qu'on fait ? Il y a un problème d'égalité entre les femmes et les hommes.
02:41 Qu'est-ce qu'on fait ? Il y a cette jeunesse qui, à juste titre, fait des...
02:44 Donc là, vous comptez sur l'Assemblée pour traiter ces sujets-là aussi ?
02:46 Non, on compte sur le fait qu'il y ait des mobilisations pour que les élus de la République prennent en compte l'avis des citoyens.
02:53 C'est quand même normal dans une démocratie qu'on est élu, on ne fait pas ce qu'on veut.
02:58 Ils ont un mandat représentatif, ils n'ont pas un mandat impératif.
03:01 D'accord, enfin, ils font ce qu'ils veulent.
03:05 Mais enfin, quand on est censé représenter le peuple, l'opinion du peuple, ça compte.
03:10 Ou alors, c'est un autre système.
03:12 Après, certains vous diront qu'il y a peut-être un ou deux millions de personnes dans la rue, il y a 67 millions de Français aussi.
03:17 Donc, c'est pas non plus... Est-ce que ça peut vraiment se jouer comme ça ?
03:19 Mais, il y a... Enfin, tout ça, ça dépend des sources, mais nous, on a compté plus d'un million de personnes dans la rue.
03:24 Il y a des grèves, il y a les sondages d'opinion publique.
03:27 Il n'y en a pas un qui dit qu'il y a moins de 65 ou 67% des citoyens et des citoyennes de ce pays qui sont pour cette réforme.
03:35 Ça aussi, c'est à prendre en compte.
03:37 Ce qui est sûr, c'est que le débat risque d'être entravé par les très nombreux amendements qui ont été déposés.
03:41 Il y en a environ 20 000, 18 000 par la NUPES.
03:44 Ça porte un nom, ça s'appelle de l'obstruction.
03:46 Vous la soutenez, cette obstruction, ou vous la regrettez ?
03:49 Écoutez, moi, je ne suis pas un spécialiste des procédures parlementaires.
03:53 Ce qu'il faut...
03:55 Sans être spécialiste, on ne voit pas très bien ce que ça veut dire.
03:57 Ça veut dire empêcher le débat de se dérouler.
03:59 Ce qu'il faut, c'est qu'il y ait des débats et qu'on puisse voir quel député soutient ou non le report de l'âge à 64 ans.
04:09 Pourquoi ? C'est presque menaçant, ce que vous dites, là, non ?
04:12 Non, c'est juste pour savoir si les députés, ce que je vous disais tout à l'heure,
04:16 c'est pour savoir si les élus du peuple écoutent le peuple ou non.
04:22 Et c'est grave, parce que, vous dites que c'est une procédure démocratique.
04:25 Alors j'ai entendu Mme Borne qui disait "pas de 49.3", enfin, on verra.
04:30 Mais sur une telle réforme, empêcher le débat parlementaire,
04:34 moi, je ne sais pas, ils se renvoient tous la balle,
04:36 mais empêcher le débat parlementaire et faire en sorte qu'on passe en force un tel sujet,
04:42 je pense que ça aura des conséquences.
04:44 Donc vous, vous souhaitez que le débat ait lieu et qu'il n'y ait pas de 49.3, c'est un bon résumé de votre sujets ?
04:48 Bien sûr, bien sûr.
04:49 Une question à laquelle aucun responsable syndical ne répond aucun.
04:52 Si le texte passe à l'Assemblée nationale, il se passe quoi derrière ?
04:55 En tout cas, pour la CGT, la réponse est claire, on continue.
04:58 La mobilisation continuera ?
04:59 On continue, parce qu'on considérera que c'est un texte qui a été voté
05:05 contre l'avis majoritaire des citoyens et des citoyennes de ce pays.
05:09 Je vous repose la question, mais pour vous, le Parlement est illégitime aujourd'hui ?
05:12 Non, il n'est pas illégitime, mais un Parlement et des députés
05:16 ne peuvent pas faire ce qu'ils veulent sans tenir compte de l'avis de ceux qui ont voté pour eux,
05:22 enfin de ceux qui continuent à voter, parce que je pense qu'y compris
05:26 si le Parlement va à l'encontre de l'opinion publique, ça aura des conséquences.
05:31 Donc c'est un problème démocratique que cette Assemblée vote ce texte ?
05:33 Oui.
05:34 Quelques mots de la retraite des députés, sénateurs et fonctionnaires des deux Assemblées.
05:38 Elle est aujourd'hui plus favorable que celle des autres, faut-il qu'ils s'alignent eux aussi ?
05:42 Non, mais la position de la CGT, ce n'est pas de s'aligner vers le pire,
05:48 c'est de s'aligner vers le meilleur.
05:50 Donc je ne connais pas en détail là non plus les retraites des sénateurs et des députés.
05:56 Ce qu'il faut, c'est qu'on prenne en compte la réalité du travail,
06:01 et c'est ce qui nous motive pour dire qu'on ne peut pas reculer l'âge de la retraite.
06:05 Et il faut des retraites anticipées pour bon nombre de métiers pénibles,
06:10 et ceux qui bénéficient de régimes dits spéciaux,
06:14 ce n'est pas à eux qu'on doit viser, mais aligner ceux qui n'en ont pas encore.
06:18 Vous avez un autre sens.
06:20 Exactement, vous avez tout compris.
06:21 Ce mouvement pour l'instant, il reste populaire, vous le disiez tout à l'heure,
06:23 soutenu par l'opinion, en tout cas si on en croit les sondages.
06:26 On sait que demain et dès ce soir, le trafic va être perturbé dans les transports en commun,
06:30 ce sera une nouvelle fois compliqué.
06:32 Faut-il y aller mollo sur la grève à la SNCF pour que le mouvement reste populaire,
06:35 ou est-ce que ça n'a rien à voir ?
06:37 Je pense que ça n'a rien à voir.
06:39 Il y a des journées de grève qui sont prévues demain et après-demain,
06:43 et on verra par la suite comment évolue ce mouvement.
06:47 Pour l'instant, c'est le gouvernement qui nous oblige à hausser le ton,
06:52 puisque malgré les manifestations, malgré l'opinion publique,
06:55 pour l'instant, vous l'avez dit, il y a quelques petits bougés,
06:58 mais sur le fond, il n'y a rien qui change.
07:00 Donc, j'allais dire, c'est contraint et forcé qu'on est obligé de hausser le ton.
07:05 De durcir ? Vous allez durcir ?
07:07 Samedi, par exemple, c'est une journée de manifestation et de grève,
07:11 ou juste de manifestation ?
07:12 Samedi, c'est une journée de manifestation,
07:14 parce que dans ce pays, encore la majorité des gens ne travaillent pas le samedi,
07:19 par la télévision.
07:21 Est-ce que vous appelez à des grèves samedi et des grèves à la SNCF ?
07:24 Ceux qui bossent, il y aura peut-être des grèves.
07:27 L'objectif de cette mobilisation de samedi,
07:30 c'est de permettre à des personnes qui ont du mal,
07:34 pour des raisons que tout le monde peut comprendre,
07:36 soit de pouvoir...
07:37 Leur coût de pas une journée de salaire.
07:38 Évidemment, et même leur emploi,
07:40 parce que vous savez qu'il y a des précaires, des intérimaires,
07:42 qui s'ils annoncent qu'ils font grève, ils sont dehors tout de suite.
07:44 Ma question concerne la SNCF pour samedi.
07:46 Est-ce que vous souhaitez qu'il y ait des grèves à la SNCF ?
07:47 Ou est-ce que vous dites, vous entendez l'appel à la responsabilité lancée par Clément Beaune ?
07:50 Pour l'instant, non, non, j'écoute pas Clément Beaune.
07:53 Lui, il veut faire reculer l'âge de la retraite,
07:55 donc c'est pas lui qu'on écoute.
07:56 Pour l'instant, il n'y a pas de mot d'ordre de grève samedi à la SNCF.
07:59 Est-ce que vous souhaitez qu'il y en ait un ?
08:01 C'est les salariés qui décideront,
08:04 mais je vous dis, pour l'instant, il n'y a pas d'appel à la grève.
08:08 Mais je vous ai dit aussi que si on n'est pas entendu,
08:12 je pense que le climat va largement se dégrader.
08:16 Vous avez peur que ça dégénère ?
08:17 Non, non, pas du tout.
08:19 Je pense que, et ça a été souligné,
08:21 les manifestants, les grévistes sont responsables, comme d'habitude.
08:26 C'est un mouvement qui est responsable,
08:28 mais un mouvement qui est déterminé.
08:29 On évoquait Clément Beaune, un autre ministre que vous connaissez bien,
08:32 Olivier Dussopt, le ministre du Travail, est soupçonné de favoritisme.
08:35 Il est visé par une enquête du parquet national financier.
08:37 Est-ce que c'est un problème pour vous ?
08:39 Si les faits sont avérés, c'est un grave problème, oui.
08:44 Mais est-ce qu'aujourd'hui, c'est un problème, cette étape de la transition ?
08:46 Elisabeth Borne lui a conservé toute sa confiance.
08:48 C'est normal, elle n'allait pas le lâcher tout de suite, quand même.
08:51 Je suis comme vous, on va regarder ce qui se passe,
08:54 mais si ça s'avère vrai, c'est un problème, oui.
08:58 Tous ceux qui nous donnaient des leçons de morale, de vertu,
09:01 et qui peuvent être impliqués dans ce style d'affaires, c'est un problème, oui.
09:05 Mais il reste légitime à son poste aujourd'hui ?
09:07 Je ne connais pas le fond de cette affaire, ce que vous voulez que je vous dise.
09:13 Vous êtes vigilant.
09:14 Plus que vigilant, oui.
09:16 On sait que la politique, comme le syndicalisme, c'est prendre et donner des coups.
09:20 Elisabeth Borne a été touchée humainement que Laurent Berger l'accuse de manque d'empathie,
09:23 et que Fabien Roussel, du Parti communiste, la compare à Margaret Thatcher.
09:26 Vous comprenez que ça la chagrine ou pas ?
09:28 Mais si elle avait un peu les deux pieds sur terre,
09:32 et qu'elle écoute un peu tous les témoignages que j'entends chez vous et ailleurs,
09:39 elle ne serait pas chagrinée, elle retirerait sa réforme.
09:43 J'entendais les pompiers qui disent "est-ce que vous pensez qu'à 62 ans,
09:47 je vais être capable de monter à 30 mètres en haut sur la grande échelle ?
09:52 Est-ce que je vais mettre en péril la vie des gens que je suis censé sauver ?"
09:56 C'est ça qu'elle doit écouter.
09:58 Il faut que ses dirigeants politiques aient un peu les pieds sur terre,
10:01 et connaissent un peu mieux le travail.
10:03 Qu'est-ce que vous diriez d'elle, Elisabeth Borne ?
10:06 C'est la Première Ministre, ça vous va comme réponse ?
10:09 Ça c'est très factuel.
10:10 Mais vous ne vous parlez encore, vous ne vous parlez que par interview interposée maintenant ?
10:12 Non, puisqu'elle considère que les syndicats sont hors-jeu,
10:16 et que maintenant tout se passe au Parlement.
10:18 Ça aussi c'est un problème, on n'a pas parlé ensemble depuis le 4 janvier,
10:21 parce qu'elle considère que les syndicats ne servent plus à rien dans le débat.
10:24 Je pense le contraire, que oui les syndicats sont encore à même d'apporter des arguments,
10:30 tous ceux qu'on a déjà donnés, et puis de témoigner la réalité de la vie au travail.
10:34 Vous souhaitez vous mettre autour de la table avec elle, vous lui demandez ça ce matin ou pas ?
10:37 Si elle annonce qu'elle retire son projet, 64 ans et allongement,
10:43 oui on reviendra discuter, ah oui vous faites la tête.
10:47 Non mais vous lui dites une condition qu'elle ne peut pas accepter,
10:49 puisqu'elle a le défenseur, parce qu'elle dit qu'elle ne peut pas le retirer, qu'elle ne le retirera pas.
10:53 Je vous redis, c'est ma conception, je ne suis pas un homme ou une femme politique,
10:57 mais quand on fait de la politique, la moindre des choses c'est d'écouter les citoyens, je ne sais pas.
11:02 Eh bien merci en tout cas d'être venu.
11:03 Eh bien merci à vous, et puis à demain dans la manif.
11:05 Oui c'est ça, allez bonne journée à vous.
11:07 J'avais mis vos baskets j'ai vu.
11:08 Oui absolument, c'est pas pour ça, c'est pour marcher.
11:10 Merci beaucoup messieurs.

Recommandations