Guy De Fatto en célébration eucharistique à la chapelle du Prado à Lyon

  • il y a 7 ans
Guy de Fatto est né au Havre le 21 mai 1925 et décédé le 5 novembre 2016. Contrebassiste dans les orchestres de Claude Luter et de Claude Bolling, il a joué à Saint-Germain-des-Prés avec Sydney Bechet, Maxim Saury, Bill Coleman, et bien d'autres.
Il s'est converti au catholicisme et a été ordonné prêtre du Prado en 1965. Peu après, il a été nommé aumônier des artistes du spectacle.
Du quotidien La Croix, le 28/ 01/ 2009
A 84 ans, le père Guy de Fatto n’a rien perdu de sa créativité.

L'hiver, saison des souvenirs. Lyon grelotte, la nuit s'épaissit. Un troquet, à deux pas de la place Carnot. Cheveux gris en bataille, sourcil broussailleux que perce un regard intense, le P. Guy de Fatto réchauffe ses doigts autour d'une tasse de chocolat fumant. Ces doigts ravinés par le temps, modelés comme une vieille roche, sont aussi précieux que légendaires : ils ont accompagné les plus grands jazzmen d'après-guerre, de Claude Bolling à Kenny Clarke, en passant par Sidney Bechet dont il fut l'un des premiers complices en Europe.

Aujourd'hui âgé de 84 ans, il se fait plus discret. Mais certains n'ont pas oublié l'histoire de ce contrebassiste incontournable des années 1940 et 1950, devenu au fil des années une figure singulière du paysage ecclésial français. Bon pied bon œil, il ne faut pas le pousser beaucoup pour le voir ouvrir sa boîte à souvenirs.

À Saint-Germain-des-Prés, il confesse avoir vécu la Bohème « avec un B majuscule ». Comme ce jour où, cherchant un toit, on le recommanda auprès de Boris Vian. L'auteur de L'Écume des jours l'hébergera pendant un an. « Un gars très mystérieux », se souvient-il de celui qui partageait sa passion pour Duke Ellington. Dans les caves où il se produit, comme « La Rose rouge », il côtoie Juliette Gréco, Yves Robert, les Frères Jacques... Et quand il ne joue pas, il assouvit son autre passion pour le 7e art, fréquentant les salles obscures jusqu'à deux ou trois fois par jour.

Un soir de 1953, cette frénésie finit par l'épuiser. Le swing n'y est plus. Il a 28 ans. Anéanti par une rupture amoureuse, il dit avoir fait alors l'expérience fulgurante d'un « baptême dans l'Esprit ». Subitement, lui, l'incroyant, décide d'entrer en religion ! Ni une, ni deux. Stupeur dans son entourage. Les années passent. Après onze ans d'une formation rocambolesque au séminaire - « Je plains mes supérieurs ! » note-t-il avec humour -, le voilà ordonné prêtre du Prado, à Lyon. Dès lors, le P. de Fatto se consacrera à l'annonce de la foi à travers la musique et le spectacle.

Aumônier d'artistes en 1966, fondateur à Paris du centre Philippe-Néri destiné à promouvoir la prière par le chant, il a animé plus de 5 000 veillées « inspirées des mystères du Moyen Âge », dans toute la francophonie. L'homme fut par ailleurs à l'origine d'audacieuses « recherches liturgiques gospélisantes ».

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