A la chasse aux caméras indiscrètes dans les WC

  • il y a 8 ans
Dans une Corée du Sud à la pointe de la technologie sévit une armée de voyeurs high-tech qui filment les femmes à leur insu. La lutte contre ce fléau s’organise.

«Mon travail, c'est de m'assurer qu'aucune caméra ne filme les femmes lorsqu'elles se soulagent», explique Mme Park, 49 ans, en inspectant les WC d'un musée de Séoul. Elle appartient à l'équipe, entièrement féminine, de «chasseurs de caméras cachées», à l'avant-garde du combat contre la «molka», ou pornographie à la caméra masquée.

Dans un pays fier d'être à la pointe de la technologie sévit une armée de voyeurs férus de technologie. Ils se servent d'applications spéciales pour regarder sous les jupes des femmes assises à leur bureau, ou dans les escalators du métro. Des caméras espionnes filment l'intérieur des toilettes publiques et des cabines d'essayage.

Pas un jour ne passe sans que les médias n'évoquent des délits «molka». Le pasteur d'une église de Séoul forte de 100’000 membres a ainsi été surpris en train de filmer sous des jupes sur un escalator. Un obstétricien a été emprisonné pour avoir filmé des patientes et des infirmières. L'entraîneur en chef de l'équipe nationale de natation a dû démissionner le mois dernier: deux nageurs avaient installé une caméra cachée dans le vestiaire de leurs coéquipières.

D'après la police, le nombre de délits «molka» est passé de 1100 environ en 2010 à plus de 6600 en 2014. Si certains utilisent leur téléphone, d'autres emploient des gadgets à la James Bond, stylos à bille, lunettes ou montres équipés de microcaméras, dit Hyun Heung-ho, policier membre de l'unité détachée dans le métro. Créée en 1987 pour lutter contre les pickpockets, son travail est aujourd’hui concentré sur le combat «antimolka».

La majeure partie des hommes surpris dans le métro ont la vingtaine ou la trentaine, et ont pour beaucoup reçu une éducation supérieure. «Ils pleurent et supplient qu'on les laisse partir, ils racontent qu'ils étaient juste ‘curieux’», ajoute le policier. Les auteurs risquent 5 ans de prison.

Lee Hae-kyung, employée de 38 ans, dit essayer d'éviter les WC publics: «Si j'ai un besoin urgent, j'inspecte toujours les poignées de la porte et de la chasse.» Quand un homme est derrière elle sur un escalator, elle se tourne légèrement pour le regarder dans les yeux pour dissuader les voyeurs.

Les «vidéos sous les jupes» sont consommées avec avidité depuis des lustres en Corée du Sud et au Japon, «deux nations profondément conservatrices où les discussions franches sur le sexe sont taboues et où les femmes sont victimes de discriminations systématiques», explique la sociologue Lee Na-yong.

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