Max Bardet (2/6) : "Massacrer, c’était la seule chose qui les excitait"

  • il y a 10 ans
Max Bardet, pilote d'hélicoptère au Cameroun de 1962 à 1964, nous a livré un témoignage inédit, le 21 juillet 2014.
Après avoir été envoyé de l'Algérie, où il prêtait main forte aux "ratonnades", au Cameroun en 1962, Max Bardet s'ennuyait : "Au départ j’ai rien vu. J’ai rien fait pendant un ou deux mois, j’ai commencé à râler, j’ai dit mais qu’est-ce que je suis venu faire ici ?". C'est alors qu'un "capitaine" le missionne pour l'accompagner dans des opérations qui s'apparentent ni plus ni moins à des crimes de guerre, des massacres de centaines de civils désarmés.
"Et puis tout d’un coup, ça c’est pas su ça c’est pas vrai, et tout d’un coup le capitaine m’a fait découvrir que la guerre existait encore, qu’elle était là. Parce qu’il y avait eu une résurgence de cette guerre. Ils avaient pas dû abattre – oui abattre parce que dans ces pays on abat, on fait pas prisonnier – ils avaient pas dû abattre tous les caïds, il devait y avoir quelques caïds qui essaient de remonter… Et ça duré quelques mois. Ils ont formé ce fameux commando qui est allé au Congo apprendre à se battre et disons, appelez ça la guerre, apprendre à réduire les corps, les corps qui gênent quoi."
Le capitaine et le pilote encadraient alors des supplétifs africains chargés d'exécuter la basse besogne : "S’ils pouvaient tuer, s’ils pouvaient éliminer, s’ils pouvaient massacrer, c’était la seule chose qui les excite."
La brutalité des supplétifs l'effraie aujourd'hui, mais il précise bien que c'étaient le capitaine français et lui-même qui dirigeaient les opérations.
"Nous on contrôlait. C’est tout. L’opération elle se déclenchait. Par qui par quoi j’en sais rien. Tout ce que je sais c’est que nous on allait contrôler surtout qu’il y ait pas de… heu, qu’il y ait pas de fuite. Qu’il y ait pas de gens qui puissent disons s’évader enfin partir du regroupement pour aller raconter ce qui se passait."
Et comment on fait pour éviter ces fuites ?
"Oh ben des gens qui veulent partir comme ça… Le gars à côté de vous à la radio dit « deux fuyards au Nord-Est ». Paf un coup de jeep, deux rafales de mitraillette. Enfin sur les jeeps ils avaient des mitrailleuses légères 7,5 ou des 30-30. Ensuite on sait pas hein, c’est comme les moutons, c’est malheureux, ils essayaient pas de partir. Ils les emmenaient comme ça… "
www.kamerun-lesite.org

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